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Fiora et le Magnifique

Fiora et le Magnifique

Titel: Fiora et le Magnifique
Autoren: Juliette Benzoni
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regard, Francesco interrogea le
prêtre. Celui-ci hocha la tête d’un air désolé :
    – Il
n’a que trop raison, hélas ! Ces pauvres enfants n’ont pas droit à une
sépulture décente. La sentence a été à ce point cruelle. J’ai même eu beaucoup
de peine à obtenir le droit de les accompagner. Mais l’eût-on interdit, je
serais venu quand même. Vous comprenez... je les ai vus naître l’un et l’autre.
    – Alors
je vais avec vous. Laissez-moi vous aider.
    – Pourquoi
le feriez-vous ? Vous les connaissiez ?
    – Je
les ai vus aujourd’hui pour la première fois mais je sais qu’il faut que je le
fasse. Il y a quelque chose en moi qui m’y pousse.
    – J’ai
peur que vous ne le regrettiez quand vous saurez pourquoi on les a condamnés et
quel a été leur crime.
    Francesco
haussa les épaules.
    – Ils
étaient frère et sœur... et ils s’aimaient... trop ! Quelqu’un m’a
renseigné. Mais nous perdons du temps.
    A eux
deux, ils enveloppèrent les corps suppliciés dans leurs linceuls et les
portèrent dans le tombereau. Soudain, Francesco aperçut, abandonné sur le drap
noir, le petit hennin de dentelle ; il le ramassa. A tenir entre ses mains
ce colifichet charmant qui parait si bien naguère l’exquise beauté de la jeune
morte, il sentit les larmes lui monter aux yeux. Vivement, il le mit sur son cœur,
à l’abri de son manteau, puis rejoignit ses gens qui attendaient toujours à l’entrée
de la place.
    – Va
m’attendre à l’hôtellerie de la Croix d’Or, dit-il à Marino. Je vous rejoindrai
tout à l’heure. Pas un mot sur le sujet de mon retard !
    – Est-ce
que vous ne me connaissez pas ? Personne ne soufflera mot. Etes-vous
certain de ne pas avoir besoin d’aide ?
    – Non.
J’ai une arme et de l’or. C’est plus qu’il n’en faut pour me défendre en cas de
besoin.
    Tenant
son cheval en bride, Francesco suivit à pied le tombereau dans lequel le
prêtre, assis entre les deux corps, avait repris ses prières. On franchit la
porte d’Ouche et les fossés puis on obliqua vers un bâtiment lézardé qui s’élevait
non loin de la route de Beaune, entre les anciennes tanneries et un champ d’épandage.
L’endroit était désert et malodorant ; pourtant un homme s’y tenait
debout, appuyé sur une bêche, le nez et la bouche cachés par un chiffon noué
derrière la tête. A ses pieds, le trou qu’il avait creusé dans la terre
visqueuse mettait une tache noire sur le paysage de neige. Ce fut vers lui que
se dirigea le petit cortège que le sire du Hamel suivait à distance. A la vue
de la fosse boueuse dans laquelle apparaissaient des fragments d’os, Francesco
ne put retenir son dégoût : il s’approcha du sergent.
    – Est-il
vraiment impossible de trouver une autre sépulture que ce trou infect ? dit-il
en portant la main à sa bourse. Le soldat retint le geste ébauché :
    – Non,
messire. Ce que vous demandez est impossible car cela a été ordonné par la
justice. Il faut que cela s’accomplisse mais, ajouta-t-il plus bas,
estimez-vous encore heureux qu’on les enterre. Si l’on avait écouté le mari,
ces malheureux auraient été accrochés par les aisselles au gibet que vous voyez
là-bas, au bord de la route, pour y pourrir lentement au vent, à la pluie et
sous les pierres que les gamins ne manquent jamais de jeter sur les corps qui
ont ce triste sort.
    Francesco
fit signe qu’il avait compris et recula. Quelques instants plus tard, l’affreuse
fosse se refermait sur les dépouilles de ces deux êtres jeunes et beaux qui
auraient pu vivre longtemps heureux et insouciants si l’amour ne leur avait
tendu l’un de ses plus terribles pièges : une passion contre nature.
    Le
ciel parut soudain plus gris à Francesco, comme s’il venait de perdre une part
de sa lumière, et le froid plus aigre. Il se tourna vers le vieux prêtre qui
resserrait frileusement son manteau noir autour de ses épaules maigres :
    – Je
voudrais vous parler, padre. Mes gens m’attendent à la Croix d’Or. Venez avec
moi nous avons l’un et l’autre grand besoin de reprendre des forces.
    Le
vieil homme voulut refuser mais il n’était pas de taille à contrarier le
Florentin une fois que celui-ci avait décidé quelque chose. En dépit de ses
objurgations, il se retrouva assis sur le cheval de cet ami tombé du ciel qui
prit la bride et se dirigea d’un pas décidé vers la ville où rentraient les
soldats et le tombereau. Mais en passant
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