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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure
Autoren: Virgil Gheorghiu
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Elle se taisait. Moritz lui caressait doucement les tempes, les joues, les cheveux. Puis il se mit debout. La douleur déchirait son corps avec des tenailles ; dans ses épaules, dans ses bras, dans ses muscles, des pointes dures s’enfonçaient.
    " J’ai dû courir un bon bout de temps ", se dit-il. Il leva la tête, le ciel était déjà tout bleu. Il vit qu’il se trouvait à quelques enjambées à peine de la forêt de chênes. D’abord il ne voulut pas en croire ses yeux. Ce devait être un rêve. Lentement il réalisa et se mit à trembler comme un roseau. Non, il ne rêvait pas, Suzanna et lui se trouvaient dans le champ de Nicolae Porfïrie. C’est là que les avait emmenés leur course aveugle. Les feuilles de maïs qu’il venait d’arracher pour en faire une couche à Suzanna, ces feuilles sur lesquelles elle reposait à présent, c’étaient des feuilles de maïs de cette terre pour laquelle la veille il avait donné des arrhes.
    Le long des joues de Iohann Moritz des larmes se mêlèrent à la sueur. Et il pleura doucement sur cette terre qui, il le savait maintenant, ne serait jamais plus la sienne. Il ne partirait plus pour l’Amérique.
     
     
     
9
     
     
     
    De là où il se trouvait, Iohann Moritz pouvait voir tout le village. Il regarda les maisons blanches, il les regarda une à une d’un bout à l’autre du village. Puis il regarda la femme étendue à ses pieds sur les feuilles de maïs. Interrogeant du regard chaque maison, il se demandait où il allait bien pouvoir l’abriter ; il devait lui trouver un refuge. Quant à lui, il avait renoncé à son départ. Il avait renoncé à la terre, parce que la femme qu’il aimait avait besoin de lui. Il ne pouvait l’abandonner. Mais ce n’était pas suffisant. Il fallait encore lui trouver un abri. Il ne pouvait frapper qu’à deux portes : chez ses parents ou chez le prêtre Koruga ; toutes les autres lui seraient fermées. Les paysans craignaient Iorgu Iordan, tous le craignaient. Ses parents à lui n’avaient qu’une seule pièce et pas de place pour Suzanna. Et il ne pouvait pas amener chez le prêtre Koruga une femme avec laquelle il n’était pas marié.
    Il ne voulait pas causer d’ennuis au prêtre. Si le prêtre Koruga donnait l’hospitalité à Suzanna, Iorgu Iordan viendrait sans doute, le fusil à la main, lui demander des comptes ; Moritz le savait bien et cela ne devait pas arriver. Mais Suzanna ne pouvait pas rester ainsi, en plus i l ne voulait pas causer d’ennuis au prêtre. Si le prêtre Koruga donnait l’hospitalité à Suzanna, Iorgu Iordan viendrait sans doute, le fusil à la main, lui demander des comptes ; Moritz le savait bien et cela ne devait pas arriver. Mais Suzanna ne pouvait pas rester ainsi, en plein champ. Après un moment de réflexion, Iohann loritz reprit Suzanna dans ses bras et se mit à marcher en direction du village. La femme était pâle. " Elle doit être malade de peur ", se dit-il. Il écouta battre son cœur. Le rythme était lent. Moritz pressa le pas ; il voulait arriver au plus vite au village.
     
     
     
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    Le soleil était déjà levé lorsque Moritz arriva devant sa maison. Il déposa Suzanna sur le seuil, contre le mur. Il regarda le Levant. À ce moment, à l’autre bout du village Ghitza Ion devait l’attendre. Il serra les dents pour se donner du courage, tourna le dos au soleil et pénétra dans la maison. Il voulait demander à ses parents de recevoir Suzanna. Ses parents dormaient. Aristitza, la mère de Iohann Moritz était une femme irascible. Moritz aurait voulu l’éviter, parler directement à son père. Mais dès qu’il passa le seuil, Aristitza sortit la tête du creux de l’oreiller.
    – Tu viens prendre ton sac ? demanda-t-elle. Il est contre la porte.
    Moritz ne répondit rien.
    – Qu’est-ce que tu as à rester planté là comme une cruche ? demanda-t-elle. Embrasse ta mère, dis adieu à ton père et dépêche-toi. Ne dépense pas tout l’argent là-bas, tâche d’en rapporter.
    – Je ne pars plus en Amérique, répondit Iohann.
    – Tu ne pars plus !
    La vieille se leva d’un bond.
    – Non.
    – Ghitza non plus ?
    – Si, Ghitza part, répondit Moritz.
    Aristitza sentit qu’il y avait quelque chose de pas clair. Elle enfila sa robe.
    – Pourquoi ? Tu t’es disputé avec Ghitza ?
    – Non.
    – Mais qu’est-ce que tu as ?
    Aristitza s’était mise au milieu de la pièce. Elle avançait furieuse vers
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