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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi
Autoren: Max Gallo
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pas taire les commentaires.
    Les uns disent à propos de ces époux royaux : « On
les marie trop jeunes. »
    Mais d’autres sont plus sévères : « La nature
semble avoir tout refusé à Monsieur le Dauphin », conclut l’ambassadeur d’Autriche
Mercy-Argenteau.
    Il précise dans une lettre à l’impératrice Marie-Thérèse :
    « Madame la Dauphine – Marie-Antoinette – craint dans
le prince son époux les effets de la nonchalance, de peu d’aptitude à être ému,
enfin un défaut de nerf sans lequel on ne pense ni on ne sent assez vivement
pour agir avec efficacité. »
    Et cependant – enfin ! – le mariage est consommé -ou
presque ! – en mai 1773 – trois ans après les noces donc !
    « Je crois le mariage consommé, quoique pas encore dans
le cas d’être grosse, écrit Marie-Antoinette à sa mère l’impératrice
Marie-Thérèse. C’est pour cela que Monsieur le Dauphin ne veut pas qu’on le
sache encore. Quel bonheur si j’avais un enfant au mois de mai… »
    Est-ce l’effet de ces journées de mai ? Louis apparaît
aux fêtes que donne Marie-Antoinette, et celle-ci participe aux chasses royales.
    Et quand ils font leur entrée officielle à Paris, le 8 juin
1773, la foule les acclame. Jamais un couple de la famille royale n’a reçu un
tel accueil populaire.
    Les jeunes gens – dix-neuf et dix-huit ans – sont émus.
    « Ce qui m’a touchée le plus, écrit Marie-Antoinette, c’est
la tendresse et l’empressement de ce pauvre peuple qui malgré les impôts dont
il est accablé était transporté de joie de nous voir. Lorsque nous avons été
aux Tuileries il y avait une si grande foule que nous avons été trois heures
sans pouvoir avancer ni reculer Monsieur le Dauphin et moi… Avant de nous retirer
nous avons salué avec la main le peuple, ce qui a fait grand plaisir. Qu’on est
heureux dans notre état de gagner l’amitié du peuple à si bon marché ! Il
n’y a pourtant rien de si précieux, je l’ai bien senti et je ne l’oublierai
jamais. »
    C’était en juin 1773.
    Au fond de lui, Louis ne peut longtemps se laisser bercer
par ces scènes émouvantes et rassurantes.
    Il doit se soumettre aux examens du chirurgien Lassonne.
    On sait déjà que le cadet de Louis, le comte de Provence, est,
quoiqu’il le dissimule, incapable de remplir ses devoirs d’époux. Louis doit
faire face non seulement à l’ironie et aux sarcasmes des courtisans, mais à
Marie-Antoinette qui écrit à Marie-Thérèse : « Il est très bien
constitué, il m’aime et a bonne volonté, mais il est d’une nonchalance et d’une
paresse qui ne le quittent jamais. »
    Et pourtant il chasse avec fougue et témérité.
    Il y a aussi les critiques du premier des ministres, Choiseul,
dont il sent la volonté de l’humilier en même temps que la jalousie. Car Louis
sera roi. Et Choiseul écrit :
    « Le prince est imbécile, il est à craindre que son
imbécillité, le ridicule et le mépris qui en seront la suite, ne produisent
naturellement une décadence de cet Empire, qui enlèverait le trône à la
postérité du roi. »
     
    Louis se sent ainsi observé, jaugé, jugé, critiqué, et cette
colère mêlée d’amertume, ce sentiment d’impuissance, qui le rongent, il ne peut
les exprimer qu’en se jetant au terme d’une chevauchée, couteau au poing, sur
le gibier qu’il a acculé.
    Mais cette force et cette rage intérieures sont proscrites
dans le monde policé, retors, dissimulé, de la Cour et dans le labyrinthe des
intrigues qui constitue la politique de la monarchie.
    Alors Louis doit affronter et subir les regards perçants des
courtisans, des ambassadeurs, qui font rapport à leurs souverains sur cette
monarchie française, si glorieuse, si puissante, et cependant taraudée par les
faiblesses de ceux qui l’incarnent, et paralysée par les résistances aux
réformes de ses élites privilégiées.
    L’ambassadeur d’Espagne écrit ainsi :
    « Monsieur le Dauphin n’a pas encore révélé son talent
ni son caractère. On ne doute pas qu’il soit bon et grand ami de la vertu. Sa
taille est bien prise et son corps robuste ; il aime extrêmement la chasse
et la suit à cheval si dextrement qu’on le suit avec difficulté. On considère
même qu’il s’expose à des chutes dangereuses.
    « On ne connaît personne qui ait gagné sa confiance
intime.
    « On doute qu’il ait consommé son mariage. Quelques-uns
l’affirment, mais plusieurs dames de la
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