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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse
Autoren: Louis Noir
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M. Balandrin, proteste, ergote et je dirai même nous insulte.
    – C’est vrai   ! C’est vrai   !
    – À mon avis, le citoyen Balandrin, boucher comme le trop fameux Legendre, représentant de Versailles à la Convention, veut imiter son confrère qui l’a fanatisé lorsqu’il est venu ici en mission. M. Balandrin veut imiter ce célèbre Jacobin et jouer les Legendre à Lyon. Je n’ai pas à lui rappeler la fable de la grenouille voulant se faire aussi grosse que le bœuf et qui en éclata   : mais je lui déclare que nous ne pouvons supporter ces façons-là.
    – Non   ! Non   !
    – Je crois rester dans les bornes de la modération et de la politesse en disant au citoyen Balandrin que, du moment où l’on ne se plait pas dans une société, mieux vaut la quitter que l’offenser.
    – Oui   ! Bravo   ! Démission   !
    – D’autant plus, continua le sergent, que les circonstances sont graves et que, dans la situation où nous sommes, il faut pouvoir compter les uns sur les autres.
    – Certainement   !
    Le boucher, avec sa force musculaire énorme et sa franchise brutale, avait humilié beaucoup d’amour-propre et s’était fait beaucoup d’ennemis. Beaucoup qu’il avait rudoyés individuellement et qui n’avaient jamais osé protester profitaient des mauvaises dispositions générales pour se venger de leurs rancunes.
    Ils criaient   :
    – Démission   ! Démission   !
    Quelques-uns mêmes insinuaient avec une voix de fausset   :
    – À la porte   ! c’est un mouchard du comité central.
    Balandrin, loin d’être inférieur à Legendre, comme le donnait à entendre M. Suberville, se montra toujours, quoique d’un tempérament grossier, bien au-dessus du boucher versaillais. Il fut plus grand, plus généreux, plus brave encore et surtout plus éloquent que lui. Mais les réactionnaires de Lyon ont calomnié ce beau et terrible caractère lyonnais.
    Pour les outrages qui pleuvaient sur lui, Balandrin, furieux, s’élança au milieu du cercle et dit, les dents serrées   :
    – Mouchard   ! Moi   ! Jamais   ! J’ai toujours dit ma façon de penser tout haut et à tout le monde. Je suis franc. J’agis au soleil. Je vous ai tous regardés en face. Qui est-ce qui m’accuse de moucharder   ?
    Personne ne répondit.
    – Bon   ! fit le boucher. Vous vous taisez. Ceux qui m’ont accusé sont des lâches. Ce sont eux qui sont des mouchards, mouchards royalistes   !
    – Nommez-les, les mouchards   ! criaient des voix loyales.
    – Si je les nommais, dans huit jours, demain peut-être, leurs têtes tomberaient sous le couteau de la guillotine, qui a été demandée par Châlier, qui est arrivée et qui sera dressée sous peu. Je me tais, parce que j’étais des vôtres. Mais vous me chassez, je pars et je me fais Jacobin.
    – Ah   ! ah   ! fit-on.
    – Oui   ! je me fais Jacobin, parce que vous autres modérés, vous autres Girondins, vous trahissez la France en vous alliant avec les royalistes. Si le pays n’était pas envahi, si les royalistes n’avaient pas soulevé la Vendée et appelé les Anglais, si l’on se battait chez soi pour ses idées, sans exposer la patrie à un démembrement, je resterais avec vous, parce que je suis propriétaire comme vous, bourgeois comme vous, patron comme vous. Mais périssent les patrons, les propriétaires, les bourgeois, plutôt que la patrie   !
    Le boucher tendit son fusil à l’un des gardes, son voisin.
    – Tiens   ! dit-il. Voilà l’arme que la municipalité m’a confiée   : je la lui rends. Je demanderai un autre fusil au comité.
    – Vous voyez, dit le sergent d’un air railleur, le citoyen Balandrin compte bientôt échanger des balles contre nous.
    – Oui   ! Et malheur sur vous, monsieur, comme sur tous ceux qui auront contribué à jeter la ville de Lyon dans la révolte. Vous tous paierez de votre sang votre perfidie et votre imbécillité   ; car il n’y a ici que des traîtres qui savent où ils vont et des niais qui ne savent point où on les pousse. Et tous, tous vous périrez sous les balles, sous la mitraille, ou sous la hache. Je m’en vais déplorant l’aveuglement des honnêtes gens, mes amis, et maudissant les mauvais citoyens qui sacrifient la France au rétablissement du roi. Mais l’échafaud vengera les fautes des uns et les crimes des autres.
    Le boucher fit un pas. Le cercle s’ouvrit. Sa sauvage éloquence avait produit une impression profonde. Le sergent le
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