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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi
Autoren: Max Gallo
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reste impassible.
    Il ne s’est irrité qu’au moment du dîner, quand on lui a
retiré fourchettes et couteaux.
    « Me croit-on assez lâche pour que j’attente à ma vie ? »
a-t-il dit.

39
    Ce sont les dernières heures et c’est la dernière nuit.
    Louis a appris que l’un de ses anciens gardes du corps, Pâris,
a assassiné au Palais-Royal, ce 20 janvier 1793, vers cinq heures, le député
Lepeletier de Saint-Fargeau, régicide.
     
    Louis ne veut pas qu’on le venge.
    Il accepte son destin sans colère. Il veut simplement
préparer son salut, et il est ému quand, enfin, l’abbé Edgeworth entre dans la
chambre, s’agenouille en pleurant.
    Louis prie, demande à l’abbé de se relever, lui montre son testament,
l’interroge sur l’état du clergé français, déchiré, persécuté.
    Il veut prier pour l’Église, et pour son salut.
    Puis il demande à l’abbé de rester auprès de lui quand sa
famille, comme la Convention l’a autorisé, viendra lui rendre visite. Il craint
l’émotion de la reine, et ne voudrait pas que son chagrin le bouleverse.
    Il veut rester serein face à la mort qui est si proche.
    Il veut qu’on lui apporte une carafe et un verre d’eau pour
la reine, qui peut perdre connaissance.
    Enfin, la voici, avec Madame Élisabeth, la sœur du roi, le
dauphin et Madame Royale.
     
    « À sept heures du soir on vint nous dire, raconte
Madame Royale, qu’un décret de la Convention nous permettait de descendre chez
mon père.
    « Nous courûmes chez lui et nous le trouvâmes bien
changé. Il pleura de notre douleur mais non de sa mort.
    « Il raconta à ma mère son procès, excusant ces
scélérats qui le faisaient mourir, répéta à ma mère qu’il ne voulait pas mettre
le trouble dans la France.
    « Il donna ensuite de bonnes instructions religieuses à
mon frère et lui recommanda surtout de pardonner à ceux qui le faisaient mourir.
    « Il donna sa bénédiction à mon frère et à moi.
    « Ma mère désirait extrêmement que nous passions la
nuit avec mon père, il le refusa, ayant besoin de tranquillité.
    « Ma mère demanda au moins de revenir le lendemain
matin, mon père le lui accorda, mais quand nous fûmes partis il demanda aux
gardes que nous ne redescendions pas, parce que cela lui faisait trop de peine. »
     
    Il ne les verra plus.
    Comment accepter cela sinon en s’en remettant à Dieu ?
    Il dit à l’abbé Edgeworth :
    « Ah, Monsieur, quelle entrevue que celle que je viens
d’avoir ! Faut-il que j’aime et que je sois si tendrement aimé ! Mais
c’en est fait, oublions tout le reste pour ne penser qu’à l’unique affaire de
notre salut ; elle seule doit en ce moment concentrer toutes les
affections et les pensées. »
    Il se confesse. Il hésite quand Cléry lui propose de souper,
puis il mange de bon appétit, et s’en va dormir, sachant que l’abbé Edgeworth a
obtenu l’autorisation de célébrer la messe demain, au réveil que Louis a fixé à
cinq heures.
    Il pourra communier. Et cet espoir le rassure.
     
    Courte mais paisible nuit.
    À six heures, alors que les tambours battent la générale, que
des fantassins et des cavaliers entrent dans la cour du Temple, l’abbé
Edgeworth dit la messe que Louis suit à genoux, avant de communier.
    Puis il pose sur la cheminée sa montre, son portefeuille, et
il donne à Cléry pour la reine un anneau, une mèche de ses cheveux, et pour son
fils un sceau.
    Des gardiens, sans raison autre que de le persécuter, ne
cessent de frapper à la porte, puis à neuf heures, voici Santerre qui entre
brutalement, accompagné d’une dizaine de gendarmes.
    « Je vais être à vous », dit Louis, et il referme
la porte, s’agenouille devant Edgeworth.
    « Tout est consommé, dit-il à l’abbé, donnez-moi votre
dernière bénédiction et priez Dieu qu’il me soutienne jusqu’à la fin. »
     
    Louis, en ce lundi 21 janvier 1793, est dans sa
trente-neuvième année.

40
    Ce lundi 21 janvier 1793 :
    « C’est à mon grand regret que j’ai été obligé d’assister
à l’exécution, en armes, avec les autres citoyens de section, et je t’écris, le
cœur pénétré de douleur et dans la stupeur d’une profonde consternation. »
    Ainsi s’exprime le grand médecin Philippe Pinel, un savant
généreux, qui fit ôter leurs chaînes aux fous et les sépara des criminels.
    « Aussitôt que le roi a été exécuté, poursuit-il, il s’est
fait un changement subit dans un grand nombre
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