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Potion pour une veuve

Potion pour une veuve

Titel: Potion pour une veuve
Autoren: Caroline Roe
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Berenguer.
    Secrétaire de longue date de l’évêque, Bernat sa Frigola entra par une autre porte.
    — Apportez-moi les lettres de Don Vidal.
    Le petit franciscain disparut pour revenir presque aussitôt avec une poignée de documents. Il disposa chacun d’eux, soigneusement déplié, sur le bureau de Son Excellence. Trois fragments du meilleur papier de Gérone, couverts d’écriture. Ils provenaient d’un lot que Don Vidal de Blanes, abbé de Sant Feliu et maintenant procurateur provisoire de Sa Majesté, avait emporté avec lui à Barcelone quand il était allé servir le roi.
    — Les lettres, Votre Excellence, murmura-t-il.
    — Lisez-nous la partie qui traite de Yusuf, dans la dernière.
    — Certainement, Votre Excellence. « En ce qui concerne le dominicain qui fut soigné pour les fièvres par votre médecin et le petit Maure, Yusuf… Comme je le craignais, le jeune homme a parlé au père Salvador, qui s’interroge sur le statut de Yusuf. »
    — Son statut ? s’étonna Isaac.
    — Il s’en explique, dit Berenguer. Poursuivez, Bernat.
    — « Le père Salvador désire savoir si ce garçon est esclave et sinon, pourquoi il vit au Call. »
    — Chacun sachant que Yusuf, en tant que pupille du roi, ne peut logiquement être esclave, cette question n’est que pure malveillance, grommela Berenguer. Il est parfaitement au courant des complications que le baptême soulèverait.
    — Il ne pourrait plus vivre ni étudier dans notre maison, dit Isaac. Ou dans toute autre maison du quartier juif.
    — Et cela créerait des problèmes s’il souhaitait retourner dans sa propre famille. Que lui as-tu dit pour éveiller en lui une telle peur ? demanda l’évêque en se tournant vers le garçon. Don Vidal désire aussi le savoir. Sinon il ne pourra agir sagement.
    Les deux clercs, l’évêque et son secrétaire, regardaient le garçon ; son maître et professeur, incapable d’en faire autant à cause de sa cécité, pencha la tête pour mieux entendre. Yusuf rougit d’être ainsi scruté, cligna des yeux puis essaya de se concentrer sur les paroles qu’il avait prononcées quatre ou cinq mois auparavant.
    — Pour commencer, je crois qu’il a dit que j’étais un joli garçon, un compliment dans ce genre, puis il a voulu savoir si je venais de Gérone.
    Après avoir débité cela à toute allure, il reprit son souffle et poursuivit sur un rythme plus raisonnable :
    — C’était à l’époque où il se remettait des fièvres, mais était encore affaibli et assez agité.
    — Y avait-il quelqu’un d’autre dans la pièce ? voulut savoir Isaac.
    — Non. Il a attendu votre départ, seigneur.
    — Continue.
    — Je lui ai répondu que non. Il m’a demandé d’où je venais, et j’ai dit Grenade. Il m’a demandé ensuite si j’étais esclave. Non, ai-je dit. Puis il a voulu savoir quand je rejoindrais ma famille. J’ai dit que je l’ignorais. Il s’est alors passé quelque chose – je pense que mon maître m’a appelé –, et avec soulagement je suis parti.
    — Merci, Yusuf, dit l’évêque. Maintenant que nous savons à quoi nous avons affaire, nous pouvons agir.
    — Que suggère Votre Excellence ? demanda Isaac, très calme, mais la voix tendue.
    — Je crois me souvenir que Sa Majesté a invité ce garçon à passer un certain temps en Sardaigne, pour y apprendre les manières de cour et pratiquer l’art des armes et de la guerre, dit paresseusement Berenguer.
    — Oui, Votre Excellence, répondit Yusuf, visiblement mal à l’aise. C’est exact. Mais quand elle l’a fait, j’ai répondu que je préférerais l’éviter. J’ai manqué de courtoisie en parlant ainsi à Sa Majesté. Changer d’avis à présent et lui demander si je pourrais venir… ce n’est pas possible.
    — Ce n’est rien, dit Berenguer. La plupart de ses courtisans ne peuvent se tenir à une idée plus de quelques instants. Le roi ne sera ni fâché ni surpris si tu changes d’avis. Envisagez la question, maître Isaac. Nous en rediscuterons quand le secrétaire de Don Vidal arrivera porteur des pensées du noble abbé sur cette affaire et bien d’autres.
     
    — En Sardaigne ? Ridicule !
    La voix de l’épouse du médecin trancha la chaleur pesante de l’été. Tous ceux qui étaient assis à table dans la cour ombragée levèrent le nez de leurs assiettes.
    — Qui va en Sardaigne ? demanda Nathan, un des jumeaux âgés de huit ans. C’est près de
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