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Will

Will

Titel: Will
Autoren: Stephen R. Lawhead
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nécessaire à tous les gens du commun,
et d’un coup la transforme en parc de chasse privé à jamais fermé au peuple. La
Loi Forestière transforme n’importe quelle terre en terre royale, au seul usage
du roi et de ses amis privilégiés. La garde de ces prétendus parcs est confiée
à des agents de la couronne appelés shérifs, qui les gèrent avec une corde dans
une main et un fer à castration brûlant dans l’autre pour quiconque se
hasarderait à s’introduire sans permission, même de quelques mètres, dans la
réserve royale.
    Je ne plaisante pas, un simple pied posé dans une forêt
royale peut vous valoir torture ou énucléation. Chasser un cerf ou un sanglier
pour nourrir vos enfants affamés suffit à vous envoyer au bout d’une corde à la
croisée des chemins, en compagnie de hors-la-loi malfaisants qui ont brûlé des
villages entiers et massacré des familles durant leur sommeil. Une chose sans
importance, à peine une petite corvée matinale. Oui, ce cerf aux yeux sombres
avec son beau pelage brun et ses cuissots appétissants a plus de valeur que
cinquante, que cent vassaux, qu’ils soient serfs ou hommes libres, c’est ainsi.
    La Loi Forestière a été appliquée aux terres du thane Aelred – château, grange, porcherie, grenier, laiterie, moulin… Tout a été
brûlé jusqu’au dernier morceau de bois, et les cendres ont été enfouies. Les
antiques pierres de bornage ont été arrachées, la moindre trace de leur
existence a été retirée des registres, et l’ensemble est allé rejoindre
d’autres propriétés anglaises dans l’escarcelle forestière royale. Quant à
Aelred, ils l’ont enchaîné et emmené, laissant sa pauvre épouse se débrouiller
seule. J’ai entendu dire par la suite que lui et les siens avaient été
embarqués sur un bateau à destination des rivages danois, avec d’autres exilés
qui partageaient leur triste sort, mais je n’en ai jamais eu confirmation. Le
reste de ses gens a été chassé le jour même de ses terres à la pointe de
longues lances normandes.
    Ceux d’entre nous qui n’avaient ni amis ou relations chez
qui ils auraient pu se réfugier sont allés se cacher dans la forêt. Nous
comptions vivre des ressources naturelles malgré la menace de mort qui pendait
au-dessus de nos têtes si jamais on nous attrapait. Ayant été l’un des
forestiers d’Aelred, ça n’était pas la mer à boire pour moi, mais ceux qui n’avaient
pas l’habitude d’une existence aussi austère l’ont très mal vécu. Le froid et
la fièvre ont fait beaucoup de victimes, les hommes du shérif plus encore. Ils
nous donnaient la chasse constamment, et nous tuaient chaque fois qu’ils le
pouvaient.
     
    « Ce n’était pas une vie, mon cher Odo, tu peux me
croire. » Il lève ses grands yeux rêveurs, un demi-sourire aux lèvres.
« Tu ne tiendrais pas plus de trois jours.
    — Je suis peut-être plus solide que j’en ai l’air.
    — Les apparences sont toujours trompeuses », et je
poursuis mon histoire…
     
    En fin de compte, avec l’hiver qui approchait et le shérif
de plus en plus au fait de nos méthodes, ceux d’entre nous qui avaient survécu
ces longs mois se sont séparés et sont partis dans des directions différentes.
Certains sont allés au nord, où le Hersage avait ravagé les terres ; dans
ces contrées désolées, on disait qu’il était possible pour des gens honnêtes de
recommencer leur vie. Le problème, c’est que bien trop de gens malhonnêtes
s’étaient eux aussi rassemblés là-bas, et que c’est vite devenu une autre sorte
de champ de bataille.
    Moi, j’ai décidé de partir à l’ouest, au pays de
Galles – là où était née ma mère.
    J’avais toujours voulu voir cette contrée, notez bien, mais
c’était là autre chose qu’une simple lubie. Car j’avais entendu une histoire
qui me fouettait les sangs. Un homme, à ce qu’on disait, s’était levé pour
défier les suzerains normands, un homme prêt à affronter une mort certaine pour
braver le roi William en personne, un homme qu’on appelait le Roi Corbeau.

CHAPITRE 3
    Lundein
    Le cardinal Ranulf de Bayeux descendit du petit bateau à
fond plat sur la pierre d’appontage construite sur le rivage meuble de la
Tamise. L’eau brune et fétide, pleine d’excréments et de déchets, attendait que
la marée monte et emporte tout cela loin de l’estuaire. Le tissu de sa large
manche pressé contre son nez, il adressa un signe impatient à
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