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Meurtres dans le sanctuaire

Meurtres dans le sanctuaire

Titel: Meurtres dans le sanctuaire
Autoren: C.L. Grace
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médecin loquace, aux yeux maintenant exorbités, au visage rouge congestionné, et qui haletait, étouffait, luttait pour sa vie. Puis il tomba, raide.
    Ainsi mourut Clerkenwell à Cantorbéry, et avec lui s’éteignirent ses prophéties sur la guerre à Tewkesbury, dans l’Ouest. La bataille avait duré tout le jour, Édouard d’York en sortait vainqueur. Les Lancastre étaient anéantis, et les soldats harnachés de rouge de la reine Marguerite et du duc de Somerset fuyaient le champ de bataille détrempé de sang. Ils refluèrent au-delà de l’abbaye de Tewkesbury, déferlant à travers les champs, cherchant désespérément un gué ou un pont pour franchir la Severn. À leurs trousses, les yorkistes hurlaient comme des loups, sous les bannières bleues portant le soleil d’or des York ou le sanglier rampant rouge de Richard, duc de Gloucester, frère du roi. Jurant, blasphémant, les lancastriens se précipitaient dans la rivière en une mêlée grondante. Bientôt les corps des noyés comblèrent les bas-fonds, et les vivants les piétinaient dans l’espoir d’échapper à la mort. Leurs ennemis s’étaient déployés tout autour ; ils poussaient des cris, rugissaient, jouant de leurs lances, de leurs épées, de leurs masses pour mieux transpercer, trancher, assommer. Ils n’épargnaient personne et bien vite l’eau de la rivière et les roselières des berges prirent la couleur rouge cramoisi du sang tout frais qui coulait à flots.
    Depuis la croupe d’une colline, Colum Murtagh observait le massacre. Il fit tourner son cheval bai, ôta son heaume qu’il jeta sur le sol, maudissant la sueur qui trempait ses cheveux noirs et lui obscurcissait la vue. Armé seulement d’une épée et d’une dague, ne portant qu’un justaucorps en cuir, il ne participait pas au combat. Dieu soit loué, il n’avait pas le devoir de tuer. Le roi avait été clair. Avec les autres messagers royaux, il devait rester à l’écart pour transmettre les ordres entre les batailles. Et si l’ennemi était en déroute, il lui incombait de surveiller dans quelle direction s’enfuyaient ses chefs. Murtagh porta son regard sur la rivière dont l’eau miroitait dans le soleil, et il flatta le col de sa monture.
    — Ce sont les pauvres qui meurent là, murmura-t-il, c’est le petit peuple que l’on assassine.
    Il observait la mêlée, cherchant les bannières, les couleurs et les livrées des grands seigneurs lancastriens, mais il n’en voyait point. Se détournant, il regarda de nouveau la grandiose abbaye. Où étaient donc Somerset et ses pairs ? Murtagh força ses yeux verts, pareils à ceux d’un chat, pour mieux scruter les mouvements qui s’opéraient sur les chemins sinuant dans la campagne. Un éclair de couleur accrocha son regard. Il le suivit. C’est alors qu’il les repéra : une petite compagnie de cavaliers sans bannière ni livrée, heaumes et armures pendant à leur flanc, qui galopaient sur les terres de l’abbaye, tournant le dos à la bataille. Un autre espion ne leur aurait pas prêté attention, les prenant pour des chevaliers de moindre lignage qui fuyaient pour se mettre à couvert. Mais Murtagh s’y connaissait en chevaux, et ceux-là étaient les meilleurs. Il fit pivoter le sien et l’éperonna pour descendre au galop vers les chefs de la maison d’York réunis au croisement de deux petites routes, autour de leur roi aux cheveux blonds. Ils se tournèrent en entendant arriver le cavalier lancé à vive allure. Murtagh sauta de son cheval et, tombant à genoux devant le roi, indiqua un point au-delà des haies.
    — Sire, dit-il en haletant, les chefs de Lancastre et leurs hommes fuient vers l’ouest, du côté opposé à la rivière.
    Sous le heaume portant couronne, le visage dur d’Édouard d’York s’éclaira d’un sourire. Il fit claquer ses doigts et lança quelques ordres brefs à un chevalier banneret de sa maison avant de se tourner pour tapoter l’épaule de Murtagh.
    — Vous avez bien agi, Irlandais. La récompense est à vous.
    En fin d’après-midi, le massacre de la rivière avait pris fin. Les chefs de Lancastre, voyant que les forces ennemies coupaient leur retraite, avaient fait demi-tour pour chercher refuge dans la nef sombre et fraîche de l’abbaye de Tewkesbury. Cependant, comme l’écrivirent les chroniqueurs, c’était un temps de tueries, et les soldats yorkistes les y avaient suivis. Le fracas des épées, les hurlements des combattants et les
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