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La 25ème Heure

La 25ème Heure

Titel: La 25ème Heure
Autoren: Virgil Gheorghiu
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son fils.
    – Il n’est rien arrivé du tout, dit-il. Je veux me marier. C’est pourquoi je ne pars plus.
    Sa voix tremblait. Il ne savait par où commencer, comment leur expliquer. Aristitza enfonça ses ongles dans les épaules de Moritz et commença à le secouer.
    – Je veux parler à père, dit Moritz. Je ne discute pas avec vous.
    – Si, c’est avec moi que tu vas discuter ! cria-t-elle. Ça n’est pas du ventre de ton père, c’est du mien que tu es sorti.
    – Calme-toi, femme, dit le père en sortant la tête de dessous la couverture. Il voulait l’apaiser. Aristitza ne l’écoutait même pas. Elle se tapait les flancs avec les mains.
    – C’est mes tripes que tu as arrachées, dit-elle. C’est mon lait que tu as bu, scélérat. Et maintenant tu ne veux pas me parler !
    – Je vous parlerai aussi, dit Moritz.
    Sa mère sanglotait. Il aurait voulu l’apaiser.
    – Je vous parlerai, je vous le jure, mais calmez-vous !
    La vieille s’assit au bord du lit, tenant sa tête entre ses mains. Elle se sentait blessée. Mais la douleur ne pouvait pas la faire taire. Elle ne pouvait jamais se taire.
    –  Avec qui veux-tu te marier ? cria-t-elle.
    – Je vous le dirai tout de suite, dit Moritz, mais d’abord calmez-vous.
    – Je veux savoir qui tu épouses. Je suis ta mère et j’ai le droit de savoir qui tu épouses.
    – Dis-le-lui, Ion, dit le vieux. Dis-le-lui pour qu’elle se taise.
    Il voyait bien qu’Aristitza allait de nouveau se mettre à crier. Iohann Moritz savait que le nom de Suzanna ne calmerait pas sa mère, au contraire.
    – J’épouse la fille de Iorgu Iordan, dit-il, Suzanna.
    Aristitza bondit vers lui. Pas pour le mettre en morceaux, pour l’embrasser.
    – Je comprends pourquoi tu ne pars plus, dit-elle.
    Elle l’embrassa longuement sur les yeux, sur le front, sur les joues.
    – Tu n’étais pas si bête pour partir en Amérique, travailler comme une brute et rentrer après quelques années, sans force, malade et avec quelques milliers de lei en poche. Tu as suivi mon conseil, tu épouses une fille riche.
    Son regard brillait de joie.
    – Je serai riche, dit-elle. J’aurai des robes en velours et une voiture. Je m’établirai dans la maison de Iorgu Iordan. C’est mon droit. Mon droit à moi, à Aristitza.
    C’est moi qui t’ai fait intelligent et beau pour que tu séduises et épouses la plus riche fille du village, une fille qui a une maison en pierre, une cave, beaucoup de terre, une voiture et des chevaux.
    – Calme-toi, femme ! dit le vieillard.
    Mais sa voix était frémissante, lui aussi était ému. L’idée de tant de richesses l’avait bouleversé. Il roulait une cigarette sans se lever.
    – Je m’installerai chez Iorgu Iordan, ton beau-père, dit Aristitza. Toi, tu resteras ici, dit-elle au vieux. Moi, je dois être auprès de mon garçon ; qui pourrait mieux que moi donner des conseils à sa femme ?
    – Mère, ce n’est pas tout, dit Moritz.
    – Dis tout ce que tu voudras, mon chéri. Ta mère t’écoute.
    – Promets-moi de m’écouter tranquillement, dit Moritz.
    – Je te promets tout ce que tu voudras.
    Aristitza lui caressa la joue.
    – Mère, continua Moritz, j’épouse Suzanna sans la permission de Iorgu Iordan.
    – Le tout c’est de te marier avec elle, dit Aristitza. Je serai la belle-mère de la fille de Iorgu Iordan, le richard. Peu m’importe s’il le veut ou pas.
    – Tu seras sa belle-mère, mais tu ne seras pas riche !
    – Et qui aura l’argent ? demanda Aristitza. Iorgu Iordan n’a qu’une fille. Il ne va quand même pas la marier sans dot. Chacun sait qu’il a enterré dans sa cave des pots pleins de pièces d’or. Ne t’en fais pas pour la dot. Je m’en occupe, tu n’y connais rien.
    – Mère, c’est Suzanna que j’épouse, ça n’est pas son argent ! dit Iohann.
    – Tu ne veux pas me faire croire que tu préfères la fille à l’argent ?
    – Si, mère.
    – Idiot ! Mais je te comprends tout de même. Laisse-moi faire. Moi on ne me roule pas comme ça.
    Aristitza se voyait déjà en train de discuter avec Iorgu Iordan, bien résolue à ne pas lâcher un seul écu.
    Iohann Moritz racontait l’histoire de la veille. Aristitza tressaillit et demanda :
    – Comment ? Elle ne veut plus jamais retourner chez son père ?
    – Non, répondit Iohann Moritz, son père la tuera si elle revient.
    – Il la tuera, dit le vieux, lui ne rigole pas. La fille a raison, le père
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