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La Fin de Pardaillan

Titel: La Fin de Pardaillan
Autoren: Michel Zévaco
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je sais, moi, que cette petite Loïse est l’unique enfant du sire de Pardaillan qu’on dit très riche dans son pays de Saugis, et qui, j’en suis sûre, n’hésiterait pas à sacrifier toute sa fortune pour retrouver son enfant bien-aimée. C’est à voir, cela, c’est à voir !… »
    q

Chapitre 2 AUTOUR DU PILORI SAINT-HONORE
    C ependant Brin de Muguet continuait son frais et délicat métier. Son éventaire était à peu près vide, il ne lui restait plus que quelques bottes de fleurs. Par contre, son petit sac de cuir s’enflait d’une manière imposante. Elle s’activait de son mieux afin de placer ses dernières fleurs après quoi sa journée serait achevée. Tout au moins en ce qui concernait la vente.
    Ce fut à ce moment que, soudain, la vieille se dressa devant elle, les deux poings sur les hanches. Brin de Muguet pâlit affreusement. Elle recula précipitamment, comme si elle avait mis tout à coup le pied sur quelque bête venimeuse. Et elle cria :
    – La Gorelle !…
    Et il y avait un tel accent de frayeur dans sa voix étranglée, que l’amoureux, qui la suivait toujours, s’approcha vivement, fixant sur la vieille femme un regard menaçant qui lui eût donné fort à réfléchir si elle y avait pris garde. Mais elle ne fit pas attention à ce jeune homme. Elle ricana :
    – Mais oui, ma petite, c’est moi, Thomasse La Gorelle. Tu ne t’attendais pas à me rencontrer, hein ?
    – La Gorelle ! répéta Brin de Muguet, comme si elle ne pouvait en croire ses yeux.
    La pauvre petite se tenait devant Thomasse La Gorelle – puisqu’il paraît que c’était son nom – tremblante et apeurée comme le frêle oiselet qui voit fondre sur lui l’oiseau de proie prêt à le déchirer des serres et du bec.
    – C’est bien moi, répéta la mégère avec son sourire visqueux. Moi qui t’ai élevée, nourrie, soignée quand tu étais malade, et que tu as carrément plantée là quand tu t’es sentie à même de gagner ta pâtée. Ah ! on ne peut pas dire que la reconnaissance t’étouffe, toi ! Moi qui, durant près de quatorze ans, me suis dévouée et sacrifiée pour toi, comme eût pu le faire une vraie mère !…
    Il est probable qu’elle eût continué longtemps sur ce ton doucereux d’hypocrites doléances. Mais déjà la jeune fille s’était ressaisie. Dans la rue, elle était chez elle. C’était son domaine, à elle, la rue. Elle savait bien qu’elle y trouverait toujours des défenseurs, hommes ou femmes. Pourquoi trembler alors ? N’avait-elle pas le bon droit pour elle ? Et elle se redressait, et d’une voix ferme elle interrompait :
    – Que me voulez-vous ?… Prétendez-vous m’obliger à vous suivre dans votre taudis pour m’y astreindre à un labeur au-dessus de mes forces, m’y rouer de coups, m’y faire mourir lentement de misère et de mauvais traitements, comme vous l’avez fait autrefois ?… Dieu merci, je me suis tirée de vos griffes, où je serais morte depuis longtemps s’il n’avait tenu qu’à vous. Vous ne m’êtes rien, je ne vous dois rien, vous n’avez aucun droit sur moi ; passez votre chemin et laissez-moi tranquille.
    Elle ne tremblait plus. Elle paraissait décidée à se défendre avec toute la vigueur dont elle était capable. Une lueur funeste s’alluma dans les yeux torves de La Gorelle qui oublia les recommandations impérieuses de la dame inconnue. Par bonheur, la jeune fille, sans y songer, avait élevé la voix. Ses paroles avaient été entendues. Des curieux s’étaient arrêtés, tendaient l’oreille, considéraient la mégère avec des mines renfrognées qui n’annonçaient pas précisément la sympathie. L’amoureux, au premier rang, avait passé son lis dans son pourpoint, dardait sur la vieille deux yeux étincelants, tortillait sa fine moustache naissante de l’air nerveux d’un homme à qui la main démange furieusement. Nul doute qu’il ne fût déjà intervenu si, au lieu d’une femme, il avait eu un homme devant lui.
    La Gorelle coula un regard inquisiteur sur les curieux. Elle était intelligente, la vieille sorcière ; elle se rendit fort bien compte des dispositions peu bienveillantes de ceux qui l’entouraient. Elle comprit qu’elle allait se faire huer, écharper peut-être, si elle se livrait à quelque violence intempestive. Elle frémit de crainte pour sa précieuse carcasse. Les recommandations de la dame invisible lui revinrent alors à la mémoire. Instantanément, son
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