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Notre France, sa géographie, son histoire

Notre France, sa géographie, son histoire

Titel: Notre France, sa géographie, son histoire
Autoren: Jules Michelet
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parties, dans la distribution des
     fonctions, dans la division du travail social. La force résistante et
     guerrière, la vertu d'action est aux extrémités, l'intelligence au centre. Les
     provinces frontières, coopérant plus directement à la défense, gardent les
     traditions militaires, continuent l'héroïsme barbare, et renouvellent sans
     cesse d'une population énergique le centre énervé par le froissement rapide de
     la rotation sociale. Le centre, abrité de la guerre, pense innove dans
     l'industrie, dans la science, dans la politique ; il transforme tout ce
     qu'il reçoit. Il boit la vie brute, et elle se transfigure. Les provinces se
     regardent en lui ; en lui elles s'aiment et s'admirent sous une forme
     supérieure ; elles se reconnaissent à peine :
     
    « Miranturque novas frondes et non sua
     poma. »
     
    Cette belle centralisation, par quoi la France est la France, elle
     attriste au premier coup d'œil. La vie est au centre, aux extrémités ;
     l'intermédiaire est faible et pâle. Entre la riche banlieue de Paris et la
     riche Flandre, vous traversez la vieille et triste Picardie ; c'est le
     sort des provinces centralisées qui ne sont pas le centre-même. Il semble que
     cette attraction puissante les ait affaiblies, atténuées. Elles le regardent
     uniquement, ce centre, elles ne sont grandes que par lui. Mais plus grandes
     sont-elles par cette préoccupation de l'intérêt central, que les provinces
     excentriques ne peuvent l'être par l'originalité qu'elles conservent. La
     Picardie centralisée a donné Condorcet, Foy, Béranger, et bien d'autres, dans
     les temps modernes. Dans la France, la première gloire est d'être Français. Les
     extrémités sont opulentes, fortes, héroïques, mais souvent elles ont des
     intérêts différents de l'intérêt national ; elles sont moins françaises.
     La Convention eut à vaincre le fédéralisme provincial avant de vaincre
     l'Europe.

IV

    Du rôle que remplissent nos provinces
     frontières.
    Ce qu'est la France comparée aux autres nations.
    C'est néanmoins une des grandeurs de la France que sur toutes ses
     frontières elle ait des provinces qui mêlent au génie national quelque chose du
     génie étranger. A l'Allemagne, elle oppose une France allemande ; à
     l'Espagne une France espagnole ; à l'Italie une France italienne. Entre
     ces provinces et les pays voisins, il y a analogie et néanmoins opposition. On
     sait que les nuances diverses s'accordent souvent moins que les couleurs
     opposées ; les grandes hostilités sont entre parents. Ainsi la Gascogne
     ibérienne n'aime pas l'ibérienne Espagne. Ces provinces analogues et
     différentes en même temps, que la France présente à l'étranger, offrent tour à
     tour à ses attaques une force résistante ou neutralisante. Ce sont des
     puissances diverses par quoi la France touche le monde, par où elle a prise sur
     lui. Pousse donc, ma belle et forte France, pousse les long flots de ton
     onduleux territoire au Rhin, à la Méditerranée, à l'Océan. Jette à la dure
     Angleterre la dure Bretagne, la tenace Normandie ; à la grave et
     solennelle Espagne oppose la dérision gasconne ; à l'Italie la fougue
     provençale ; au massif Empire germanique, les solides et profonds
     bataillons de l'Alsace et de la Lorraine 2  ;
     à l'enflure, à la colère belge, la sèche et sanguine colère de la Picardie, la
     sobriété, la réflexion, l'esprit disciplinable et civilisable des Ardennes et
     de la Champagne.
    Pour celui qui passe la frontière et compare la France aux pays qui
     l'entourent la première impression n'est pas favorable. Il est peu de côtés où
     l'étranger ne semble supérieur. De Mons à Valenciennes, de Douvres à Calais, la
     différence est pénible. La Normandie est une Angleterre, une pâle Angleterre.
     Que sont pour le commerce et l'industrie, Rouen, le Havre, à côté de Manchester
     et de Liverpool ? Mais il ne faut pas prendre la France pièce à pièce, il
     faut l'embrasser dans son ensemble. C'est justement parce que la centralisation
     est puissante, la vie commune, forte et énergique, que la vie locale est
     faible. Je dirai même que c'est là la beauté de notre pays. Il n'a pas cette
     tête de l'Angleterre monstrueusement forte d'industrie, de richesse ; mais
     il n'a pas non plus le désert de la Haute-Écosse, le cancer de l'Irlande. Vous
     n'y trouvez pas, comme en Allemagne et en Italie, vingt centres de
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