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La Guerre Des Amoureuses

La Guerre Des Amoureuses

Titel: La Guerre Des Amoureuses
Autoren: Jean (d) Aillon
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costume de scène, les mains
attachées, les traits tirés, n’ayant rien bu ni mangé depuis son arrestation. Il
eut un regard de terreur en voyant la corde, la poulie et les deux tourmenteurs.
    Beltramino Crema lui demanda d’abord de prêter
serment sur les Saints Évangiles que le notaire avait apportés, puis il l’interrogea
rapidement sur la troupe, sur les représentations faites au cours des mois
précédents, enfin sur la comédie qu’ils avaient jouée dans l’après-midi.
    — Qui l’a écrite ?
    — Ma femme Isabella, comme tous nos
spectacles, Excellence.
    — J’ai examiné vos armes factices, aucune
ne ressemblait au couteau avec lequel elle a poignardé mademoiselle Gabriella
Chiabrera.
    Il sortit l’arme que le lieutenant des gardes
avait apportée et la montra à Francesco, sans la lui laisser prendre.
    — Dans vos autres armes factices, la lame
se replie entièrement, dans celle-ci, elle bouge à peine. Est-il possible que
votre femme se soit trompée de couteau ?
    — Non, Excellence, c’est celui-ci. C’est
moi-même qui l’ai fait faire, la lame s’enfonce dans le manche au moindre
effort.
    Le vice-podestat appuya la pointe de l’arme
sur la table où celle-ci se ficha. Il insista, et la lame ne bougea pas.
    — Aviez-vous deux armes identiques ?
    — Non, Excellence… Je ne comprends pas.
    Beltramino Crema était mal à l’aise. Il venait
de proposer des explications que tout homme sensé aurait acceptées pour
défendre son épouse, mais le comédien persistait dans son assurance que l’arme
qu’il avait devant lui était factice.
    — Que se passait-il, ensuite, dans la
pièce ? demanda-t-il pour aborder un autre sujet.
    — Dans la pièce ?
    Francesco resta un instant interdit avant de
comprendre la question.
    — Excusez-moi, Excellence… Zerbinette criait :
« Je suis morte ! » plusieurs fois avant de tomber par terre. Le
fils du Dottore se jetait sur elle, il l’embrassait et elle ouvrait les yeux. Les
musiciens dansaient autour d’eux et chantaient le miracle de l’amour. Isabella
s’approchait de moi, menaçante. Je criais, et alors elle enfonçait la lame dans
sa main, me montrant qu’elle était fausse ! Elle m’expliquait ensuite que
tout n’était qu’un coup monté avec Zerbinette pour que le fils du Dottore s’intéresse
à elle !
    Beltramino Crema ne put s’empêcher de sourire.
    — Quels étaient les rapports entre
mademoiselle Gabriella Chiabrera et votre épouse ?
    — Ils étaient bons, c’étaient des amies, je
le jure !
    — Depuis quand mademoiselle Gabriella
Chiabrera appartenait-elle à votre troupe ?
    — Deux ans, Excellence.
    — Avait-elle un…
    — Un amant ? Non, Excellence.
    — Combien de femmes y a-t-il dans la
troupe ? demanda Crema après un silence.
    — Quatre, Excellence. Maria et Flaminia
sont mariées. Maria est l’épouse de Pantalone et Flaminia est celle de Flavio.
    Une vengeance de femmes ? Une jalousie ?
Mais comment expliquer ce mystère sur l’arme ? Pourquoi Francesco
mentait-il en disant que la lame s’enfonçait dans le manche ?
    — Ramenez-le, ordonna Beltramino Crema au
porte-clefs après quelques instants de réflexion, mais ne le mettez pas avec
les autres et faites venir Flaminio Scala.
    Pendant qu’on allait chercher le chef des
Gelosi, le vice-podestat sortit le contrat de création de la troupe et le
montra au notaire.
    Les soussignés compagnons Francesco
Andreini, Isabella Andreini et Flaminio Scala désirant fonder une compagnie
fraternelle ont ensemble décidé d’observer fraternellement, comme c’est l’habitude
entre bons et fidèles compagnons, tous les chapitres suivants…
    Suivaient les règles de la compagnie.
    Le notaire lisait le contrat quand Scala
arriva, garrotté lui aussi, mais se tenant fièrement. Sans frémir, il regarda
la corde et la poulie.
    Le notaire lui tendit les Saints Évangiles sur
lesquels il jura sans hésiter, puis il demanda au vice-podestat :
    — Excellence, je vous en prie… nous ne
pouvons nous enfuir, vous le savez, faites délier mes compagnons. Ils ont des
besoins naturels et même des animaux ne sont pas traités comme nous !
    Beltramino Crema ignora sa supplique et posa
les mêmes questions qu’à Francesco Andreini. Il obtint à peu près les mêmes
réponses. Scala assura aussi que l’arme qu’il avait sous les yeux était bien
celle dont la lame s’enfonçait dans le manche.
    — Parlez-moi de
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