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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford
Autoren: Ron Hansen
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plus ce
que c’est, la peur.
    — C’est aussi ce que je me disais.
    — Mais je suis prêt à vous laisser Creede.
    — Vous dites seulement ça parce que vous
n’êtes pas en mesure de m’en empêcher.
    — Tenez-vous seulement à distance de l’Exchange
Club – vous, vos gardes du corps et vos gros bras. Vous n’avez pas la puissance
de feu nécessaire. »
    Soapy vida son verre de cognac dans le pot d’une
plante verte et se releva en prenant appui sur les bras de son fauteuil. Il se
coiffa de son grand sombrero noir et écrasa son cigare sur le tapis.
    « Vous et moi, on est exactement
semblables. Si jamais il me faut liquider Robert Ford, j’imagine que vous
devinez ce que je ferai.
    — Comme je l’ai déjà dit, j’ai déjà eu
assez peur pour toute une vie. »
    Soapy sortit et Bob se posta près des hautes
fenêtres qui s’élevaient jusqu’au plafond et donnaient sur la rue. Il aperçut
Soapy qui rigolait avec ses gardes du corps en pataugeant dans la neige ; les
commerçants le saluaient et s’effaçaient devant lui sur les trottoirs. Bob s’accota
contre le vert du mur et, d’une voix sans émotion, murmura : « Pan. »
    L’administration de
Creede fut, en effet, réorganisée. Les gorilles de Soapy forcèrent la main aux
boutiquiers, alpaguèrent des passants avant de leur coller un pistolet contre
la tempe dans une ruelle tandis qu’un lieutenant de Soapy les informait de
certaines transformations ; ils affranchissaient les nouveaux arrivants
dès que ceux-ci mettaient le pied hors du train et en blessèrent plus d’un en
lui tordant le poignet jusqu’à ce qu’il cassât. Soapy s’autoproclama président
d’un fonds pour les joueurs et imposa à tous les tenanciers de saloon – à l’exception
de Robert Ford – d’y adhérer. Il manipula tant et si bien les personnes et les
postes qu’en quelques semaines tous ses bons amis se retrouvèrent maire, conseillers
municipaux, coroner ou juge de paix ; son beau-frère, John Light, fut
nommé marshal et, en guise de pied de nez à Bob, Edward O. Kelly engagé comme
shérif adjoint de Bachelor, un camp minier établi sur la montagne du même nom, à
moins de cinq kilomètres de Creede. Dans le même temps, Soapy inaugura l’Orleans
Club, une salle de jeu située à Jimtown, la partie est de la vallée, salle de
jeu dont il avait financé l’achat grâce aux contributions mensuelles qu’il
touchait afin de couvrir les dépenses de fonctionnement de la municipalité. Il
fit tout ce qui était en son pouvoir pour contraindre Bob à renoncer à l’Exchange
Club : des pierres autour desquelles étaient attachés des messages de
mauvais augure furent lancées par les portes battantes à l’heure de la
fermeture, des hommes patibulaires habillés de manteaux en grizzly et armés de
fusils se mirent à traîner à longueur de journée devant le saloon ou à suivre
Bob où qu’il allât et, le 3 avril 1892, le site sur lequel était bâti l’Exchange
Club fut désigné par la ville pour accueillir la future école et l’établissement
se vit ordonner de fermer.
    Bob ne tint aucun compte de cet arrêté et ne
céda pas d’un pouce face aux décrets et aux injonctions de Smith, mais son
comportement se modifia à mesure que son influence diminuait, il fut accusé de
couardise, de compromission, d’être à la hauteur de sa réputation de
pusillanimité et il prit l’habitude de se claquemurer tout le jour dans son
appartement ou, le soir, dans quelque pièce privée pour se saouler de whisky
maison, tournant pensivement carte après carte, lisant sa destinée dans chaque
roi, chaque valet.
    Il se plaignit auprès de Dorothy que
vilipender Robert Ford fut devenu un sport à part entière. Il lui arrivait de s’apitoyer
sur son sort et de se demander qui les gens eussent dévisagé, débiné, raillé ou
menacé si Bob Ford n’eût été là. Même dans son propre saloon, il sentait que
les sourires disparaissaient sur son passage, que c’était de son orgueil
démesuré que ses clients discutaient à vo ix basse, que c’était
des piques à son encontre qui déformaient leurs bouches comme des hameçons, qu’ il y avait toujours quelqu’un pour l’espionner, rapporter le moindre de
ses mots à Smith et recenser chacun de ses manquements, chacune de ses
transgressions. Dorothy elle-même lui semblait indifférente, comme si elle
percevait en lui un imposteur, un gamin tout en impulsions, mais dépourvu
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