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Madame Catherine

Madame Catherine

Titel: Madame Catherine
Autoren: Franck Ferrand
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pensé qu’une visite aussi marquante, aussi peu attendue que celle de la duchesse d’Étampes, aurait tiré Françoise de sa léthargie. Il n’en fut rien. La duchesse l’avait pourtant abordée avec entrain.
    — Chère petite, quelle joie c’est pour moi !
    — Bonjour, madame.
    On ne put rien tirer de plus de la malheureuse.
    — Allons, s’impatienta Simon. Ne reconnais-tu pas Madame d’Étampes ?
    — Si, je la reconnais bien, répondit Françoise en esquissant une courbette.
    — Madame, se lamenta l’ancien écuyer, il faut l’excuser : ma nièce a subi trop de misères dans sa courte existence ; son esprit n’a pas résisté.
    — Je la trouve en tout cas bien belle, et reposée, complimenta la duchesse.
    Mais elle ne put tout à fait dissimuler son émotion devant un spectacle aussi triste. Vint le moment gênant où l’hospitalité la plus élémentaire allait devoir contraindre Simon à prier la visiteuse d’entrer dans une maison indigne d’elle ; c’était compter sans l’élégance native de la dame.
    — Si nous faisions quelques pas vers ce lac ? proposa-t-elle en glissant, dans un geste aussi familier que noble, son bras sous celui de Coisay.
    Il opina du chef, gagné soudain par une obscure nostalgie des politesses de cour... Il se rappelait, tandis qu’ils foulaient d’un pas absent des jonchées de feuilles mortes, tout un chapelet de scènes d’autrefois, de moments desséchés par le temps – à commencer par cette incroyable nuit de plaisir qu’ils avaient connue ensemble, à Lyon, avec le pauvre Montecucculi {71} . C’était un quart de siècle plus tôt.
    — Je suis navré que ma nièce...
    — Ainsi nous avons un nouveau roi, coupa-t-elle pour alléger la conversation.
    — C’est ce qu’on m’a dit. Mais en vérité, nous vivons ici loin de tout... Les nouvelles qui nous parviennent ont désormais un règne de retard.
    Simon exagérait. Il n’avait jamais pu se couper tout à fait du monde ; et même au temps où il avait vécu, convers, chez les moines d’Ourscamp, ses antennes étaient demeurées sensibles aux moindres nouvelles de la Cour. Rentré d’Amboise avec sa nièce, il avait donc, depuis son village, appris la convocation des états généraux, à Orléans, l’arrestation et la condamnation à mort du prince de Condé, le sauvetage inespéré de ce dernier par la maladie, et la mort rapide du petit roi François II, emporté dans d’atroces souffrances... Il avait, auprès d’anciens amis de son frère, suivi surtout le cours des affaires religieuses, à commencer par l’adhésion globale des Protestants de France au calvinisme.
    Anne de Pisseleu ramassa une grosse feuille mordorée, qu’elle fit distraitement tourner entre ses doigts.
    — La reine Catherine s’est vu confier la régence pendant toute la minorité de Charles IX. Désormais, elle n’est plus la reine mère, mais bien la souveraine de ce pays... François I er l’avait percée ; il me disait toujours qu’elle deviendrait une grande dame.
    Ils étaient parvenus, à pas lents, jusqu’aux berges de l’étang des Mousseaux, d’où l’on apercevait, au loin, le manoir de Coisay.
    — Votre véritable maison..., soupira la duchesse.
    — Non, rectifia doucement le gentilhomme. C’était celle de mon père, celle de mon frère. Mais je ne m’y suis jamais senti chez moi... Ma vraie maison est ici.
    D’un oeil enveloppant, il désignait le paysage d’automne.
    Quelque temps après cette visite tout empreinte de nostalgie, Françoise avait rompu le morne cours de leur survie. Par un jour venteux de novembre, Nanon l’appela, comme de coutume, pour un dîner toujours frugal. La jeune femme ne répondit pas. Simon prit le relais, appela vers les bois, vers l’étang.
    — Françoise ! Françoise ?
    Comme elle ne répondait pas davantage, il sentit l’angoisse le gagner et, sellant sa jument – seul vestige encore digne de son passé d’écuyer –, entreprit d’inspecter les environs.
    — Françoise, mon petit, réponds-moi !
    Ne lui revint que l’écho. Simon de Coisay mobilisa la communauté villageoise ; on rassembla les chiens, on s’équipa de torches et de lanternes ; et dans le soir qui tombait s’organisa une vaste battue.
    — Françoise ! Françoise ! criaient jusqu’aux enfants, avec une familiarité que l’urgence de la situation paraissait justifier.
    C’est l’aide du maréchal-ferrant qui la retrouva, pelotonnée sur
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