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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse
Autoren: Louis Noir
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les enchanta.
    – Je suis certaine de votre prud’homie.
    Depuis quelque temps elle regardait avec attention le sergent M. Suberville. Lui de son côté l’observait.
    Elle fit un signe rapide, puis elle parut s’impatienter et dit   :
    – Quelle longue nuit   ! Le soleil ne se lèvera-t-il donc jamais   ?
    – Il se lèvera, soyez-en sûre, dit en souriant M. Suberville.
    Et il fit à son tour un signe symbolique.
    De ce moment, elle parut sûre de M. Suberville   : du reste, elle avait gagné à ses intérêts toute la patrouille. Cette petite femme avait le charme, car elle avait su trouver les paroles les plus sûres pour aller au cœur de ces bourgeois. Un caporal, fasciné par les beaux yeux de la jeune femme, s’avança.
    – Madame, dit-il, avec la permission du lieutenant, je reste et je vous réponds de votre protégé.
    – Mon sauveur, voulez-vous dire   ! Eh bien, monsieur, j’accepte et j’aurai bientôt le plaisir de vous remercier. Vous vous nommez   ?
    – Jean-Joseph Morongis pour vous servir, dit le caporal. Je tiens la grande confiserie de la place Bellecour.
    – Je me ferai un devoir, M. Morongis, de vous donner ma clientèle.
    Le caporal rougit de joie   ; vendre sa marchandise à cette jolie femme, la voir et lui parler lui semblait un plaisir digne d’être savouré par un confiseur.
    En ce moment, le chirurgien arriva. Il examina les blessures.
    – Bon, dit-il. Presque rien   ! La balle de la poitrine en s’aplatissant sur le sternum, a produit une suffocation.
    – Et les autres blessures, docteur   ?
    – De simples coups de poings. Je réponds de tout, madame.
    La jeune femme, définitivement rassurée par cette affirmation, fit un signe au lieutenant. Celui-ci, avec un empressement des plus galants, vint offrir son bras à la jeune femme qui, saluant gracieusement M. M. de la garde nationale, les remercia d’un mot, les gratifia d’un sourire et sortit, laissant derrière elle une impression qui se traduisit par exclamations.
    – Si c’est une fille de canut celle-là, disait l’un, j’avale mon sabre et je le digère.
    – C’est une duchesse ou une danseuse de l’Opéra, dit un autre. Elle vous a un cachet…
    – Mais pourquoi si tard dans la rue   ?
    – Oh   ! les femmes   ! ça risque tout. Et puis, Saint-Giles était avec elle.
    – Mais non. Il paraîtrait qu’il l’a entendue crier et qu’il est venu à son secours.
    – Avec tout ça, dit la grosse voix d’un boucher, personne ici n’a fait son devoir.
    – Bon   ! voilà le citoyen Balandrin qui va encore protester, dit le sergent Suberville au garde mécontent, appuyant sur le mot citoyen.
    – Citoyen… citoyen… oui, je suis citoyen, répliqua Balandrin, je m’en flatte même… N’empêche que personne n’a demandé ni ses papiers ni son nom à cette grande dame déguisée qui court les rues la nuit.
    – Ah   ! ah   ! dit le sergent en riant avec éclat, vous auriez bien voulu savoir son nom et son adresse n’est-ce pas, citoyen Balandrin   ? Ah   ! ah   ! mon gaillard, vous ne seriez pas fâché d’aller faire une visite domiciliaire chez cette dame, duchesse ou drôlesse   ? Eh   ! eh   ! eh   ! ils vont bien les citoyens bouchers   !…
    – Bon   ! Bon   ! Plaisantez, sergent. Mais, on ne m’ôtera pas de l’idée, dit Balandrin, que cette femme ne soit une royaliste qui conspire, peut-être même une émigrée. Si je me présentais chez elle, ce serait au nom de la loi. Je ne suis pas un farceur comme vous, moi, sergent   !
    – Et si c’était une émigrée, que feriez-vous citoyen Balandrin, vous qui ne plaisantez pas   ?
    – Je l’arrêterais.
    – Et le tribunal révolutionnaire que le comité central a la prétention d’établir ici, enverrait sûrement à la guillotine qui va nous arriver de Paris, dit-on, cette pauvre petite femme si charmante.
    – Eh bien… après   ! Pourquoi pas, si elle a émigré, si elle conspire.
    – Vous êtes donc pour que l’on guillotine les femmes, vous, citoyen Balandrin   ?
    – Tenez, s’écria le boucher, colosse redouté, mais peu aimé dans la compagnie, tenez, cria-t-il, serrant les poings, vous m’embêtez, sergent, avec votre manière de m’envoyer du citoyen quand vous donnez du monsieur aux autres. Un boucher vaut bien un marchand de soie. Nous sommes tous égaux du reste.
    – M. Balandrin, si je vous appelle citoyen, c’est pour vous faire plaisir, vous sachant
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