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Un espion à la chancellerie

Un espion à la chancellerie

Titel: Un espion à la chancellerie
Autoren: Paul C. Doherty
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cheval, luttant contre la nausée qui menaçait de l’humilier. Il maîtrisa ses sanglots et regarda autour de lui : des corps gisaient sur la route, des hommes hurlaient de douleur et maudissaient leurs affreuses blessures. L’ordre de la longue colonne avait été disloqué : deux chevaux étaient morts, un autre agonisait, agité de soubresauts, des flots de sang s’échappant de sa gorge. Le calme revint petit à petit. On compta les morts : deux soldats, un marmiton de la Maison du comte de Richemont et un assaillant.
    Corbett entendit Lancastre et Richemont pousser de hauts cris — « Des hors-la-loi, si près de Paris ! », « Nous ne sommes pas protégés comme il se doit ! » —, mais les chevaliers français se contentèrent de hausser les épaules et de demander, hautains, s’il n’y avait pas aussi des bandits de grand chemin en Angleterre.
    Lancastre décida de réunir ses compagnons, Richemont, Waterton, Eastry et Corbett. Postés sur le chemin, ils observèrent les sergents et les sénéchaux en train de rétablir l’ordre et un médecin occupé à panser les plaies pendant que les chevaliers français allaient réquisitionner un chariot pour emporter morts et blessés graves dans un manoir proche. Richemont, le visage cramoisi, ne ratait pas l’occasion de vanter ses prouesses à l’épée ; Waterton semblait nerveux, mais n’avait rien, pas même une estafilade ou une ecchymose ; Eastry montrait de la tristesse, et en même temps un certain détachement froid, impatient d’aller réconforter les blessés ; Lancastre était furieux, son visage blême marbré par la colère.
    — Bien sûr, commença-t-il, je protesterai solennellement auprès de Philippe IV. Il nous faut absolument savoir, ajouta-t-il en caressant l’encolure de sa monture et en dévisageant ses compagnons, si nous nous trouvons devant une attaque de hors-la- loi ou une embuscade soigneusement planifiée. Je pencherais, quant à moi, pour la seconde solution.
    Un murmure d’approbation accueillit ses remarques et le poussa à continuer dans cette veine.
    — S’il en est ainsi, dit-il d’une voix qui se mua en chuchotement rauque, le traître doit faire partie du convoi.
    — Pourquoi ? demanda Corbett avec brusquerie. Je veux dire, Monseigneur, que d’une part notre itinéraire a été fixé en Angleterre et que, d’autre part, avec le bruit que fait notre troupe, la moitié de la contrée doit être au courant de notre passage.
    Le regard de Lancastre se posa sur ce clerc discret et réservé. Il n’aimait pas Corbett – trop secret, pensait-il, trop sûr de lui. Corbett vit l’éclair de défiance et refoula d’autres questions. Il ne partageait pas les conclusions du comte : il se pouvait fort bien que le traître fût l’un d’entre eux, mais des accusations vagues et brutales ne feraient que renforcer la méfiance et la prudence de chacun, rendant ainsi la découverte de la vérité plus difficile. Lancastre lui-même s’en rendit compte.
    — Je pense, poursuivit-il, que le traître fait partie de notre troupe. Dès notre arrivée à Paris, nous prendrons contact avec Simon Fauvel, l’un des représentants du roi auprès de la cour de France. Il aura peut-être eu vent de commérages ou de rumeurs qui pourraient faire la lumière sur ce mystère.
    Ils revinrent alors au convoi qui s’était reformé et se remirent lentement en route vers les faubourgs de Paris. Corbett reprit sa place, rassura un Ranulf anxieux et lui demanda de bien vouloir fermer son clapet et de le laisser réfléchir en paix. Son serviteur s’éloigna en grommelant de dépit tandis que Corbett réfléchissait à l’embuscade. Il avait entendu un garde de l’escorte crier qu’il était impossible d’identifier l’agresseur tué, car les ennemis ne portaient ni document, ni objet personnel, ni armoiries. Corbett s’y attendait. C’était un coup monté. Ce qui l’inquiétait davantage, c’était que le gros de l’attaque semblait avoir été dirigé contre sa personne. Pourquoi, se demandait-il, voyait-on en lui un danger tel qu’on l’avait désigné comme cible privilégiée d’une embuscade particulièrement meurtrière ? Qui, en Angleterre, avait transmis des renseignements aux Français ? Corbett s’enveloppa plus étroitement dans sa cape ; il avait froid, mais moins à cause du vent coupant et glacial que de la peur.
    La bise déchaînée forçait les cavaliers à se blottir contre leurs
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