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La dernière nuit de Claude François

La dernière nuit de Claude François

Titel: La dernière nuit de Claude François
Autoren: Bertrand Tessier
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au porno chic, mais aux pantalons pattes d’eph et aux cols pelle à tarte, il renonce de lui-même avant que les ciseaux de la censure ne taillent ses ambitions.
    Mais, chez lui, le business relève davantage du fantasme que de la stratégie. Confondant allègrement chiffre d’affaires et bénéfices, bouillonnant d’idées, il n’a pas la moindre notion de gestion. Chaque flacon d’ Eau noire lui coûte plus cher qu’il ne lui rapporte. Quand Podium réalise une bonne vente, il exige que le numéro suivant augmente sa pagination et offre une flopée de cadeaux : des posters, des décalcomanies, des gadgets. Chaque fois qu’un de ses collaborateurs le rappelle à la raison, il repousse ses arguments avec une logique imparable :
    — C’est mon argent !

    Pis, les agissements d’un comptable indélicat lui vaudront d’être accusé de fraude fiscale. Condamné à huit mois de prison avec sursis, il devra subir un redressement important.
    Il finit par engager un directeur financier qui plonge dans les livres de comptes et suggère ce qu’on n’appelle pas encore le cost killing : réductions des frais généraux et économies d’échelle. Mais, quand le petit homme recommande au patron de ne pas changer sa Mercedes, c’en est trop : trois jours plus tard, Claude l’appelle et lui demande de se mettre à la fenêtre de son bureau. Quelques minutes après, il passe insolemment devant lui au volant d’une 450 SEL flambant neuve. Exit le directeur financier. Qu’on se le dise : même quand il a tort, Claude François a raison.
    Cependant, les banquiers manifestent de plus en plus leur inquiétude. Devant leur insistance, Claude demande à Alain Dominique Perrin, PDG de Cartier, manager anticonformiste qui a l’habitude de partager le même avion privé que lui, de réaliser un audit. Ils ont le même goût de la réussite, le même caractère de battant, la même passion pour la musique et les bordeaux millésimés. Un soir, le businessman qui se rêve artiste convoque l’artiste qui se rêve businessman dans son bureau de la place Vendôme. C’est l’heure des comptes.
    — Claude, tu dois 10 millions de francs, lâche Alain Dominique Perrin.
    — Rien qu’un milliard ? parvient-il à lâcher, bravache.
    Mais il a compris : dans cette France qui apprend à vivre au rythme de la crise, depuis le choc pétrolier de 1973, il ne peut plus continuer de la même manière. Les comptes sont dans le rouge, les salaires ne sont pas versés en temps et en heure. Le dernier concert de sa tournée, le 24 février 1978, à Lyon, berceau de sa famille paternelle, s’est déroulé dans une atmosphère pesante. N’ayant pas été payés depuis plusieurs semaines, les musiciens ont refusé de jouer plus d’une heure. Pour une fois, le spectacle ne s’est pas achevé par un feu d’artifice : officiellement parce que les fusées étaient humides, en réalité, l’artificier n’avait pas été réglé.
    Alain Dominique Perrin le pousse à se concentrer sur l’artistique et à tout vendre, sauf Podium , qui est et restera son principal instrument de promotion. Il lui trouve même un acquéreur : Jacques Revaux, patron des disques Tréma, mais aussi compositeur de son plus grand succès, « Comme d’habitude ».

    Ce mercredi, dans l’avion qui l’emmène à Genève, il se dit que, dans une semaine à peine, il en aura fini avec ces soucis qui le minent depuis des mois. On ne lui parlera plus de traites, d’économies, de retours sur investissement. On ne lui reprochera pas de s’intéresser autant au business qu’au show, dans un monde qui ne célèbre pas encore la réussite individuelle. Mercredi, il signera l’accord définitif.
    Bien sûr, il devra désormais partager la vedette avec l’autre artiste maison, Michel Sardou, mais il n’est pas inquiet : à l’interprète de « La Maladie d’amour », la France ; à lui, le reste du monde. Et puis, avec Sardou, ses relations ont toujours été excellentes. Ils se chamaillent, ils se charrient, mais ils s’aiment bien. Souvent, lors des tournées d’été dans le sud de la France, ils se retrouvent chez Gu, un restaurant de nuit d’Aix-en-Provence, pour déguster une alouette sans tête, spécialité de la maison. Au moulin, Sardou est toujours le bienvenu, avec sa femme, Babette. Pas comme Johnny Hallyday, son rival, sa bête noire, son ennemi.
     
    Entre les deux stars, tout a commencé par une blessure intime, une de ces
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