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Tsippora

Tsippora

Titel: Tsippora
Autoren: Halter,Marek
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sang de Madian sur son souvenir. Elle ne voudrait aucun sang,
aucune guerre. Elle n’aimait que la confiance, le respect et la paix. Elle
disait que tous les hommes étaient égaux devant la face de l’Éternel, elle
répétait que nul ne pouvait porter la main sur un seul.
    Il dit encore :
    — Tsippora espérait de moi des
caresses qui embellissent le noir de sa peau. Et moi, depuis quand ne lui en
avais-je pas donné ? Si tu veux de la vengeance, tue-moi, car moi aussi je
l’ai tuée.
    Les hommes ont la tête dure. Ils
n’apprennent pas vite. Le fils de Aaron n’a rien écouté des paroles de Moïse.
Il a convaincu ceux qui voulaient l’entendre. Ils sont allés faire la guerre à
Madian.
    Moïse eut à pleurer de nouveaux morts. Les
morts que Tsippora voulait éviter.
    Devant le peuple, il dit :
    — Nous ne sommes pas lait et miel. Je
vous ai libérés de l’esclavage grâce à la main forte de l’Éternel, mais dans
vos cœurs vous êtes restés esclaves. Dans vos cœurs, vous êtes dans le désert.
Dans le désert vous mourrez.
    Le peuple s’étonna :
    — Que veux-tu dire ? Que nous
reproches-tu ? Alors Moïse expliqua :
    — La parole du Très-Haut s’adresse aux
hommes libres. La liberté est comme l’eau au fond d’un puits. Il faut apprendre
à la remonter au grand jour et apprendre à la boire. Vous en êtes incapables.
Vos enfants, vos petits-enfants, eux qui n’ont jamais connu l’esclavage
entreront au pays de Canaan. Ils découvriront la Terre Promise. Eux et non
vous !
    Ainsi fut fait. Le peuple que Moïse avait
fait sortir d’Égypte tourna dans le désert durant quarante années jusqu’à la
mort de tous les anciens esclaves de Pharaon, jusqu’à ce que leurs corps
deviennent poussière dans la poussière du désert.
    C’est un peuple nouveau qui arriva sur les
rives du Jourdain. Moïse, rompu par le grand âge, pleurait toujours Tsippora,
son épouse noire. Sa voix lui manquait, son regard lui manquait, ses conseils
lui manquaient. Pas un jour sans que tout de Tsippora lui manque !
    Arrivé à la frontière de Canaan, il grimpa
sur le Mont Nebo pour contempler cette terre dont l’Éternel lui avait parlé.
    À la vue du pays de miel et de lait, son
cœur fut rempli de doutes. N’était-il pas, comme les autres, indigne de poser
son pied sur la terre promise ? N’avait-il pas hésité avant d’accepter la
volonté du Très-Haut ? Sans Tsippora, aurait-il eu le courage d’affronter
Pharaon et même d’écouter Yhwh ? Sans Tsippora, que saurait-il de la
beauté d’une chair noire et étrangère ? Que saurait-il de ce souffle qui
est le même entre tous les cœurs ?
    Mais Tsippora n’était plus là pour lui
apprendre ce qu’il ignorait encore.
    Alors Moïse donna à Josué les pierres de la
Loi et dit :
    — C’est toi et non moi qui entreras
dans Canaan. C’est toi qui conduiras le peuple. Moi, je reste ici. Le Mont Nebo
sera mon tombeau.
    Et il succomba avec, dit-on, un baiser de
l’Eternel.
    Selon sa volonté, il n’eut pas de bâtisse
de pierre ni de caverne sacrée pour ses os. L’idolâtrie, Yhwh n’en voulait pas.
Moïse n’était pas un dieu, seulement un homme de chair et d’os qui s’éteignait
en contemplant son rêve. Un homme qui demeurera à jamais dans l’immense
mausolée des mots et de la mémoire.
    Mais de Tsippora, la Noire, la Kouchite,
qui s’en souviendra ? Qui se souviendra de ce qu’elle a accompli et qui
prononcera encore son nom ?
    Que ce livre soit pour elle un modeste
tombeau.
     
     
    FIN
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