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Meurtres dans le sanctuaire

Meurtres dans le sanctuaire

Titel: Meurtres dans le sanctuaire
Autoren: C.L. Grace
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beaux jours d’été. Sous la lumière crue, il devenait moins menaçant. D’un geste absent, elle se tamponna la nuque. Elle avait chaud dans son jupon de laine et sa robe de grosse étoffe verte.
    — Vous ressemblez à une nonne, grommela Thomasina. Que dirait votre père s’il vous voyait ?
    — Père est mort, répliqua Kathryn. Son corps glacé repose sous les dalles de l’église Sainte
    — Mildred.
    Elle cligna des yeux, sans les détourner du jardin. Son père lui manquait toujours, depuis six mois qu’il était mort. Six mois que son âme était partie au Purgatoire, et qu’il avait transmis son horrible secret à Kathryn, sa fille unique. Celle-ci parvenait encore à peine à y croire et aurait pu tenter de l’oublier sans ces maudites missives qui continuaient à lui parvenir. Elle glissa la main dans son sac pour en sortir le morceau de parchemin jaune écorné, déchiré, souillé, que l’on avait poussé sous sa porte, la veille au soir. Le message qui y était griffonné disait : « Où est Alexander Wyville, ton mari ? Tuer est félonie, et l’on pend les félons ! » À côté des mots, on avait tracé un grossier gibet. Mais ce qui glaçait Kathryn jusqu’au sang, c’était la silhouette aux longs cheveux maladroitement dessinée, en robe, qui était pendue à ce gibet. Le message disait encore : « Le silence est d’or, et l’or peut être déposé sur la tombe du Brave, au cimetière de Sainte-Mildred. » Kathryn froissa le papier avant de le remettre dans son sac. Elle avait reçu deux missives semblables depuis la mort de son père. Qui en était le sinistre auteur, se demandait-elle avec désespoir, et comment avait-il appris le secret du défunt docteur Swinbrooke ? À ce jour, elle n’avait pas payé, mais celui qui écrivait les lettres anonymes se faisait plus menaçant, plus insistant.
    Kathryn sursauta comme Thomasina arrivait dans son dos.
    — Il faut y aller, Maîtresse.
    Kathryn prit conscience des bruits autour d’elle : les cloches de la cathédrale surtout, couvrant le timbre plus sourd de celles des autres églises. À midi, avait précisé le magistrat dans son assignation. Kathryn retourna à la cuisine pour consulter la bougie des heures, dans le recoin sombre, près de la porte de la dépense. Elle força ses yeux, et vit : oui, le dixième cercle était déjà atteint. Elle était irritante, cette flamme qui dévorait son temps, lui prendrait peut-être sa liberté, peut-être aussi sa vie. Kathryn avala sa salive avec nervosité. Que lui voulait le magistrat ? Avait-il des questions à lui poser ? La convocation, marquée du sceau ordinaire de la ville de Cantorbéry, était brève et péremptoire. Kathryn devait se présenter devant le magistrat au Guildhall, mercredi à douze heures.
    — Que me veulent-ils ? murmura-t-elle pour elle-même.
    — Seul le Seigneur le sait, Maîtresse, chantonna Thomasina dans son dos. Vous connaissez le Conseil, cette assemblée de bâtards paresseux. On pourrait penser qu’ils ont de quoi s’occuper avec le maire qui est un fieffé traître et qui, dit-on, se tient caché. Les autres membres doivent souiller leurs cuissardes, vu qu’ils soutenaient la maison de Lancastre ! Mais Édouard, le garçon aux cheveux d’or, a brisé leurs espoirs.
    Kathryn hocha la tête, s’adossant au linteau de la porte. Thomasina disait vrai ; c’était incompréhensible. Les hauts dignitaires du Conseil de Cantorbéry avaient soutenu la cause des Lancastre : le maire de la ville, Nicholas Faunte, avait même fourni des soldats à Falconberg, le général lancastrien qui tenait Londres. À présent, tout était perdu, Édouard d’York avait battu les lancastriens à Barnet, avant d’avancer vers l’ouest pour capturer Marguerite, leur reine, à Tewkesbury. La guerre était finie. Les York avaient gagné, les Lancastre avaient perdu, Cantorbéry aussi. Son maire, Nicholas Faunte, avait été déclaré traître, sa tête était mise à prix, et la cité redoutait de perdre ses libertés. Alors pourquoi le premier magistrat s’intéressait-il à Kathryn ? Le Conseil avait certainement assez à faire avec la fin de la guerre.
    Thomasina vint se placer face à sa maîtresse, fixant son visage triste avec une feinte irritation, pour mieux cacher la compassion qu’elle lui inspirait. Kathryn n’était pas au mieux de sa beauté, certes non ! Sous sa chevelure noire comme le jais, son visage était devenu
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