Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Guerre Des Amoureuses

La Guerre Des Amoureuses

Titel: La Guerre Des Amoureuses
Autoren: Jean (d) Aillon
Vom Netzwerk:
C’était son chirurgien que le camérier ramenait, ainsi qu’une
vingtaine de gardes en morion, avec leur hallebarde. Gonzague fit signe à l’homme
de l’art qui s’approcha. En robe de velours noir, jeune, la trentaine, brun, le
visage avenant, le chirurgien s’accroupit devant Zerbinette, qui avait perdu
conscience, et lui prit le pouls. Puis il déboutonna le devant de la robe et
déchira le jupon pour voir la plaie. Quand il se releva, gardant les yeux
baissés devant le marquis, il affichait un air soucieux.
    — Que pouvez-vous faire pour elle ? demanda
Gonzague.
    Le chirurgien hésita. La plaie était mortelle.
    — Il faudrait la transporter avec
précaution dans un lit, monseigneur. Je la panserai, mais sa vie n’est plus
entre mes mains.
    — Qu’on l’installe au deuxième étage, ordonna
le marquis à son intendant, et qu’on la soigne le mieux possible.
    Il s’adressa ensuite au vice-podestat en lui
rendant le couteau.
    — Beltramino, vous conduirez les
comédiens à la Torre comunale, où vous les questionnerez. Ceux que vous
mettrez hors de cause devront aussitôt quitter la ville. Ce serait trop de
désordre de les garder ici. Isabella restera en prison. Elle a tué cette pauvre
femme sous nos yeux. Vous l’interrogerez pour qu’elle nomme ses complices, s’il
y en a. L’instruction terminée, vous la transmettrez au Sénat de Justice. Jamais
un tel crime ne se reproduira à Mantoue. J’en fais le serment solennel !
    Sans un regard pour les comédiens, il
descendit de la scène et se retira.
    Appelés par l’intendant, plusieurs domestiques
venaient d’entrer. Deux d’entre eux portaient une civière de toile. Avec d’infinies
précautions, ils y installèrent la mourante et l’emportèrent. Isabella
sanglotait.
    — Maître Scala, fit le vice-podestat, vous
avez entendu Son Excellence. Les gardes vont vous attacher les mains et vous
conduire à la Torre comunale, notre prison. Si vous vous laissez faire, tout
se passera bien. Sinon, nous utiliserons la force. Je viendrai vous interroger
dans une heure ou deux.
    — Monsieur le vice-podestat, intervint
Scala en pliant un genou, nous ne chercherons pas à nous enfuir, il est inutile
de nous attacher. Nous devons nous changer, enlever nos maquillages, ranger nos
affaires… Il y a aussi le coffre de la compagnie ici, avec notre argent…
    — Vous irez ainsi ! gronda durement
le vice-podestat. Les domestiques du marquis rassembleront vos affaires sous le
regard du chancelier et les porteront à l’écurie du palais où je les ferai
garder. Quant au coffre, donnez-m’en la clef !
    Scala resta immobile.
    — Donnez-m’en la clef, vous dis-je, ou je
vous fais fouiller ! Soyez assuré qu’il n’y manquera pas un florin !
    Vaincu, Scala détacha une clef attachée à son
cou avec une médaille de la Vierge et la lui tendit.
    — Il y a deux clefs, Excellence. Francesco
a la seconde, dit-il.
    — Mon épouse n’est pour rien dans cet
accident ! intervint Francesco Andreini, en se mettant à son tour à genoux,
tout en sortant une clef d’une aumônière qu’il avait à la taille.
    Il avait ôté son masque. Son maigre visage, à
la longue barbe en queue de canard, affichait une expression désespérée. Son
front dégarni et ses cheveux gris, collés dans son cou par la transpiration, lui
donnaient l’air d’un vieillard.
    — Je vous en conjure, l’arme est factice !
supplia-t-il.
    — Factice ? Vous l’avez déjà dit !
    Le vice-podestat donna l’arme qu’il tenait à
la main au lieutenant commandant les gardes.
    — Attachez-les et conduisez-les à la
prison, ordonna-t-il.
    Beltramino Crema
arriva à la Torre comunale quelque trois heures plus tard. Cette haute
tour, au centre de Mantoue, communiquait par un corps de logis et une galerie
au Palais du Podestat devenu le siège de la justice. La tour servait de prison
et sous la voûte, entre le Palais du Podestat et le palais voisin de Massaro, étaient
pendus par les bras plusieurs condamnés qui subissaient le supplice public de
la corde.
    À cette époque, la torture la plus fréquente
dans les villes italiennes était le tourment de la corde – le squassi di
corda – qui consistait à attacher à un cordage les mains du prisonnier
derrière les épaules et à le laisser suspendu à un anneau, après l’avoir
plusieurs fois secoué pour le désarticuler.
    Avant de venir, Beltramino Crema s’était
changé, puis entretenu avec le marquis.
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher