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Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique

Titel: Un Vietnamien bien tranquille : L'extraordinaire histoire de l'espion qui défia l'Amérique
Autoren: Jean-Claude Pomonti
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père, Paulette a grande allure et la repartie sans égal. Elle a très bien connu le personnel politique saigonnais avant de décrocher et d’être intégrée au Quai d’Orsay.
    Parmi les rares journalistes que je me rappelle avoir rencontrés figure toutefois, en 1966, Robert Guillain, envoyé spécial du Monde , dont la clairvoyance sur la guerre française a fait l’unanimité. L’historien Philippe Devillers, alors attaché au CERI , le foyer de recherches de Sciences Po, a signalé à Robert Guillain ma présence à Sài Gòn. Avant de me rendre au Viêt Nam, j’ai, en effet, effectué quelques menus travaux pour Philippe Devillers. Mon séjour à Sài Gòn s’inscrit aussi dans le cadre d’une thèse de troisième cycle de sciences politiques sur les relations entre bouddhisme et politique au Sud-Vietnam. Vaste projet dont l’esquisse demeure, encore aujourd’hui, dans un fond de tiroir.
    Robert Guillain n’attend pas, à juste titre, d’un jeune coopérant une évaluation de la situation de la guerre. Passionné d’Extrême-Orient, où il a longtemps vécu, y compris avant la Deuxième Guerre mondiale, il rêve de replonger dans l’atmosphère des rues d’Asie. Nous nous promenons donc, à bord de cyclos-pousse, à travers Sài Gòn et son quartier chinois de Cho Lón, lui exerçant son chinois, et moi baragouinant mon vietnamien. La location d’un cyclo-pousse – un moyen de transport peu coûteux mais en voie de disparition – offre l’avantage de prendre son temps, d’improviser, de s’arrêter là où on le souhaite et pendant le temps qu’il faut. De nos jours, il a été remplacé par la moto-taxi : la « moto dop » ou moto-double, selon les Cambodgiens, et le « xe ôm » ou « taxi-embrassade », selon les Vietnamiens. Plus onéreux, le « xe ôm » offre l’avantage de pouvoir se faufiler dans les embouteillages.
    L’expérience a dû plaire à Robert Guillain car il me demande, à l’heure des au revoir, de lui rendre visite à Paris lors de mon retour. « Aimeriez-vous être journaliste ? » me dit-il. Une question que je ne risque pas d’oublier : j’ai acquis ma première machine à écrire, mécanique et d’occasion bien sûr, en 1954, soit douze années auparavant. Je tapais alors à deux doigts, ce que je continue de faire aujourd’hui mais un peu plus rapidement. Quand je rencontre Robert Guillain à Sài Gòn, le vœu de devenir journaliste me hante depuis plusieurs années. C’est l’envoyé spécial du Monde  – l’obligation de lecture à Sciences Po – qui m’en parle.
    À mon retour à Paris, l’année suivante, je téléphone à Robert Guillain. C’est l’époque où, préoccupé par l’engagement croissant de l’Amérique dans le bourbier vietnamien, Hubert Beuve-Méry décide d’avoir un correspondant sur place. Robert Guillain me convie à déjeuner et me demande de rédiger une série d’articles sur « Sài Gòn dans la guerre », que Le Monde publie sous pseudonyme, le devoir de réserve s’imposant en raison des fonctions que j’avais occupées à Sài Gòn moins de six mois auparavant. L’année suivante, j’intègre la rédaction du quotidien de la rue des Italiens.
    Revenu, donc, en 1968 comme journaliste au Sud-Vietnam, le Continental est mon balcon à Sài Gòn. Les médias américains et les agences internationales se nourrissent, en partie, des briefings quotidiens de l’armée américaine – les « five o’clock follies », dans les locaux des services américains d’information installés au Rex, salle de cinéma à deux pas de mon hôtel. Les alignements de statistiques des porte-parole américains ne donnent qu’une faible idée de la misère de la guerre.
    J’accompagne donc sur le terrain les troupes sud-vietnamiennes et dispose progressivement d’un tissu de relations parmi leurs officiers, les plus téméraires et les plus compétents ayant été souvent formés par des parachutistes français. Pour éviter la pesante routine saigonnaise, je préfère m’éloigner de la ville chaque fois que l’occasion s’en présente. La guerre, de plus en plus conventionnelle, se gagne ou se perd dans les campagnes, hors des centres urbains soumis à pression mais où chacun semble vaquer à ses occupations sans trop se poser de questions sur des lendemains fatalement incertains. Elle est devenue, avant tout pour les ruraux, un genre de vie.
    En 1973 déjà, une atmosphère de fin de guerre
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