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Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion
Autoren: Ron Hansen
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récit et, nous laissant presque sur notre
faim, voici ce qu’elle écrit : ] Veuillez remercier tous les braves
gens du monde extérieur pour leurs jolies cartes et leurs lettres. Beaucoup de
très beaux livres me sont parvenus aussi. De la poésie – les œuvres
d’Elbert Hubbard – des bibles – des chapelets – des
mouchoirs – merci, merci beaucoup. »
     
    Elle exhibait également l’humour insipide du
vaudevilliste : « J’avais toujours rêvé d’un radiateur électrique,
mais mon mari était trop radin pour m’en acheter un. On dirait que mon souhait
va se réaliser. »
     
    Au fil de leurs recherches sur les sept précédentes
exécutions féminines qui avaient eu lieu dans l’État de New York, les avocats
de Ruth découvrirent que les condamnées étaient toutes épouses et mères. La
plupart avaient été pendues, mais la première à mourir sur la chaise
électrique, en 1899 à Sing Sing, était une certaine Mrs Martha Place qui,
par jalousie, avait jeté de l’acide dans les yeux de sa ravissante belle-fille,
avant de l’étouffer, puis de défoncer le crâne de son mari à la hache. Theodore
Roosevelt, alors gouverneur, avait ignoré les appels à la clémence, arguant que
« dans cette affaire, le seul motif d’intervenir dans le processus
judiciaire serait pour que, plus jamais, en aucun cas, une meurtrière ne soit
condamnée à la peine capitale ».
    Les avocats de Ruth savaient donc qu’ils ne pourraient
s’appuyer sur aucun précédent le 5 janvier 1928, lors de l’audience de
grâce qui se tint dans les appartements de l’exécutif, au Capitole, à Albany.
Edgar Hazelton et Dana Wallace escortèrent Mrs Josephine Brown jusqu’à une
pièce officielle aux murs somptueusement revêtus d’acajou, auxquels étaient
suspendus les portraits des gouverneurs de l’État de New York. Puis le
procureur et ses assistants entrèrent à leur tour, suivis par les avocats, la
mère et la sœur de Judd.
    Le gouverneur, assis derrière un imposant bureau d’apparat,
retira ses lunettes pour écouter le plaidoyer de Millard : « Je suis
conscient que la populace crie vengeance, cette même populace qui jadis
criait : “Qu’on le crucifie !” Je sais que les jappements de ces
charognards humains n’influenceront pas votre décision. Je sais que vous
aborderez cette affaire avec une compassion digne du Christ et je vous supplie
de commuer la peine de ces deux pécheurs en réclusion à perpétuité. »
    La réfutation de Newcombe ne fut guère plus qu’un tour
d’horizon des faits évoqués lors du procès : il s’était livré à un examen
consciencieux de l’affaire et n’avait décelé aucune circonstance
atténuante ; ce « crime d’une brutalité révoltante » était le
fruit de la connivence, de la préméditation et d’une cupidité effrénée avivée
par le pécule des assurances d’Albert.
    Des arguments psychiatriques furent avancés, mais le gouverneur
y coupa court :
    « Il y a quelque chose d’anormal chez toute personne
qui commet un meurtre. Laissez de côté la psychologie. Tenez-vous-en à la
loi. »
    Hazelton cita saint Paul :
    « “La lettre de la loi tue, mais l’esprit de la loi
donne la vie.”
    — Eh bien, le corps législatif de l’État de New York
n’est pas de cet avis, répliqua Smith. C’est une autorité plus récente que
saint Paul et c’est celle que j’ai juré de soutenir. »
    Peu après quoi, le gouverneur annonça que l’audience de
grâce était terminée.
     
    Lewis Lawes, le directeur de Sing Sing, indiqua que
l’exécution se déroulerait dans la nuit du jeudi 12 janvier et vingt
journalistes, ainsi que quatre médecins, furent tirés au sort pour y assister
en tant que témoins.
    Des reporters se rendirent à Norwalk, dans le Connecticut,
où Isabel, Jane et Mrs Kallenbach se cachaient chez un riche banquier de
leurs amis, qui repoussa les plumitifs en ces termes :
« Mrs Gray n’a rien à déclarer. Elle a les nerfs en miettes, elle est
prostrée sur un lit à l’étage et elle n’a aucune envie de faire le moindre
commentaire. »
    Invitée au restaurant par quelques journalistes,
Mrs Josephine Brown leur confia obligeamment : « Elle sait
qu’elle va mourir, qu’il est inutile de s’accrocher à l’espoir. Ruth est très
abattue, mais elle le prend mieux que je ne le ferais. Elle a été très
courageuse. »
    Plus de reporters encore que pour le procès accoururent à
Ossining
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