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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare
Autoren: Pierre Naudin
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comparaison entre les deux personnages était désormais impossible. L’armée royale acclamait Guesclin vainqueur et se demandait avec une surprise mêlée de défiance 178 , ce que l’Archiprêtre, «  qui étoit là un grand capitaine étoit devenu  ». Bientôt, la France entière partagea les mêmes impressions. De nos jours encore, la question embarrasse et divise les historiens, les uns justifiant, les autres flétrissant la conduite d’Arnaud de Cervole.
    Avant que de citer l’opinion de Siméon Luce, examinons les récits de la bataille. Selon Cuvelier, premier hagiographe de Guesclin, Cervole se sépara du reste de l’armée avant la bataille, avec l’assentiment de qui ? De ses compagnons d’armes, afin d’aller, un peu comme à Poitiers, beaucoup comme à Brignais, reconnaître l’ennemi, étudier sa position et découvrir ses desseins. Il semble qu’il n’en eût pas reçu l’ordre. C’était dans son habitude d’aller de l’avant pour savoir comment, le moment venu, il pourrait faire défection.
    Le long poème de Cuvelier indique clairement qu’avant qu’il eût vu l’Archiprêtre, Bertrand engagea l’action malgré des troupes amenées par Cervole. Aimé Cherest ajoute même à ce sujet, sans songer qu’il se contredit, que Bertrand, prévoyant que ces troupes n’arriveraient pas assez tôt pour prendre part à la lutte, «  il indiqua les moyens de se passer d’elles et se contenta de dire :
    Et j’ai Dieu en couvent que s’ainsi le faisons,
    Que je croy fermement, nous les déconfirons ;
    A l’Archiprêtre aussi ce fait-ci manderons. »
    Certains ont vu là des paroles qui excluaient l’idée d’un blâme. Où ont-ils pu trouver matière à leur satisfaction ? D’autant plus qu’alors que la bataille allait être gagnée, un écuyer, Clément, annonça la venue d’un nouveau corps anglo-navarrais, ce qui fit enrager Bertrand de ne voir, pour tout secours en provenance de l’Archiprêtre, que ce Clément chargé d’excuser son maître.
    Mieux vaut se référer à Froissart :
    « Je vous dirai la vérité. Si très tôt que l’Archiprêtre vit l’assemblement de la bataille, et que l’on se combattroit, il se bouta hors des routes ; mais il dit à ses gens et à celui qui portoit sa bannière : "Je vous ordonne et commande, sur quant que vous vous pouvez mesfaire envers moi, que vous demeure : et at tende : la fin de journée : je me pars sans retourner ; car je ne puis huy combattre ni être armé contre aucun des chevaliers qui sont par de là et si l’on vous demande de moi, si en répondez ainsi à ceux qui en parleront. " Adonc se partit-il et un sien écuyer tant seulement, et repassa la rivière, et laissa les autres convenir. Oncques François ni Bretons ne s’en donnèrent garde, pourtant que ils veoient ses gens et sa bannière jusques en la fin de la besogne, et le cuidoient de lez eux avoir. »
    Il s’agit donc bien d’une fuite avec, en prologue, des justifications filandreuses. D’ailleurs, ce grand malandrin en était si penaud qu’il alla, sans gêne, demander la protection de Philippe le Hardi, devenu duc de Bourgogne, lequel se hâta de justifier la conduite de «  son compère monseigneur l’Archiprêtre, et qu’il le rapaisa au roi, parmi bonnes excusations que le dit Archiprêtre montra au dit roi de ce que à la journée de Cocherel il ne se put armer contre le captal, qui étaoit adonc amené à Paris de lez le roi et qui avoit juré à la tenir prison… lequel captal aida moult à excuser l’Archiprêtre devers le roi et tes chevaliers de France qui parlaient vilainement sur sa partie ».
    Il n’est pas nécessaire d’énumérer les acrobaties auxquelles le défenseur de l’Archiprêtre s’est livré pour excuser son héros. Mieux vaut conclure en citant Siméon Luce :
    Bertrand vient d’avoir tous les bonheurs dans cette fournée. L’Archiprêtre a voulu jouer, selon son habitude, un double jeu. En sa qualité de Périgourdin, Arnaud de Cervole compte des amis et des parents parmi les Gascons de Jean de Grailly. Il prétexte ces relations d’amitié et de parenté pour quitter, dès le début de l’action, le champ de bataille, et regagner Pont-de-l’Arche, mais il ordonne à ses gens de rester pour prêter main-jorte aux Français. En réalité, il n’a d’autre but que de se prévaloir de ce départ si le captal est vainqueur, et l’assistance prêtée par les hommes d’armes à sa solde si, au
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