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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits
Autoren: Gary Jennings
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qu’en Occident nous
nommons la Voie lactée la « rivière des Cieux » ?
    On pouvait aussi voir sur la rivière Jaune nombre de
chalands peu profonds, ou sampans, dont les équipages n’étaient autres que des
familles qui usaient de l’embarcation à la fois comme maison, moyen de
transport et moyen de subsistance. Les hommes remontaient le courant à la rame
ou en halant le sampan, le pilotaient dans le sens du courant, chargeaient ou déchargeaient
la marchandise. Les femmes semblaient perpétuellement absorbées à faire la
cuisine ou à s’occuper du linge. Parmi eux s’ébattaient une foule d’enfants des
deux sexes, nus comme des anges, à l’exception d’une gourde attachée à la
taille qui leur servait de bouée s’ils venaient à choir dans l’eau du fleuve,
ce qu’ils faisaient régulièrement.
    On pouvait aussi y voir des navires beaucoup plus
imposants propulsés à la voile. Quand je demandai à nos guides comment on les
appelait, les Mongols répondirent d’un ton indifférent ce qui ressemblait au
mot chunk. Le mot Han correctement prononcé, je l’appris ensuite,
est chuan, mais c’est le terme général pour qualifier n’importe quel
navire. Je n’ai jamais appris les trente-huit noms qui servent à désigner, ici,
les trente-huit types de chunk qui peuvent prendre la mer ou remonter
une rivière.
    Le plus petit d’entre eux approche néanmoins la taille
d’un cog flamand, avec un plus faible tirant d’eau, et ils me parurent au
début ridiculement encombrants, un peu à la façon de gigantesques chaussures
flottantes. Je ne tardai pas à m’apercevoir, toutefois, que la forme des chuan, contrairement à la plupart de nos vaisseaux, n’est pas modelée sur celle du
poisson pour bénéficier de sa célérité. Elle s’inspire plutôt du canard dont la
stabilité sur l’eau est exemplaire. Or je fus à même de constater la sérénité
avec laquelle ils se maintenaient, même sur les tumultueux tourbillons et dans
l’écume des eaux agitées de la rivière Jaune. Peut-être parce qu’il est à la
fois lent et massif, le chuan n’est dirigé que par un seul gouvernail,
et non deux comme sur nos navires. Situé à mi-hauteur sur la poupe, celui-ci ne
requiert qu’un barreur. Ses voiles sont également fort curieuses : loin
d’être destinées à se gonfler sous le vent, elles sont striées par intervalles
de lattes de bois, ce qui leur donne un peu l’allure d’ailes de chauve-souris.
Et quand vient le moment de rentrer de la toile, il n’est pas nécessaire, comme
pour nos voiles, de prendre des ris en nouant leurs garcettes : un peu à
la façon de nos stores vénitiens, elles se replient sur elles-mêmes, latte par
latte.
    De toutes les embarcations que je vis sur cette
rivière, cependant, la plus spectaculaire fut sans conteste une petite yole
propulsée à la rame, le hu-pan, dont la forme en croissant n’avait
absolument rien de symétrique. Il est vrai que nos gondoles vénitiennes ont
elles aussi une certaine cambrure pour intégrer le fait que le gondolier pagaie
toujours du côté droit, mais la courbure de leur quille reste si légère qu’elle
est presque imperceptible. Ces hu-pan étaient aussi arqués qu’un
cimeterre shimshir posé sur sa tranche, et, une fois encore, c’était
uniquement dans un but pratique. Un hu-pan voyage toujours très près de
la berge, et celle-ci étant découpée suivant un relief plutôt irrégulier, le
pilote, présentant au rivage sa partie convexe ou concave, n’en suit que plus
aisément les caps ou les creux. Bien sûr, ce rameur doit sans arrêt faire
demi-tour, suivant que la rivière s’incurve dans un sens ou dans l’autre, aussi
sa progression irrégulière ressemble-t-elle un peu à celle d’une araignée
d’eau.
    J’eus bientôt, de toute façon, une autre énigme sur
laquelle me pencher : sur la terre ferme, cette fois, et non plus sur la
rivière. Près d’un village nommé Zong-zhai, nous tombâmes sur la ruine, déserte
et en grande partie éboulée, de ce qui devait avoir été jadis un substantiel
édifice de pierre flanqué de deux hautes tours de guet. Notre cavalier
d’escorte Ussu me dit que là avait existé, au temps de quelque lointaine
dynastie, une forteresse han, toujours appelée les portes de Jade, son ancien
nom. Cette forteresse n’avait en fait rien d’une porte et n’était pas non plus
bâtie de jade, mais elle constituait l’extrémité ouest d’un mur
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