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Noir Tango

Noir Tango

Titel: Noir Tango
Autoren: Régine Deforges
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d’horreur qui la jetaient dans l’épouvante !…
    — François !
    — Oui, petite fille, je suis là.
    — François, si tu savais !…
    — Je sais, ma chérie, je sais. Maintenant,
il faut t’efforcer à oublier…
    Il sentit le corps de son amie se raidir, prêt
à lui échapper.
    — Ce sera dur, mais il le faut. Tu as
une maison à rebâtir, un enfant à élever, une famille à…
    — Tais-toi ! Tais-toi !
    Elle lui martela la poitrine de ses poings
fermés. Il rit.
    Exaspérée par ce rire, elle tenta de le
griffer, de le battre ! Il s’allongea sur elle, lui maintenant les bras
tendus derrière la tête.
    — Tu ne crois pas que nous avons mieux
à faire qu’à nous disputer ? dit-il en cherchant sa bouche.
    Elle se débattit, le mordant avec une telle
violence qu’il lâcha prise. Ébouriffée, enlaidie de colère, Léa se redressa ;
pendant un long moment ils s’affrontèrent du regard. Peu à peu, elle se calma, la
fureur fit place à la tristesse. Les abondantes larmes qui coulaient de ses
yeux grands ouverts lui lavaient les joues. Ce chagrin, sans sanglots, l’apaisa.
Quand François lui tendit son mouchoir, elle le remercia d’un léger sourire.
    — Excuse-moi, je suis ridicule.
    — Tu es tout sauf ridicule, viens
contre moi.
    Elle se blottit entre ses bras, attentive au
désir qui éloignait l’angoisse. Déboutonnant la chemise, elle passa sa main
dans l’échancrure, retrouvant la douceur de la peau de son amant, son odeur. Comme
il lui avait manqué pendant ces longs mois, au point qu’elle avait failli céder
à un jeune et bel officier anglais ! À son tour, il fit sauter les boutons
du sévère chemisier, desserra la cravate et glissa les bretelles de la combinaison…
Ses seins apparurent, somptueux ! Abolis la guerre, les souffrances, le
ciel, la terre, la mort… Il n’y avait plus qu’un homme et une femme dont les
corps s’unissaient comme à l’aube des temps sans autre exigence que le plaisir ;
un plaisir brutal et rapide qui les surprit, les laissant inassouvis.
    François l’aida à se relever. Enlacés, ils
reprirent le chemin de Montillac. À Bellevue, Léa s’assis sur le vieux banc de
pierre accoté à la maison de Sidonie. Ses yeux errèrent sur le paysage familier.
Rien n’avait changé, rien n’indiquait qu’une guerre avait eu lieu, que dans ces
bois, ces villages, des gens avaient fait le sacrifice de leur vie pour que
demeurent ces clochers, ces champs, ces vignes. Rien ! Elle revit le
pauvre corps dénudé de Sidonie. Fermant les yeux, elle chassa l’image d’épouvante,
ne voulant garder que le souvenir de la brave cuisinière disant :
    — Petite, tu boiras bien de mon cassis ?
    L’automne approchait, la lumière de cette
fin d’après-midi donnait toute sa splendeur à ce paysage aimé.
    — Regarde, on voit les Pyrénées !
    Ce n’était sans doute pas vrai, mais Sidonie
lui avait si souvent dit que par très beau temps on voyait les vieilles
montagnes.
    Secouant la tête comme un cheval qui chasse
une mouche importune, elle se redressa et planta son regard dans les yeux de
son amant. Il lui disait, ce regard : « Je suis là, je suis vivante, je
veux jouir de la vie, vite, maintenant ! Tu es là pour m’y aider puisque
tu m’aimes. Car tu m’aimes, n’est-ce pas ? » Elle amena l’échelle
devant la lucarne du grenier à foin de la petite maison et grimpa les échelons
branlants. Que de fois elle y était venue s’y cacher des adultes avec Mathias
et les copains de leurs jeux d’enfants. Le foin des dernières fenaisons
embaumait. Léa, les pieds enfoncés dans la masse odorante, arracha ses
vêtements et s’allongea, nue, indifférente aux piqûres de l’herbe sèche. Appuyé
à une solive, François la regardait, n’essayant pas de cacher son trouble. À son
tour, il se dévêtit lentement, sans la quitter des yeux.
    La soirée était très avancée quand, épuisés
et heureux, ils regagnèrent Montillac.
    Personne n’avait trouvé à redire quand, en
dépit des convenances, Léa et François avaient partagé la même chambre. Les
demoiselles de Montpleynet, Françoise, Laure, Ruth et les enfants campaient
tant bien que mal dans le logement du maître de chais et des journaliers, en
attendant que les travaux de la grande maison fussent terminés. L’architecte
engagé par Tavernier avait promis que tout serait prêt à la mi-octobre. Albertine
et Ruth en doutaient ; Laure harcelait les ouvriers
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