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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes
Autoren: David Camus
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qu’elles tremblaient. C’était de peur.
    « Il n’y a pas de bois ! »
    Pourquoi ce soir ? Pourquoi maintenant ?
    Un vent se leva, un vent terrible, pour qui tu étais nu. Il se moquait de tes vêtements, fourrures épaisses et manteau de laine, chemise de toile, poils et peau, et soufflait directement sur tes os. Il aurait gelé même un ours.
    C’est alors qu’un éclat dans le ciel attira ton regard. Une étoile ? Elle paraissait venir dans ta direction, à vive allure. Puis une, deux, trois et bientôt quatre autres étoiles brillèrent après la première, et toutes les cinq se dirigèrent vers la maison de tes parents.
    Que c’était beau ! Tu aurais aimé crier, appeler, prévenir ta famille de leur venue, mais aucun son ne sortit de ta bouche. Devant tant de beauté, tes lèvres restaient closes. Ce n’étaient pas des étoiles. Pour toi c’étaient des anges ! Cinq anges d’acier, montés sur des chevaux caparaçonnés d’or et d’argent. Un grand bruit les suivait, car leurs armes étaient tirées et souvent se heurtaient aux arbres de la forêt. Leurs chevaux renâclaient, leurs armures sonnaient, leurs heaumes tintaient. Et quand une lance à l’écu se cognait, c’était comme un concert célébrant la venue d’anges tombés des Cieux.
    En vérité, il ne s’agissait pas seulement d’anges, mais de quatre anges escortant Dieu – puisque le premier était si bien vêtu, portant blanches couleurs frappées d’une grande croix rouge, qu’il te sembla que c’était Dieu, apparaissant pour annoncer aux hommes quelque nouvelle d’importance.
    Dieu ! C’était Dieu ! Cet être étrange et mystérieux que tes parents n’évoquaient jamais qu’à demi-mot, t’invitant à le craindre tout autant qu’à l’aimer. Dieu venait chez vous !
    Tu mourais d’envie de dévaler la colline, et de courir vers Dieu et tous ses anges pour leur demander de t’emmener avec eux.
    C’est alors qu’un cri retentit :
    — Cours, Morgennes, cours !
    C’était ta mère. Elle s’en venait au-devant des anges, qui talonnaient leurs destriers pour s’approcher d’elle.
    Courir ?
    Sans réfléchir, tu lui obéis et te mis à courir – mais vers où ? Alors, comme si elle t’avait entendu, ta mère cria :
    — Vers la rivière, Morgennes, vers la rivière !
    Vers la rivière ! En avant ! Tu fermas les yeux, car c’était les yeux fermés que tu courais le mieux. Tes pas s’enfonçaient dans la neige, mais qu’importe : la terre te guidait. Elle te disait où aller, et te permettait de te concentrer sur ce que tu entendais. Des cris, ton père qui appelait, ta sœur qui pleurait, ta mère qui hurlait.
    — Cours ! Cours !
    On aurait dit qu’elle se battait. Ta mère ? Se battre ? Avec Dieu ? Certainement ton père devait-il effectuer quelques passes d’armes, car tu entendais le fer frapper le fer, ton père souffler et les chevaux hennir.
    Tu rouvris les yeux et regardas derrière toi. C’était la nuit. Déjà ? Il n’était pas si tard, tout à l’heure, quand tu avais couru vers la forêt pour y prendre du bois. C’était cependant la nuit, ou les ténèbres avaient un autre nom… C’est alors que tu trébuchas.
    Que faisait cette racine ici ? Tu t’étais étalé de tout ton long dans la neige, et le froid te mordait la poitrine, s’infiltrant dans ta bouche, dans ton nez. « Pourquoi ai-je ouvert les yeux ? J’aurais dû les garder fermés… »
    Tu refermas les yeux, te remémoras le terrain – si familier – et te relevas, prêt à reprendre ta course. Tu eus soudain le sentiment qu’un énorme animal te poursuivait. Écailles et griffes en colère, bête qui volait, rampait et bondissait à la fois. Un monstre impossible. Il soufflait, il tuait ! Et sa proie, c’était toi.
    Quel était-il ? Était-ce un dragon, comme celui que l’un des anges de Dieu portait sur son enseigne ? Oui. Un immense dragon-nuit, plongeant dans l’obscurité tout ce qui passait à sa portée, et dévorant lueurs et confins de lueurs.
    Sourd à ta peur, tu continuas de courir. « J’aurai peur plus tard », te disais-tu.
    La rivière vers laquelle tu filais était plus qu’une rivière – c’était un fleuve sans amont ni aval, l’immense bras liquide d’un pays posé en travers du monde, et tu ne l’avais jamais franchi. Nul, à ta connaissance, ne s’y était jamais aventuré, car ce fleuve était tellement agité de remous (à défaut d’être
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