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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi
Autoren: Max Gallo
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dauphine ne paraissent pas le croire ;
il ne manque pas de pièces à conviction pour le faire penser.
    « On retrouve dans le linge des deux princes des taches
qui révèlent que l’acte a eu lieu, mais bien des gens l’attribuent à des
expulsions extérieures du dauphin qui n’aurait pas réussi à pénétrer non par
manque de tempérament mais à cause d’une petite douleur mal placée qui s’accentue
quand il insiste.
    « D’autres croient que tout a été accompli, parce que
le dauphin s’est montré plein d’affection avec la dauphine depuis quelque temps ;
mais le doute qui continue à planer sur le sujet, pourtant si important, ne
laisse pas penser que le résultat désiré ait été atteint, sans quoi on l’eût
célébré.
    « La dauphine est belle et de cœur très autrichien :
tant qu’il ne l’aura pas très attachée à la France il est naturel qu’elle goûte
peu tous les avantages de ce pays.
    « Pourtant elle aime beaucoup les bijoux et les
ornements et ne manque pas d’occasions ici de se procurer tout ce qu’elle
souhaite, elle peut donc satisfaire abondamment l’inclination de son sexe…
    « Le comte de Provence a très bon air. Mais tout le
monde, d’une voix unanime, affirme son impuissance.
    « Le comte d’Artois est galant et de belle allure, il a
plus de lumières que ses frères et plus de dispositions à s’instruire. À le
juger par son apparence, sa vivacité et toutes ses qualités le font apparaître
comme le sauveur et le restaurateur de sa famille.
    « La situation de ce gouvernement et de cette monarchie
n’est pas à envier… »

4
    Louis sait ce que l’ambassadeur d’Espagne pense du royaume
de France.
    Et il n’ignore rien de ce que les courtisans, les autres
diplomates, et les membres de la famille royale, écrivent dans leurs missives, chuchotent
entre eux.
    Le compte rendu de leurs propos, la copie de leurs lettres, viennent
d’être déposés, là, sur la table, par le directeur de ce « cabinet noir »
chargé de recueillir les conversations, d’ouvrir les correspondances, et d’en
faire rapport quotidien au roi.
    Ainsi l’avaient voulu Louis XIV, puis Louis XV, et Louis a
pris leur suite, fasciné en même temps qu’effrayé par ce qu’il découvre, avide
désormais de connaître ainsi la réalité cachée de ce royaume dont il a la
charge, et de percer à jour les intentions de ses proches.
     
    Louis se convainc que ce ne sont point les apparences qui
comptent, que les propos publics ne sont le plus souvent que le masque d’intentions
et de projets différents.
    Il avait depuis l’enfance dissimulé ses pensées, adolescent
solitaire et silencieux. Il se persuade qu’on ne peut gouverner ce royaume, agir
sur les hommes, qu’en jouant une partie secrète, dont il ne faut livrer les
ressorts à quiconque, même au plus proche des conseillers, même à la reine.
     
    Comment d’ailleurs pourrait-on agir autrement, quand on est
celui qui doit, en dernier recours, décider du sort de ces vingt-cinq millions
de sujets qui constituent le royaume le plus peuplé d’Europe ?
    Quand, à Paris, on dénombre au moins six cent mille
habitants.
    Qu’il faut se soucier de ces philosophes, qui règnent sur
les esprits, qui ont diffusé à plusieurs milliers d’exemplaires, les dix-sept
volumes de leur Encyclopédie .
    Et Louis se défie de ces hommes « éclairés » de
cet esprit des Lumières, de ce Voltaire qui, habile, retors, sait à la fois louer
le roi sacré à Reims, et conduire la guerre contre l’Église. Voilà un homme qui
avance caché, qui publie des libelles violents sous des noms d’emprunt, mais
qui n’a qu’un but : « Écraser l’infâme », cette religion
apostolique et romaine qui est le socle même de la monarchie.
    Or Louis se veut être le Roi Très Chrétien de la fille aînée
de l’Église.
     
    Elle compte près de cent trente mille clercs et moniales, dont
cent quarante-trois évêques. Ces derniers font tous partie de cette noblesse, forte
de trois cent cinquante mille personnes, dont quatre mille vivent à la Cour.
    Privilégiés, certes, mais Louis sait que nombreux sont ceux
qui, tout en étant fidèles à la monarchie, jalousent le roi. À commencer par ce
Louis-Philippe d’Orléans, son cousin, grand maître de la Maçonnerie, cette
secte condamnée par l’Église mais tolérée, alors qu’en 1764 – victoire du parti
philosophique – les Jésuites ont été expulsés du royaume.
    Et
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