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Le jour des reines

Le jour des reines

Titel: Le jour des reines
Autoren: Pierre Naudin
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existence de satrape, caracolant avec ses chevaliers, ses trouvères, ses pennonciers, cependant que sa femme dépensait, dépensait encore, dépensait toujours : les guerres que le prince de Galles entreprit contre ce qui subsistait de la France ne furent motivées que par l’appât du butin. Ce potentat les fit d’ignoble façon, et c’est certainement à cette époque de dépenses voluptuaires et de clinquant outrancier que ses subordonnés et les survivants de ses abominations le surnommèrent le Prince Noir (the Black Prince). Il faudrait, ici, développer, décrire les états d’âme du prince, tantôt renfrogné, cédant à des emportements terribles, puis s’enivrant de plaisirs en compagnie de ses favoris [342] . Mais c’est Jeanne qui nous importe. Que dire d’elle, sinon qu’elle s’étourdissait, sans doute pour oublier d’inapaisables angoisses.
    Car si Édouard aimait l’amour, il n’éprouvait de véritable volupté que dans la guerre. Il la fit en France, il la fit en Espagne avec le même délicieux acharnement. Thomas Holland s’était en quelque sorte « encombré » de Jeanne ; Édouard, non.
     
    DIEU ET AMOUR
     
    L’inquiétude rongea Jeanne lorsque son époux dut partir pour l’Espagne, combattre auprès de Pierre le Cruel contre Henri de Trastamaré.
    « Traduisons » ici le Héraut de Chandos :
    Quinze jours après Noël (1366), la princesse eut au cœur une amère douleur. Elle se lamentait à la Déesse Amour, qui l’avait destinée à une si haute majesté en lui donnant pour époux une vraie fleur de la magnanimité. Souvent, elle disait : « Las ! que ferais-je, Dieu et Amour, si je venais à perdre la Vraie Fleur de la Magnanimité, celui qui n’a pas d’égal pour le courage ? Ô mort, tu serais près de moi. Maintenant, je n’ai ni cœur ni sang dans les veines et je défaille quand je songe à son départ, car tous s’accordent à dire que jamais aucun homme n’entreprit si périlleuse expédition. Ô très bon et glorieux Père, réconfortez-moi de votre pitié ! »
    « Dame, cessez de pleurer et de vous lamenter. Dieu n’est-il pas tout-puissant ? » s’écria Édouard, à bout de nerfs.
    Et de sauter à cheval !
    Il paraît qu’au moment de cette scène, Jeanne était de nouveau enceinte. Elle accoucha, selon Froissart, en 1367 (nouveau style), « à heure de tierce, le jour de l’Apparition des Trois rois », à Bordeaux [343] .
    Le nouveau-né reçut le prénom Richard. Édouard, l’aîné, vivait encore : il mourut au commencement de janvier 1371, âgé d’un peu plus de 6 ans.
    Après l’expédition d’Espagne, le prince de Galles fit, à Bordeaux, une entrée à la romaine. On était en septembre, il restait de beaux jours : les fêtes recommencèrent.
    Jeanne, à ce moment-là, eut des pressentiments : le prince était « moult mélancolieux ». De plus, l’hydropisie dont il était atteint avait fait des progrès désagréables… Le duché d’Aquitaine était menacé par le duc d’Anjou. Édouard se révélait obéré de dettes, Pierre le Cruel n’ayant point acquitté les sommes dues pour obtenir l’alliance de l’Angleterre et particulièrement celle de l’Aquitaine.
    Il fallut se résoudre à vendre la vaisselle d’or et d’argent et licencier quelque 6 000 « sangsues » des compagnies pour essayer d’équilibrer un budget en faillite. Ce fut insuffisant. On renonça à verser la rançon des prisonniers anglais.
    Édouard de Woodstock touchait le fond quand un de ses captifs, l’un des plus valeureux, des plus prétentieux et des plus inconscients en l’occurrence, fixa lui-même sa rançon à 100 000 doubles d’or !
    C’était Bertrand du Guesclin.
    La rançon tarda, mais fut acquittée. Elle ne pouvait combler un déficit énorme. Édouard, que l’on pourrait dès à présent surnommer le Gros, leva sur l’Aquitaine un fouage impolitique qui, presque aussitôt publié, lui aliéna une grande partie de la noblesse de Gascogne, laquelle se rallia à la Couronne de France. Charles V accueillit avec joie cette désertion et cet hommage lige (25 juin 1369). Mieux : il ajourna le prince de Galles « à se présenter devant son souverain le plus hâtivement possible, en propre personne, pour ouïr droit sur aucuns griefs et molestes indues que, par faible conseil et simple information, le prince avait proposé à faire, de laquelle chose le roi était tout esmervillet ».
    Édouard fit
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