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La Fin de Pardaillan

Titel: La Fin de Pardaillan
Autoren: Michel Zévaco
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les « gentilles dames et les gentils seigneurs » – qui n’étaient souvent que de braves bourgeois ou de simples gens du peuple – achetaient ses fleurs sans marchander, il était non moins manifeste que cette petite bouquetière des rues était comme l’enfant gâtée de la foule, une manière de petit personnage jouissant au plus haut point de cette chose inconstante et fragile qu’on appelle la popularité. Il est certain que ce joli nom : Brin de Muguet – qui semblait être fait exprès pour elle tant il lui allait à ravir – ce nom que d’aucuns abrégeaient en disant simplement Muguette, voltigeait sur toutes les lèvres avec une sorte d’affection émue. Il est certain aussi qu’elle devait faire d’excellentes affaires, car son éventaire se vidait avec rapidité, cependant que s’enflait le petit sac de cuir pendu à sa ceinture, dans lequel elle enfermait sa recette à mesure.
    Derrière Brin de Muguet, à distance respectueuse, sans qu’elle parût le remarquer, un jeune homme suivait toutes ses évolutions avec une patience de chasseur à l’affût, ou d’amoureux. C’était un tout jeune homme – vingt ans à peine – mince, souple comme une lame d’acier vivante, fier, très élégant dans son costume de velours gris un peu fatigué et faisant sonner haut les énormes éperons de ses longues bottes de daim souple, moulant une jambe fine et nerveuse jusqu’à mi-cuisse. Une de ces étincelantes physionomies où se voyait un mélange piquant de mâle hardiesse et de puérile timidité. Il tenait à la main un beau lis éclatant et, de temps en temps, il le portait à ses lèvres avec une sorte de ferveur religieuse, sous prétexte d’en respirer l’odeur. Il est certain qu’il avait acheté cette fleur à la petite bouquetière des rues. A voir les regards chargés de passion qu’il fixait sur elle, de loin, on ne pouvait se tromper : c’était un amoureux. Un amoureux timide qui, en toute certitude, n’avait pas encore osé se déclarer.
    La mystérieuse dame invisible, qui se tenait attentive derrière les mantelets légèrement soulevés de sa litière, ne remarqua pas ce jeune homme. Ses grands yeux noirs d’une angoissante douceur – tout ce que nous voyons d’elle pour l’instant – se tenaient obstinément fixés sur la gracieuse jeune fille et l’étudiaient avec une sûreté qui, avec des yeux comme ceux-là, devait être remarquable. Après un assez long examen, elle laissa tomber à travers le mantelet, d’une voix de douceur étrangement pénétrante :
    – Cette jeune fille a l’air d’être très connue et très aimée du populaire.
    – Si elle est connue ! s’exclama la vieille, je crois bien, seigneur ! Quand je suis revenue à Paris, il y a une quinzaine, je n’entendais parler partout que de Muguette ou de Brin de Muguet. J’étais loin de me douter que c’était elle. Quand je l’ai rencontrée par hasard, quelques jours plus tard, j’ai été tellement saisie que je n’ai pas su l’aborder. Et, quand j’ai voulu le faire, elle avait disparu.
    – Et tu es sûre que c’est bien la même qui te fut remise, enfant nouveau-né, par Landry Coquenard ?
    – Lequel Landry Coquenard était alors l’homme de confiance, l’âme damnée de signor Concino Concini, lequel n’était pas alors… suffit… Oui, madame, c’est bien elle !… c’est la fille de Concini !…
    Ceci était prononcé avec la force d’une conviction que rien ne pouvait ébranler. Il y eut un silence bref, au bout duquel la dame invisible posa cette autre question :
    – La fille de Concini et de qui ?… Le sais-tu ?
    Cette question était posée avec une indifférence apparente. Mais l’insistance avec laquelle les yeux noirs fouillaient les yeux papillotants de la vieille penchée sur le mantelet indiquait que cette indifférence était affectée.
    – De qui, répondit la vieille en hochant la tête d’un air dépité, voilà la grande question !… Vous pensez bien, madame, que j’ai cherché à découvrir le nom de la mère. Le diable t’embrouille ! C’est qu’il en avait des maîtresses, dans ce temps-là, le seigneur Concini !… Tout de même j’aurais peut-être fini par trouver. Mais je ne suis pas italienne, moi.
    « Pour une misère, une niaiserie, je venais de perdre la place que j’occupais dans une noble famille de Florence.
    – Tu avais volé ta maîtresse, interrompit la dame invisible, sans d’ailleurs marquer la
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