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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford
Autoren: Ron Hansen
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sitôt que le
train s’arrêta et se faufila à travers les magasins et les ruelles jusqu’au
bureau du Morning Chronicle où, avec l’aide d’un rédacteur, il rédigea
un article qui fut publié le lendemain :
    Bob Ford est de
retour à Creede. Pour quelle raison la perspective de ce retour a-t-elle pu
engendrer la terreur dans le cœur de certains ? C’est difficilement
compréhensible. Depuis qu’il habite à Creede, nul autre ne s’est montré aussi
paisible que lui, si l’on fait exception de ce malheureux dimanche soir, il y a
deux semaines. S’il est profondément désolé de ses actions en cette occasion, il
n’a en définitive fait que se conformer à cette valeur fondamentale de l’Ouest,
la fidélité envers ses amis – valeur que, en règle générale, les personnes
originaires de l’Est ont du mal à appréhender. Il est vrai, néanmoins, que
quand un natif de l’Ouest prend le parti de quelqu’un, il ne le fait pas à
moitié, même si cela implique simplement de se saouler et d’aller tirer
quelques coups de feu en ville. C’est là la valeur cardinale qui différencie l’Ouest
de l’Est. Bob Ford possède des intérêts divers à Creede et s’il désire rester
ici afin de veiller sur ses investissements, il en a tout autant le droit que n’importe
qui d’autre. Tout le monde souhaite jouir d’une chance équitable et Ford mérite
au moins qu’on la lui accorde.
    Bob comparut ensuite
devant le juge de paix, plaida coupable et s’acquitta bien volontiers d’une
amende de cinquante dollars, mais Soapy Smith persuada le Comité des Cent (qui
comprenait bon nombre de natifs de l’Est) que Bob était une plaie pour la
communauté et qu’il fallait l’expulser de Creede sous peine de mort. Le Comité
dépêcha comme messager auprès de Bob le marshal Theodore Craig et Bob répliqua
uniquement que c’était une étrange coïncidence que toute sa vie durant, des
hommes du nom de Craig affublés d’une étoile lui aient donné des ordres. Il
ajouta qu’il en avait assez et qu’il ne repartirait pas. Quand les Cent se
présentèrent à l’Exchange Club pour se saisir de Bob, ils trouvèrent assemblés
autour de lui tous ceux à qui il avait donné du travail, ses jolies hôtesses, des
joueurs, ainsi que d’autres figures inquiétantes comme Jack Pugh et Broken Nose
Creek, tous les armes à la main.
    « Je reste, fit Bob. Transmettez le
message à Soapy.
    — Tu ne nous laisses pas d’autre solution
que l’affrontement, l’avertit Craig.
    — Vous ne pouvez pas me tuer, je suis
déjà mort », rétorqua Bob.
    Le Comité céda et Bob continua à défier les
autorités de la ville en rouvrant sa salle de jeu et en se pavanant dans les
rues avec des airs de gentilhomme dans ses costumes anglais du dernier chic, exclusivement
armé d’un Derringer – et encore, enfoui dans sa poche arrière. Il était
accoutumé à l’hostilité que manifestaient des inconnus à son égard et
ressentait la haine à son encontre qui émanait de sa salle de jeu chaque soir. Son
passé était disséqué, sa vie privée publiée, des piétons s’arrêtaient sur les
trottoirs pour le dévisager, des journalistes l’interceptaient pour le harceler
de questions impertinentes et prévisibles. (Un jour, après qu’on lui eut
présenté un reporter, Bob avait aussitôt prédit : « Je parie que vous
allez me cuisiner jusqu’à ce que mort s’ensuive, puis qu’une fois rentré, vous
allez m’assaisonner, comme dans tous les autres baveux. ») Il fut comparé
à une foule de reptiles et d’animaux – prédateurs pour la plupart –, poursuivi
par les sifflets des enfants et les divagations de mineurs qui creusaient leur
tombe au whisky. On déposait des légumes pourris sur le pas de sa porte, des
Sudistes en état d’ébriété débarquaient parfois dans son saloon pistolet en
main, on se réfugiait dans les magasins pour éviter de le croiser, son courrier
comportait tant de lettres de menaces qu’il les lisait désormais sans
sourciller, avec tout juste une vague curiosité, puis les froissait avec un
sourire en coin ; on cloua même sur la porte de l’un de ses placards un
cadavre de chat accompagné de ce simple mot : « Fous le camp d’ici. »
La fausse signature qui suivait était celle d’un certain Ed O’Kelly et le texte
écrit avec du sang de poulet.
    Et pourtant, Bob ne changea pas de nom, il ne
camoufla pas son identité, il ne se déroba pas à la presse, il ne
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