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Les masques de Saint-Marc

Les masques de Saint-Marc

Titel: Les masques de Saint-Marc
Autoren: Nicolas Remin
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s’ouvrit dans un craquement. Après avoir enjambé le seuil, il se retrouva dans le grenier de la bibliothèque Marciana.
    L’atmosphère y était plus fraîche. Un léger courant d’air agitait les toiles d’araignée tendues entre les poutres. Tron comprit aussitôt à quoi tenait cette différence. L’une des trois lucarnes était entrouverte. Un morceau de bois coincé entre le cadre et le montant l’empêchait de se refermer. Sous la lucarne se trouvait une caisse en bois. Deux pas plus loin, il aperçut un anneau métallique vissé dans un imposant madrier. Au moment où il découvrit l’arme posée à terre devant la caisse, une voix retentit derrière lui.
    — Levez les mains en l’air sans vous retourner !
    L’inconnu n’avait pas haussé la voix, mais parlé sur un ton tranchant et résolu. Surtout, ses paroles avaient été précédées du bruit caractéristique d’un chien de revolver qu’on abaisse. Tron s’exécuta aussitôt. L’inconnu s’approcha de lui, fouilla sa veste et s’empara des menottes ainsi que de son arme.
    — Allez jusqu’à la poutre. Là, vous pourrez baisser les bras.
    Tron obéit. Il sentit qu’une moitié des menottes se refermait autour de son poignet tandis que l’autre était attachée à l’anneau métallique fixé au madrier. Alors, la voix dit :
    — Vous pouvez vous retourner, commissaire.
     
    L’homme debout sous la lucarne portait un uniforme de premier-lieutenant des chasseurs impériaux d’Innsbruck et l’observait, les sourcils légèrement levés. Son visage bien dessiné était rasé de près. Des mèches grises traversaient ses cheveux foncés qui commençaient à se raréfier en haut du front. Le rayon de lumière presque vertical au-dessus de lui accentuait le blanc immaculé de sa veste et soulignait les rides prononcées aux commissures de ses lèvres. Il avait glissé son revolver dans sa ceinture avec décontraction. Un tueur professionnel , se dit Tron, ne ressemble pas à cela, il a l’air plus froid, plus impitoyable. Il pensa à la mort de Zorzi afin d’éprouver du dégoût pour cet homme, mais sans succès.
    — Le commandant de police avait garanti au général d’artillerie que vous resteriez en dehors de cette histoire, commissaire, dit l’inconnu d’une voix calme après l’avoir dévisagé pendant un petit moment.
    Tron fronça les sourcils.
    — Vous savez qui je suis ?
    — En tout cas, vous n’êtes pas capitaine des hussards hongrois. Que voulez-vous ?
    — Vous suggérer de renoncer. L’attentat ne peut plus passer pour le fait de patriotes italiens. Trop de gens sont maintenant au courant de la conjuration au sein de l’armée.
    Un rapide sourire traversa le visage de l’inconnu. Puis il prononça des paroles que Tron ne comprit pas :
    — Il ne s’agit pas d’une conjuration au sein de l’armée, commissaire. Ma mission consiste à tirer sur l’empereur avec des balles à blanc.
    Et il ajouta avec un haussement d’épaules :
    — Rien n’accroît autant le prestige d’un souverain qu’un attentat manqué.
    L’espace d’un instant, Tron fut persuadé que l’homme venait de dire quelque chose d’absurde. Quelque chose qui n’expliquait ni les événements des jours précédents ni leur présence dans ce grenier. Son entendement finit pourtant par se raccrocher à l’expression de balles à blanc qui conféra soudain un sens à la phrase. Il parvint à refouler un éclat de rire hystérique, mais dut ravaler plusieurs fois sa salive avant de pouvoir parler.
    — Vous voulez dire que tous ces événements constituent…
    Il s’interrompit car il ne trouvait pas le mot juste.
    — Une mascarade, confirma l’inconnu d’une voix calme.
    D’accord, pensa Tron, il avait bien compris. Sauf que cette mascarade avait coûté la vie à deux personnes. Il toussota.
    — Voilà pourquoi Crenneville voulait nous tenir à l’écart ?
    L’homme hocha la tête. Puis, pour la deuxième fois, il prononça une phrase que Tron ne comprit pas tout de suite, qu’il ne comprit pas du tout. Il précisa sans élever la voix et sur un ton presque badin :
    — Cela étant, il ne pouvait pas savoir que vous aviez raison, commissaire.
    Que vous aviez raison, commissaire ? Tout à coup, Tron eut le sentiment désagréable que son entendement s’échappait de son crâne, traversait la lucarne et s’envolait avec lenteur dans le ciel bleu. Il inspira à pleins poumons et attendit qu’un sens quelconque résulte de
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