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Meurtres dans le sanctuaire

Meurtres dans le sanctuaire

Titel: Meurtres dans le sanctuaire
Autoren: C.L. Grace
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gémissements des blessés et des agonisants avaient eu raison du silence des lieux.
    Enfin les lancastriens atteignirent le sanctuaire et, s’agrippant à l’autel, ils supplièrent l’Église de leur accorder sa protection. Le prieur apparut en personne, portant la croix d’or de sa charge, menaçant d’excommunication quiconque souillerait de sang l’enceinte sacrée.
    Les soldats yorkistes se retirèrent de mauvaise grâce, mais le roi Édouard avertit l’abbé : si on ne lui remettait pas les prisonniers, l’abbaye serait assiégée. Les chefs lancastriens sortirent enfin, hagards, dépenaillés, blessés, ensanglantés de la tête aux pieds. Ils ne demandèrent pas une grâce qui, ils le savaient, ne leur serait pas accordée. Richard de Gloucester, le propre frère du roi, un homme hirsute et légèrement bossu, fut désigné pour être leur juge. Il installa un tribunal sommaire aux portes mêmes de l’abbaye. Les ennemis du roi comparurent un par un, tous furent condamnés, et au coucher du soleil on les poussait sur le billot d’un échafaud de fortune dressé à Tewkesbury, en place du marché. Là, on leur trancha la tête.
    Colum Murtagh observa la première exécution depuis la fenêtre d’une auberge, puis se détourna, écoeuré. Il avait rempli sa mission. D’autres besognes l’attendaient, heureusement loin du carnage du champ de bataille. Il fouilla sa besace pour y palper les deux mandats soigneusement pliés. Le premier le faisait gardien des chevaux du roi dans les champs autour de Cantorbéry. Le second l’investissait de pouvoirs afin d’enquêter et de faire rapport sur ces horribles meurtres par le poison perpétrés dans la ville. Murtagh s’allongea sur le lit de camp, s’efforçant de ne pas entendre le bruit sourd de la hache du bourreau. Il irait à Cantorbéry, y serait à l’abri de la guerre, et peut-être aussi des Chiens d’Ulster et de leurs complots incessants contre lui.

 
    Chapitre premier
    — Ce qu’il vous faut, c’est un homme.
    — J’en ai un. Je suis mariée.
    Kathryn Swinbrooke regarda d’un oeil indigné le visage blême et gras de Thomasina.
    Celle-ci essuya avec un torchon la sueur sur son front et ses joues rebondies. Posant son couteau au milieu des abattis de la volaille qu’elle venait de découper, elle eut un sourire entendu.
    — Je vous connais depuis que vous étiez haute comme trois pommes, Maîtresse. Oh oui, vous êtes mariée, mais votre mari est parti à la guerre, il s’est enfui, et le méchant bâtard ne reviendra pas.
    Thomasina renifla avec mépris.
    — Il vous faut un homme. Une femme n’est pas heureuse quand elle n’a pas un homme entre ses cuisses. Je le sais, moi, qui ai été mariée trois fois.
    Kathryn détourna les yeux et sourit. On imaginait difficilement un homme entre les cuisses épaisses comme des troncs d’arbre de Thomasina.
    — Portaient-ils des cottes de mailles ? demanda-t-elle dans un murmure.
    — Que dites-vous ?
    — Rien, Thomasina.
    Kathryn rassembla ses cheveux noirs à peine striés de gris et les glissa sous sa coiffe de lin blanc dont elle ajusta le cordon rouge pour la maintenir en place. Elle promena son regard sur la cuisine dallée de pierre. Nul doute, Thomasina s’était levée à l’aube, car la pièce était parfaitement nettoyée, le sol brillait d’un éclat pâle, la surface de la table était douce au toucher pour avoir été lavée à grand renfort de baquets d’eau chaude ; quant aux poêlons en bronze et aux crochets à viande pendus au-dessus du feu, ils luisaient comme de l’or bruni. En soupirant, Kathryn se leva pour chausser des sandales sans attache et souleva le bas de sa robe de laine verte, car le sol était encore un peu humide après le nettoyage de Thomasina.
    — ParlestripesdeSatan !marmotta celle-ci.
    Elle venait de se rappeler le pain qui cuisait dans le petit four, près du feu, et s’en approcha de sa démarche dandinante, une cuiller en bois à la main, tout en appelant Agnes, la jeune fille de cuisine, pour qu’elle vienne l’aider. Kathryn s’immobilisa devant la porte entrouverte avant de sortir sous le porche en bois pour contempler le jardin. Il fut un temps où elle l’aimait tant, ce jardin ! Elle adorait l’odeur douce de l’herbe, les levées de terre où poussaient des fleurs sauvages, et les carrés de plantes médicinales et aromatiques soigneusement tenus. Oui, elle aimait le jardin, surtout en cette saison, par les
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