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Les foulards rouges

Les foulards rouges

Titel: Les foulards rouges
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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Repoussant de plus en
plus souvent cette lancinante question, « À quoi bon ? », antichambre
d’un abject renoncement à tout ce qui avait fait sa vie : maintenir le
royaume au niveau remarquable où l’avait hissé son prédécesseur Richelieu. Le
maintenir et, si possible, l’élever davantage encore pour le remettre un jour
entre les mains de Louis, Louis le quatorzième, petit garçon dont il espérait
faire un très grand roi.
    Alors peu importaient sa peine et sa fatigue. Il
ne s’accordait pas le droit à la fatigue, et voilà tout.
    — La cause est dite, l’affaire est close !
murmura-t-il.
    Et tant pis pour ses rêves personnels. Tant
pis pour l’amour qu’il vouait à la reine en laquelle bien souvent, trop souvent,
il ne voyait qu’une femme. Une femme qu’il aimait avec passion. Tans pis si, faute
de temps et de sérénité, cet amour qu’il souhaitait charnel n’avait pas, jusqu’alors,
dépassé le stade de la complicité… parfois très tendre.
    Mais, pour durer, il fallait vivre. Or, au
plus fort des barricades, en août, on avait voulu le tuer en le Palais-Royal !
    Si les quatre tueurs, dont il se demandait
encore qui les avait payés, étaient arrivés à leurs fins !…
    Au reste, prodigieusement renseignés comme ils
se trouvaient, ils auraient dû réussir. Sans un fabuleux hasard !
    Mazarin revit la scène. La porte dérobée par
laquelle il avait quitté les appartements de la reine, après s’être secrètement
entretenu avec elle des graves événements. Le père Angello qui l’attendait en
un sombre couloir. Enfin, cette galerie déserte où ils débouchèrent sans
méfiance…
    Les quatre hommes avaient surgi de derrière
les piliers, l’épée à la main.
    Mazarin, sans armes, s’était tourné vers le
père Angello qui sortit des plis de sa soutane… un crucifix !
    C’était bien peu, et presque de grande
drôlerie, n’était le caractère gravissime de l’affaire. D’autant que le
cardinal croyait en Dieu, certes, mais… « raisonnablement » !
    Et puis brusquement, comme si le crucifix
brandi se révélait finalement de quelque effet, il y avait eu cette haute
silhouette sombre, bottée jusqu’aux genoux, le feutre à plumes au bord rabattu
sur les yeux, une longue cape noire sur les épaules…
    À ne pas croire.
    Pour son seul plaisir, oubliant un instant l’homme
– le même, précisément – qu’il attendait, Mazarin revécut par la pensée la
suite des événements…

3
    Il s’avéra plus tard, ce qui augmenta
considérablement ses mérites, que l’homme à la longue cape noire grelottait de
fièvre après un long voyage qui l’amenait des champs de bataille du Nord.
    S’immobilisant, les quatre assassins, surpris,
avaient regardé le nouvel arrivant.
    — Nous allons saigner le porc italien !
avait lancé l’un d’eux.
    Un autre, d’un ton joyeux, demanda :
    — Es-tu des nôtres, camarade ?
    Mazarin, qui se savait impopulaire parce que
incompris, ne doutait pas que l’inconnu surgi par hasard se joindrait à cette
racaille.
    Presque résigné, il vit l’homme faire
tournoyer sa longue cape noire et ôter avec beaucoup d’élégance son feutre
marine orné de plumes d’un blanc immaculé et d’un rouge couleur de sang avant
de porter la main à son épée.
    Quelque chose intriguait chez le nouveau venu.
Il se dégageait de lui une impression de force redoutable, un charme étrange et, a contrario, il engendrait une crainte indéfinissable.
    Mais qu’en pouvait-on dire ?
    Un homme de haute taille, aux larges épaules
et au torse puissant. Les cheveux déjà grisonnants, devenus plus rares
au-dessus du front et simplement tirés en arrière en catogan. Un visage aux
joues creuses, aux pommettes saillantes. Visage rendu plus inquiétant encore
par des yeux très noirs, très fixes. Un regard d’une dureté qui inspirait la
crainte.
    Mais, décidément, chez cet homme de contrastes,
rien ne semblait acquis puisqu’un sourire, à peine ébauché mais des plus
charmants, atténua l’impression première.
    Et, derrière le sourire, lorsqu’il parla, des
dents très blanches qu’on eût dit d’un tout jeune homme avec cette curiosité en
la mâchoire supérieure des deux dents du milieu très écartées, rareté que les
superstitieux appellent « dents du bonheur ».
    L’inconnu, l’épée à la main, fit face aux
quatre agresseurs :
    — Messieurs les assassins, quatre contre
un cardinal désarmé et un vieux
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