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Une irrépressible et coupable passion

Une irrépressible et coupable passion

Titel: Une irrépressible et coupable passion
Autoren: Ron Hansen
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vingt-cinq dollars chaque jour « la meilleure lettre
exposant pourquoi Ruth Snyder ne devrait pas être exécutée » et, d’un
montant égal, celle exposant « pourquoi elle le devrait ». Presque
aucun homme ne pensait qu’elle méritait de mourir sur la chaise électrique.
Presque toutes les femmes estimaient que si.
    Même si elle avait déjà dix ans en novembre 1927, Lorraine
écrivit prétendument au père Noël une lettre dans laquelle elle le priait de
« ramener ma maman chérie à la maison […]. C’est tout ce que je veux. Je
me sens tellement seule sans elle. » Des centaines de paquets cadeaux de
la part de tous ceux dont le cœur se serrait à la pensée de la fillette ne
tardèrent pas à emplir sa chambre.
    L’affaire Snyder-Gray remonta donc jusqu’au gouverneur Al
Smith, qui ne devait pas se prononcer avant janvier et dont la réticence à
exécuter une femme était bien connue. Il eut cependant la surprise de recevoir
à Albany, la capitale de l’État, la visite de Mrs Brown qui fit irruption
dans son bureau afin d’implorer grâce, non pas pour Ruth, mais « pour la
petite ». Smith se montra cordial et respectueux, mais répliqua :
« Je compatis de tout cœur, Mrs Brown, mais nous devons garder à
l’esprit qu’il y a bien des filles, des fils, des pères et des mères en prison.
Nous ne pouvons pas tous les libérer. »
    Ruth, elle, préféra une autre approche et chercha à éveiller
l’indignation et la pitié du grand public, ainsi qu’à aider financièrement
Mrs Brown en bâclant une diatribe échevelée, décousue et
schizophrène : My Own True Story – So Help Me God (« Ma
véritable histoire personnelle – je le jure devant Dieu ! »). Le
tirage du New York Daily Mirror progressa de cent mille exemplaires par
jour durant toute la période de sa publication. Afin d’établir l’authenticité
du texte, les éditeurs photographièrent et reproduisirent l’étrange première
page du manuscrit original, que la mère de Ruth avait récupéré clandestinement,
mais ce fac-similé donnait aussi à voir l’écriture en grosses lettres parsemée
de tirets d’une femme égarée et exaltée, apparemment au bord de la crise de
nerfs : « Judd Gray cause ! – du “gros cafard” – qu’il
a “ratatiné” – est-ce qu’il – J. G. – y repense seulement
au GROS CAFARD DE RUTH BROWN ? »
    Albert Snyder, un « gros cafard » ? Était-ce
censé plaider en faveur de Ruth ?
    Le New York Daily Mirror finit par expurger la prose
de Ruth pour la rendre plus lisible, mais l’hystérie, la confusion et la vision
faussée des événements de l’année écoulée sautaient quand même aux yeux :
« “L’extérieur” ne croit donc RIEN de ce que je raconte ? J’ai fait tout
ce qui était en mon pouvoir pour arrêter J. G. sans prévenir mon
mari. »
    Elle affirma que Judd « s’entichait de tout ce qu’il
pouvait utiliser à son avantage ». Elle soutint que « pour empêcher
Isabel d’informer mon mari de notre liaison, je devais lui acheter les articles
de luxe que son époux ne pouvait lui offrir, y compris des vêtements de son
boulot, et comme je ne pouvais répondre à ses exigences, elle allait me
dénoncer à mon mari ! »
     
    « Mon Dieu ! Où est la justice ? Où ?
[…]
    « Même s’il a avoué avoir tué mon mari, pourquoi le
MONDE ENTIER a-t-il cru que TOUT ce qu’il disait était “LA VÉRITÉ” ? J’ai
admis “la vérité” de ma liaison amoureuse illégitime, pourtant personne ne m’a
CRUE quand j’ai dit : “JE N’AI PAS TUÉ MON MARI.” Pourquoi a-t-on mis ma
parole en doute ? Pourquoi ? Parce que J. G. a servi au public
le même baratin charmeur qui m’a complètement fait perdre les pédales et avaler
des couleuvres pas possibles, et nous, PAUVRES CRUCHES, on continue à les aimer
quand même. […]
    « J’ai simplement eu le malheur d’accorder mon amour à
un misérable – j’ai seulement été aussi mauvaise qu’il m’a faite. […]
    « MON CONSEIL AUX HOMMES COMME AUX FEMMES, AUX JEUNES
COMME AUX VIEUX : LISEZ VOS BIBLES ET VOS LIVRES DE PRIÈRES ! […]
    « PRIEZ et gardez la FOI ! Car la récompense de la
FOI est la signature de notre Seigneur Jésus-Christ dans nos cœurs. Et la
signature du Christ est reconnue à la Banque des Cieux. Vous ne tenez pas à y
entrer ? […]
    « [ NdE : L’humeur de Ruth Snyder change brusquement
à ce stade de son extraordinaire
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