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Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion
Autoren: Ron Hansen
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saillait de sa bouche.
Enfin, on s’était servi d’un porte-mine en or pour resserrer autour de son cou
un garrot en fil de fer si étroit qu’il était incrusté dans la chair.
    Quand Louis Mulhauser ressortit de la chambre, Ruth Snyder
était toujours par terre et elle étreignait Lorraine en lui caressant les
cheveux.
    « Ce n’est pas beau, annonça-t-il. Je vais prévenir la
police.
    — Oh, non ! s’écria Ruth. Albert !
Chéri ! »
    Elle donna l’impression de vouloir rejoindre son mari, mais Lorraine
sentit que sa mère se retenait et, en définitive, Ruth se contenta de rester où
elle était et de presser un peu plus sa fille contre elle. La petite n’avait
jamais entendu quiconque appeler son père « chéri ». Il n’avait pas
le genre à ça.
    Mr Mulhauser se hâta de descendre jusqu’au téléphone de
l’entrée et y avisa George Colyer, un aimable veuf qui approchait les
soixante-dix ans. Sa maison était juste derrière celle des Snyder, qui faisait
le coin.
    « Je vous ai vu avec la petite et j’ai compris que
quelque chose n’allait pas.
    — On a tué Albert.
    — Dieu du ciel ! »
    Mr Mulhauser téléphona à la police, puis, tandis que sa
femme emmenait Lorraine à l’abri chez eux, de l’autre côté de la rue, George
Colyer et lui aidèrent la charmante épouse d’Albert à se relever et à s’aliter
dans la chambre de la fillette, la plus éloignée des lieux du meurtre.
    Une fine pluie tombait quand les premiers policiers
parvinrent à l’adresse fournie, devant la maison d’un étage et demi, jaune
crème à boiseries vertes, dont la façade de style colonial hollandais était
orientée ouest, au coin de la 222 e  Rue et de la 93 e  Allée,
dans le quartier de Queens Village, quelque vingt-cinq kilomètres à l’est du
centre de Manhattan, dans l’État de New York. La pelouse de devant, roussâtre,
mesurait moins de deux mètres de profondeur jusqu’au trottoir et un grand orme
encore défeuillé se dressait entre celui-ci et la chaussée ; un bain pour
moineaux, qu’Albert avait aidé Lorraine à fabriquer avec une casserole et un
piquet, était planté derrière la maison. L’aile nord en rez-de-chaussée était
occupée par un solarium et une « salle de musique », ainsi baptisée
en raison de son piano mécanique, et l’aile sud abritait la salle à manger et
la cuisine. Dans le prolongement de celle-ci s’élevaient un berceau de verdure
en treillis couvert de glycine et un garage une place indépendant qu’Albert
avait lui-même bâti.
    C’était à l’étage, dans la chambre conjugale au nord, que se
trouvait la victime, Albert Edward Snyder, directeur artistique quadragénaire
aux cheveux blond-roux, musclé, quoique de taille légèrement inférieure à la
moyenne, pour près de quatre-vingt-dix kilos. En raison du désordre de la
maison et de l’extrême méticulosité des meurtriers, les policiers du Queens
interprétèrent immédiatement le crime comme un meurtre plutôt que comme un
cambriolage qui avait mal tourné. Ils n’informèrent pas Mrs Snyder de
l’état de son mari et notèrent qu’elle ne fit montre d’aucune curiosité. On
prévint les enquêteurs des brigades homicides et cambriolages et la maison ne
tarda pas à se remplir de types renfrognés, parmi lesquels des journalistes,
des experts en empreintes digitales et un photographe de la police avec un
appareil photographique Graflex.
    Mrs Snyder se rendit à la salle de bains pour se laver le
visage avec de la crème nettoyante Noxzema, se brosser les dents avec du
dentifrice Ipana et rajuster la mise en plis de sa chevelure très blonde. Mais
comme elle avait prétexté une atroce migraine à l’un des policiers, on convoqua
pour la soigner le médecin de la famille, le Dr Harry Hansen, qui ne
décela ni bleu ni bosse à la tête et se borna à lui laisser de l’aspirine Bayer
avant de repartir.
    Un homme sévère serra la main de Mrs Snyder et se
présenta comme William Gautier, assistant du procureur. Il avait été dépêché
sur les lieux car il n’habitait qu’à quelques rues de là. Après avoir offert
avec raideur ses condoléances à Ruth, mais sans lui avoir confirmé la mort de
son mari, il s’entretint avec elle pendant un quart d’heure et apprit qu’elle
avait épousé Albert Snyder en 1915. Il avait treize ans de plus qu’elle et
était le directeur artistique du magazine Motor Boating, où il
supervisait la mise en page et une
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