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Les Poilus (La France sacrifiée)

Les Poilus (La France sacrifiée)

Titel: Les Poilus (La France sacrifiée)
Autoren: Pierre Miquel
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impérialiste, du commerce.
    Où conduirait-il son pays ? Jusqu’au bout de la nuit où sombrait l’humanité. Il entraînait même les officiers de l’ancienne armée allemande dans cette guerre à l’est qui devait être aussi son tombeau. Car le succès de l’opération ne tenait pas qu’à la stratégie. Les Allemands entreraient dans des villes entièrement aux mains des soviets, purgées de leurs opposants par les moyens les plus brutaux, les plus sanguinaires. Contre l’envahisseur, le parti communiste développerait une propagande de résistance, animerait une lutte à mort. Qu’ils le veuillent ou non, les généraux allemands auraient devant eux l’appareil idéologique d’un État qui avait refusé d’adhérer aux accords internationaux de Genève sur le traitement des prisonniers. Comme l’empereur du Japon, Staline n’imaginait pas qu’il pût y avoir des prisonniers de l’Armée rouge en Allemagne. Il s’apprêtait à les considérer comme des déserteurs et à frapper leurs familles rendues responsables de leur indignité. Hitler comblerait ses vœux : deux millions et demi d’entre eux mourraient de faim et de maladie dans les camps.
    « La lutte qui va s’engager est une lutte d’extermination » prévient Hitler. Rien de comparable aux campagnes glorieuses de Hindenburg contre les généraux du tsar. D’entrée de jeu, le 13 mai 1941, quelques semaines avant l’opération Barbarossa, les généraux allemands reçoivent un nouveau décret relatif à la juridiction militaire en temps de guerre. Il précise les « mesures spéciales à exécuter par les troupes ». Une directive de Hitler, publiée le 6 juin, contient des instructions relatives aux commissaires politiques. L’armée doit isoler et exécuter immédiatement les responsables bolchevistes. Plus de conseils de guerre ni de cour martiale. Pas plus d’égards pour la population civile. Les actes délictueux commis par les soldats à l’égard des habitants ne seront pas nécessairement sanctionnés. Les généraux, recommande le Führer, doivent faire preuve d’un « manque total de pitié ».
    Brauchitsch et Halder tentent d’atténuer les instructions, redoutant qu’elles n’engendrent des désordres, mais ils ne démissionnent pas. Henning von Tresckow prétend sauver l’honneur de l’armée en protestant. Mais que peut le simple chef d’état-major d’un Fedor von Bock ? Avec Berndt von Kleist et le baron Rudolf-Christoph von Gersdorff, ces officiers contestataires risquent une démarche auprès d’un général adjoint de Brauchitsch qui les éconduit. À cela se borne, pour l’heure, la résistance au sein de l’armée.
    Dès lors les massacres peuvent se perpétrer, sous le couvert de la Wehrmacht. En attendant l’entrée en action des Einsatzgruppen de Himmler, qui expérimentent en Ukraine les camions à gaz contre les communistes et les Juifs, avant d’ouvrir les camps d’extermination où les ingénieurs et employés des chemins de fer allemands devaient convoyer les six millions de Juifs d’Europe promis par la conférence de Wannsee à la mort programmée.
    *
    Sans doute l’ancien chancelier Schmidt a-t-il raison de dire, quand on lui parle de l’exposition itinérante sur les crimes de la Wehrmacht qui a parcouru l’Allemagne en 1999, qu’il ne faut pas « inculper dix-huit millions de soldats de la Wehrmacht de crimes contre l’humanité ».
    Sans doute les SS et non la Wehrmacht étaient-ils présents à Auschwitz, mais combien d’exécutions sommaires et de crimes de guerre dans tous les pays occupés de l’Est, dans les Balkans, dans toute l’Europe, commis sous l’autorité de la Wehrmacht ? Les maréchaux von Reichenau et von Manstein estimaient que les opérations antijuives en Russie étaient des représailles nécessaires dans la guerre des partisans animée à l’arrière du front par Staline. Les commandos spéciaux étaient chargés de leur élimination. La lutte contre le communisme remplaçait dans la propagande, pour expliquer les exécutions sauvages d’une colossale ampleur ordonnées par les officiers allemands contre les populations suspectes d’aider les partisans, ce que les simples mesures contre-terroristes des officiers prussiens occupant la Belgique et la Lorraine en 1914, à une échelle infiniment plus modeste il est vrai, ne suffisaient plus à couvrir. L’alibi du communisme et de la longue série de massacres de l’Armée rouge dans la
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