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Les Lavandières de Brocéliande

Les Lavandières de Brocéliande

Titel: Les Lavandières de Brocéliande
Autoren: Edouard Brasey
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son pas tranquille et son attitude respectueuse. Et puis, il avait si souvent remis des oisillons dans le nid d’où ils étaient tombés et posé des attelles aux pattes d’animaux blessés. La bienveillance ne s’oublie pas dans les bois, surtout lorsqu’un être humain en est l’auteur. La cruauté non plus, d’ailleurs. Les animaux ont davantage de mémoire que les hommes.
    Maëlle Le Borgne affectait de marcher à la même cadence que Yann, mais elle faisait deux pas lorsqu’il en marquait un. Âgée de quinze ans à peine, elle était la benjamine du groupe. Avec ses cheveux aile de corbeau, son teint mat de sauvageonne et ses yeux charbonneux, elle était l’exact opposé de Solenn. Belle aussi, à sa manière, ou plus exactement séduisante. Mais d’une séduction où entraient de la malice et de la rouerie. Si elle avait été fée, elle eût été Morgane.
    Hubert fermait la marche. Hubert de Montfort, le frère d’Edern, d’un an son cadet. Mais cette année faisait toute la différence. Hubert, bien que puîné, semblait le brouillon de son aîné, son ébauche grossière. Courtaud, lourdaud, il manquait de cette grâce et de cette assurance naturelles qui émanaient d’Edern comme la lumière émane du soleil. Hubert, lui, vivait dans l’ombre. L’ombre de son frère qui, à la naissance, avait été gratifié de toutes les qualités qu’il n’aurait jamais. Ce contraste et cette injustice avaient semé les germes de l’inconstance dans le caractère ombrageux du jeune homme. En lui, se côtoyaient l’admiration et la rancune, le désir de s’affirmer et le manque de confiance, l’envie d’aimer et d’être aimé et une forme de détestation de soi.
    Les sentiments que se portaient les cinq jeunes gens étaient à l’image de leur avancée dans la forêt. Hubert suivait Maëlle, qu’il convoitait sans oser la courtiser ouvertement. Maëlle, qui avait parfaitement saisi les sentiments d’Hubert, feignait de les ignorer en s’attachant aux pas de Yann, moins par attirance pour ce dernier que pour susciter chez son rival de la jalousie. Yann était trop simple, ou trop pur, pour discerner ces intrigues, et s’émerveillait sans arrière-pensées du couple radieux qui le précédait. Quant à Edern et Solenn, ils ne voyaient que leur amour.
    – C’est encore loin ? gémit Hubert qui suait dans sa chemise de lin et sa veste de velours noir.
    – C’est toujours les mêmes qui traînent la patte, ricana Maëlle, qui n’osait avouer qu’elle aussi trouvait le chemin long et la marche de ses aînés trop rapide.
    – Il faut traverser les landes de Lambrun en direction du hameau de Folle-Pensée. Là, on sera presque rendus, répondit Yann comme si une carte d’état-major était imprimée dans sa tête.
    Sans tourner la tête, Edern lança :
    – Je suis aussi impatient que toi d’arriver, mon frère. Mais ce n’est pas à cause de la fatigue…
    Il serra légèrement la main de Solenn qui ne put s’empêcher de rougir. Maëlle, qui n’avait pas les yeux dans sa poche, gloussa.
    – On ne peut pas s’arrêter un moment ? plaida Hubert. Elle ne va pas s’envoler, la fontaine…
    – Qui sait ? rétorqua Maëlle pour le taquiner. Il y a bien des sortilèges par là-bas. Le fantôme du chevalier noir y rôde à la nuit tombante. C’est ma grand-mère qui me l’a dit, et elle s’y connaît en racontailles.
    – Ta grand-mère, c’est une sorcière, grommela Hubert en se signant discrètement de la main droite.
    – Et j’ai hérité de ses pouvoirs ! clama Maëlle avec un air de défi. Tu veux que je te transforme en crapaud pour t’apprendre les bonnes manières ?
    La noiraude s’était plantée en travers du chemin, mains sur les hanches et fixait son timide prétendant d’un œil noir. Elle avait cessé de rire et semblait réellement fâchée.
    – C’est toujours pareil avec ces deux-là, constata Yann en soupirant. Toujours à se disputer pour des broutilles. Pires que chien et chat.
    – Il n’a pas à mal parler de ma famille ! se défendit Maëlle. Et puis, il y a des choses dont il ne faut pas se moquer. Ça attire le malheur.
    – Le recteur de Concoret, il a dit que tout ça, c’étaient des superstitions, marmonna Hubert, les yeux dirigés vers le sol pour ne pas croiser le regard de Maëlle.
    – Le recteur, il dit ce qu’il veut, renchérit la jeune fille, la voix brouillée par la colère. Et moi aussi, je dis ce que je veux. Il y
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