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Antidote à l'avarice

Antidote à l'avarice

Titel: Antidote à l'avarice
Autoren: Caroline Roe
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pontifical…
    — Je vous en prie, Don Gonsalvo, n’en parlons plus. Ce n’était rien, insista-t-il avec une certaine irritation. J’ai donné votre nom à un jeune garçon qui maintenant nous tond la laine sur le dos pour son aide dérisoire. J’aurais fait de même pour n’importe qui.
    Comme si ses paroles avaient servi de signal, les portes s’ouvrirent en grand. Le page apparut, entouré d’une douzaine d’hommes qui parlaient fort entre eux. Il adressa un signe de tête à Gonsalvo et s’écarta du groupe. Quand tout le monde eut franchi la porte, il se dirigea vers Rodrigue.
    — Eh bien ? lui demanda celui-ci. Qu’as-tu à nous dire ?
    Le page dissimula ses boucles brunes sous son bonnet et lui lança un sourire de conspirateur.
    — Un garçon de l’arrière-cuisine m’a révélé que Sa Sainteté avait fait décorer ses appartements très privés de tableaux figurant de belles femmes nues et des scènes d’une grande dépravation. Mais je ne sais si je peux le croire. Il ne s’est jamais rendu dans les appartements privés, mais il le tient d’un…
    — Qu’ont-ils dit au juste ? siffla Rodrigue. Parle ou je t’arrache la langue.
    Le page secoua la tête. Docilement, ils le suivirent dans la rue sans un mot et se fondirent dans la foule bruyante des marchands et des acheteurs de tout poil qui s’interpellaient, hurlaient, gesticulaient ou marchandaient le prix des denrées. Il leur fit franchir une porte et les conduisit dans une taverne sombre, aussi loin qu’il le put de la cheminée et des autres consommateurs. L’endroit paraissait aussi paisible qu’une forêt vide après le tumulte d’une bataille.
    — Commandez quelque chose.
    Gonsalvo demanda donc un pichet de vin. Le page tendit la main. Le gros homme prit une pièce dans sa bourse et la déposa sur la table. Rodrigue en ajouta une autre.
    — Le reste quand tu auras parlé, dit Gonsalvo. J’aimerais être certain que tu as bien quelque chose à révéler.
    — Je sais fort peu de choses en dehors de quelques ragots que je saisis çà et là, déclara le page avec une modestie feinte.
    Le silence s’abattit sur le petit groupe quand la femme du tavernier posa devant eux un pichet et trois gobelets et attendit pour se faire payer.
    — Mais voici de quoi il s’agit, reprit le page quand elle fut hors de portée de voix. Mon noble maître l’ambassadeur, messire Tomas, a eu une audience privée avec Sa Sainteté. Il lui a demandé d’intercéder auprès de Don Pedro d’Aragon au nom de la très loyale et très chrétienne population d’Ancône pour s’assurer que le condamné et ses compagnons…
    — Nous savons ce qu’il désire, le coupa Rodrigue. Qu’a répondu Sa Sainteté ?
    — Elle leur a promis qu’une lettre serait écrite – une lettre virulente – afin de demander la restitution des navires et des biens volés de maître Nicolas Polluti. Mon maître a demandé au secrétaire de Sa Sainteté dans quels termes cette requête serait faite. Le secrétaire lui a affirmé que Sa Sainteté réclamerait le châtiment suprême pour ces pirates et que Don Pedro d’Aragon devrait s’y soumettre sous peine d’excommunication.
    — Qui t’a dit cela ? Étais-tu présent à l’audience ?
    — Personne, et je ne m’y trouvais pas.
    — Dans ce cas, comment sais-tu…
    — J’attendais derrière une porte que mon maître termine de parler à Sa Sainteté. Par quelque hasard extraordinaire, ajouta-t-il de façon modeste, cette porte était entrouverte. J’ai parfaitement entendu la conversation.
    — Quand cette lettre doit-elle être écrite ? demanda Rodrigue.
    — Quand Dieu le jugera bon, dit le page en haussant ses maigres épaules. Sa Sainteté n’en a rien dit.
    — Bien. Assurément, aucune lettre ne sera rédigée ce soir ni envoyée demain, fit Rodrigue d’un air pensif.
    — J’ai entendu l’un des secrétaires dire qu’il convient de considérer les divers aspects du problème avant que de se pencher sur sa rédaction.
    — Qu’entend-il par là ? demanda Gonsalvo.
    — Je suppose que Sa Sainteté doit décider à quel point elle souhaite désobliger Sa Majesté pour satisfaire Ancône, lui répondit Rodrigue.
    — Le royaume d’Aragon est plus vaste que la cité d’Ancône, reprit l’autre. Ce n’est pas, après tout, comme si la sainte mère d’Innocent plaidait la cause de cette ville. Il s’agit là d’un ambassadeur opposé à une bande de
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