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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford
Autoren: Ron Hansen
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7 septembre 1881
    Il était d’un
naturel agréable, quoique plutôt calme et réservé. Il écoutait attentivement
tout ce que Scott Moore et moi disions, mais lui-même parlait peu. De temps à
autre, il posait une question à propos de la région et des possibilités qu’elle
offrait pour un éleveur. Mais j’avais en permanence conscience que rien de ce
qui se disait ou se faisait dans la pièce ne lui échappait. Il ne faisait
jamais référence à lui-même, ne trahissait pas la moindre suffisance ni la
moindre forfanterie. N’eussé-je su à qui j’avais affaire que je l’eusse pris
pour un négociant ordinaire recevant la visite de deux amis. Mais il était si
aimable et courtois que, dans l’ensemble, je ne pus m’empêcher d’énormément l’apprécier.
    MIGUEL ANTONIO OTERO
    Ma vie sur la Frontière
    Il entrait dans l’âge
mûr et habitait un pavillon en bois de Woodland Avenue. Des graminées vertes s’immisçaient
entre les marches de la véranda, un nid de guêpes était accroché à l’un des
gables du grenier ; d’un orme mourant pendait une corde tenant lieu de
balançoire qui décrivait un arc de cercle au-dessus d’un coin de terre battue
aussi fine que de la farine. Le soir, Jesse s’installait dans un rocking-chair
et fumait un cigare tandis que sa femme s’essuyait les mains sur un tablier en
coton et lui faisait son rapport sur leurs deux enfants. À l’intérieur de la
maison, il ne se déplaçait jamais sans plusieurs quotidiens – le Daily
Democrat de Sedalia, la Gazette de Saint Joseph, le Times de
Kansas City – au creux desquels il dissimulait un calibre .44 de trente
centimètres de long. Il se promenait avec des crayons plats dans les poches. Il
s’amusait à jeter des cacahouètes aux écureuils. Il tressait des pissenlits
jaunes dans la chevelure blonde de sa femme. Il s’adonnait à la projection
astrale, à la divination, à la sorcellerie. Il gobait des jaunes d’œufs dans
leur coquille et, quand il était malade, se nourrissait d’herbe comme un chien.
Il avait coutume d’ouvrir au hasard la Bible à reliure souple qui avait
appartenu à son défunt père, le pasteur Robert S. James, et méditait les
versets sur lesquels il tombait, qui lui livraient tous des messages
confidentiels. Les pages étaient couvertes de commentaires et d’interprétations
gribouillés au crayon ; la couverture était aussi fraîche contre sa joue
que la lame d’une pelle. Après qu’un orage eut ameubli la terre, il ramassait
tous les lombrics qu’il trouvait, puis les jetait dans des seaux de fumier
avant de les hacher en morceaux ondulants qu’il épandait dans son potager. Il
suivait les transactions et les tendances boursières, mais dilapida une bonne
partie de son capital en spéculations insensées. Il conjecturait sur les
relations internationales, se justifiait dans des lettres indignées, tournait
en ridicule les financiers de la côte Est, semait dans les saloons et les
magasins de tabac des rumeurs grotesques sur les cuisines en Perse, la reine d’Angleterre
ou le sacrement du mariage chez les Saints des Derniers Jours. Il se méprenait
souvent sur le caractère des gens. C’était un indécis et, au fond de lui, un
enfant. Il roulait partout sa bosse sans qu’on le reconnût et déjeunait en
compagnie des boutiquiers et des marchands de Kansas City, se faisant passer
pour un rancher ou un négociant en matière première, un homme riche et oisif, mais
à son aise avec les gens du commun.
    Jesse Woodson James était né le 5 septembre 1847 et avait reçu le même prénom que le frère de
sa mère, qui s’était suicidé. Il mesurait un mètre soixante-douze, pesait
soixante-dix kilos et tirait vanité de son physique. Chaque après-midi, il s’adonnait
à des exercices avec des massues lestées jaunes, le dos nu, les bretelles
pendantes, deux ceinturons à étui croisés autour de la taille. Il tordait des
fers à cheval, s’accroupissait, puis soulevait à vingt reprises un chariot en
se relevant, débitait des bûches jusqu’à ce qu’il les pulvérisât, buvait des
jus de légumes et des potions. Il raclait sa sueur avec un couteau à beurre, plongeait
chaque matin la tête dans un seau qui servait à abreuver les chevaux, déambulait
pieds nus dans l’herbe clairsemée de son jardin, son fils de six ans sur les
épaules, et attrapait les couleuvres avec ses orteils avant de les relâcher en
douceur.
    Il fumait des cigares, mais sans
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