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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort
Autoren: Paul C. Doherty
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chevaliers bannerets rassemblés autour de la porte et entreprit de descendre les marches raides interrompues à mi-chemin – une longue planche de bois permettait de franchir l’espace – pour pénétrer dans la sombre crypte circulaire de l’abbaye avec ses huit fenêtres au ras de terre et son énorme pilier central. Corbett s’écarta du roi et mit la main dans le trou, puis contempla les arches, les cassettes, les sacoches de cuir du trésor, tous vides, qui jonchaient le sol. Édouard s’assit sur un coffre, embrassa les lieux du regard, l’air furieux, et marmonna ses jurons favoris « Par la main de Dieu » et « Ventredieu », suivis d’une litanie d’imprécations ordurières contre ceux qui avaient forcé une fenêtre pour dérober le trésor royal constitué d’or, d’argent, de joyaux et de biens précieux. Les truands avaient même enlevé les pierres de l’arca, la chambre forte aménagée au coeur du pilier massif.
    — Ils seront tous pendus, Corbett !
    — Oui, Monseigneur.
    — Écoutez ! siffla le monarque. Pas un bruit !
    Le magistrat retourna vers la porte massive qui menait aux marches de la crypte. Il avait conscience du froid et des ténèbres que le grand nombre de torches et de lumignons, vacillant et dansant en vain, ne pouvaient dissiper.
    — Pas un bruit, il est vrai, Majesté, admit-il. Les moines logent-ils toujours à la Tour ?
    — Une bonne centaine y pourrira, gronda le roi, jusqu’à ce que je découvre la vérité et que mon trésor me soit restitué. Soyez-en sûr, Corbett !
    Le garde du Sceau privé n’en doutait pas. Il avait participé à l’impitoyable enquête sur la grande conspiration ourdie pour voler le trésor dans la crypte de Westminster, pour dérober la cassette du roi, qu’on disait être en sécurité dans cette place sainte, le mausolée de sa famille. Cela n’aurait jamais dû arriver. La crypte était protégée par des murs épais de huit pieds, des fenêtres étroites, des portes renforcées et un escalier dont on avait supprimé les marches au milieu pour laisser un vide que seule une planche sur mesure pouvait enjamber. Et pourtant l’outrage avait eu lieu. Sa pure effronterie avait choqué jusqu’aux cyniques officiers de la chancellerie et de l’Échiquier, qui avaient tous les jours affaire à une légion de filous et de crapules. Le vol avait été le fruit d’une alliance impie entre la lie des bas-fonds de Londres, conduite par Richard Puddlicott, naguère clerc, et quelques-uns des principaux moines de l’abbaye. Puddlicott avait séduit ces prétendus observants de la règle de Saint-Benoît en introduisant dans les lieux des gotons, des mets et du vin destinés à des agapes nocturnes, pendant que d’autres conspirateurs, profitant de la nuit, avaient descellé une des fenêtres de la crypte, creusant un trou en secret dans le cimetière qui la jouxtait. Ils avaient fini par forcer un passage la veille de la Saint-Marc et par emporter l’essentiel des richesses. Les moines qui dirigeaient la communauté n’avaient rien ignoré de l’affaire et y avaient prêté la main avec empressement. Tant d’objets de valeur avaient été subtilisés qu’on en avait retrouvé à Tothill, dans les champs environnant l’abbaye, et qu’on en avait même repêché dans la Tamise. Le reste du butin était soudain apparu sur le marché de Londres, les cupides orfèvres tournant la tête quand ils achetaient et vendaient ce qui ne leur appartenait manifestement pas. Édouard se trouvait alors en Écosse, mais sa fureur avait été sans bornes. Il avait dépêché des mandataires à Londres, dont Corbett, et toute la communauté de l’abbaye avait été enfermée à la Tour. Des cours d’Oyer et Terminer {3} s’étaient rendues dans tous les quartiers de la ville ; on avait cité des noms, arrêté des suspects qu’on avait même traînés hors du sanctuaire en violant sans vergogne la loi canon. Le monarque exigea à moult reprises qu’on retrouve le trésor et qu’on amène à la Tour toute personne ayant trempé dans sa disparition.
    — Je les réduirai en poussière, déclara-t-il en se mordillant le pouce jusqu’au sang et en recrachant un petit morceau de peau. Asseyez-vous, Corbett, ajouta-t-il en désignant un siège proche. Il faut que je vous parle.
    Édouard se gratta la commissure des lèvres en scrutant ce clerc énigmatique, à la peau mate, rasé de près, au visage émacié, dur et résolu,
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