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Les amours du Chico

Les amours du Chico

Titel: Les amours du Chico
Autoren: Michel Zévaco
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sain et sauf. Mais le Chico baissa à ses
yeux et reperdit une notable partie du terrain acquis. Juana lui en
voulait de s’être effacé et sacrifié. Dans sa logique spéciale,
elle se disait que, elle, elle ne se serait pas sacrifiée et aurait
défendu son bien du bec et des ongles. De là l’accueil frigide
qu’elle fit au nain.
    Or Pardaillan raconta que le nain s’était défendu comme un beau
diable et avait voulu le poignarder, lui, Pardaillan. Du coup, les
actions du Chico montèrent. Pourquoi rêver de chimères ? Le
bonheur était peut-être là. Ne serait-ce pas folie de le laisser
passer ? De là le revirement en faveur du nain. De là ce
tête-à-tête. Il fallait que le Chico se déclarât. Et voilà qu’elle
se heurtait à sa timidité insurmontable. Elle enrageait d’autant
plus que malgré elle, tout en s’efforçant de l’amener à
composition, elle ne pouvait s’empêcher de songer à Pardaillan, et
il lui semblait que lui n’eût pas tant tergiversé. De là sa rage et
sa colère contre le Chico, de là ce désir furieux de le maltraiter,
de l’humilier.
    Donc le Chico, au lieu de s’indigner devant son impudente
dénégation, après être resté un long moment perplexe et silencieux,
courba l’échine, accepta la rebuffade et parut s’excuser en disant
doucement :
    – J’ai fait ce que tu m’as demandé, et Dieu sait s’il m’en
a coûté ! Pourquoi es-tu fâchée ?
    Ainsi voilà tout ce qu’il trouvait à dire. Ah ! si elle
avait été à sa place, comme elle eût vertement relevé
l’impertinente prétention de celui qui eût voulu la faire passer
pour une sotte et se fût gaussé à ce point d’elle. Décidément, le
Chico n’était pas un homme. Il resterait éternellement un enfant.
Quelle aberration avait été la sienne de croire un instant qu’un
enfant pourrait parler et agir comme un homme ! Et sa fureur
s’accrut, d’autant plus qu’elle était peut-être encore plus
mécontente d’elle même que lui. Et cette, pensée, fugitive qu’elle
avait eue de l’amener à se prosterner, à lécher ses semelles, tout
pareil a un chien couchant, cette pensée lui revint plus précise,
prit la forme d’un désir violent, se changea en obsession tenace,
tant et si bien qu’elle résolut de la réaliser coûte que coûte.
    Pour réaliser cet impérieux désir, elle radoucit son ton en lui
disant :
    – Mais je ne suis pas fâchée.
    – Vrai ?
    – En ai-je l’air ? fit-elle en lui adressant un
sourire qui l’affola.
    En disant ces mots, tout à son projet, elle croisa négligemment
une jambe fine et nerveuse, moulée dans un bas de soie rose, sur
l’autre, et tout en lui souriant, elle agitait doucement son pied
qui arrivait à hauteur de la poitrine du nain. Et elle regardait ce
pied complaisamment comme une chose qu’on trouve jolie, puis elle
regardait le Chico, comme pour lui dire : « Embrasse-le
donc, nigaud ! »
    Et ce petit pied, finement chaussé de mignons souliers en cuir
de Cordoue souple et parfumé, richement brodés, tout neufs, ce
petit pied se balançant mollement à quelques pouces de son visage,
fascinait le petit homme et une envie folle lui venait de le
prendre, de l’étreindre, de l’embrasser à pleine bouche. Et le
petit pied allait, venait, s’agitait, lui présentait la semelle,
très blanche, à peine maculée, lui répétait dans son langage
muet : « Mais va donc ! va donc ! »
    Si bien que le Chico ne put résister à la tentation, et comme
elle souriait encore, preuve qu’elle n’était pas fâchée, il se
laissa tomber sur les genoux.
    Elle eut un sourire qu’il ne vit pas, un sourire où il y avait
la joie du triomphe assuré et aussi un peu de pitié dédaigneuse
tandis que dans son esprit elle clamait : « Tu y
viendras ! Tu y viens ! ».
    Et le petit pied, dans son balancement, vint lui effleurer le
visage. Car le mouvement de va-et-vient continuait comme si elle
n’eût pas remarqué qu’ainsi agenouillé elle lui touchait la figure.
Et toujours c’était la semelle qui se présentait à lui, qui lui
frôlait le front, les joues, les lèvres, au hasard, comme pour
dire :
« 
C’est là que tu poseras tes lèvres, là
où c’est maculé, là seulement. »
    Du moins c’est ce que traduisit le Chico. Mais c’était un
incorrigible timide que ce pauvre Chico. La pensée de toucher à ce
petit pied sans son autorisation à elle ne lui venait même pas.
Qu’eût-elle dit ? Tiens ! ;
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