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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise
Autoren: Michel Zévaco
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de court.
    « Vous êtes mon prisonnier, reprit Roland. Et je vais vous
appliquer le traitement même que vous m’eussiez appliqué si le
hasard m’avait fait votre prisonnier.
    – Je ne feindrai pas plus longtemps, dit alors Guido
Gennaro. Je suis en effet celui que vous dites. Je me borne donc à
vous demander quel traitement vous prétendez
m’appliquer ? »
    Le chef de police avait repris tout son sang-froid.
    « Je suis perdu, songea-t-il, mais je ne mourrai pas comme
un imbécile. Montrons à cet adversaire que je suis digne de lui.
Une suprême joute de ruse et d’audace n’est pas une banale
agonie. »
    On conviendra que l’homme qui, en de si terribles circonstances,
était capable de penser et de combiner avec une pareille lucidité,
ne manquait pas de courage.
    « Qu’auriez-vous fait de moi, si vous m’aviez pris ?
demanda Roland.
    – Je vous eusse livré au tribunal. Là s’arrêtait ma
mission.
    – Et qu’eût fait de moi le tribunal ?
    – Il vous eût livré au bourreau, répondit Gennaro.
    – Et qu’eût fait de moi le bourreau ?
    – Il vous eût tranché la tête à moins qu’il ne se fût
contenté de vous aveugler. Mais je crois sincèrement que vous
auriez eu la tête tranchée. J’ajoute qu’on n’eût pas attendu, cette
fois. Pris maintenant, vous auriez été jugé cette nuit même, et dès
demain matin, l’échafaud se fût dressé pour vous. »
    Guido Gennaro avait tenu le langage qu’il croyait le plus propre
à impressionner fortement Roland.
    Il cherchait avidement sur la physionomie de Roland les traces
de cette émotion qu’il espérait provoquer.
    Mais cette physionomie demeurait impénétrable, d’une froideur
telle que le chef de police, détournant son regard, sentit le
premier frisson d’angoisse mortelle grimper à sa nuque.
    Il se répéta :
    « Je suis perdu. »
    Mais cette fois, aucune pensée de bravade ne vint le
réconforter. Il attendit la parole qui allait tomber des lèvres de
Roland.
    Et cette minute de silence fut poignante.
    Roland suivit d’un œil attentif les dégradations successives qui
faisaient passer le regard de Gennaro de l’audace à la fermeté, de
la fermeté à l’indécision, et de l’indécision à la terreur.
    Ce fut quand il le vit dans cette dernière phase qu’il
prononça :
    « Guido Gennaro, vous êtes venu m’attaquer chez moi sans
que je vous aie jamais fait le moindre mal.
    – Je voulais sauver l’État, c’était mon devoir.
    – Dites que vous vouliez vous présenter au Conseil des Dix
ma tête à la main, et pour prix de cette tête que vous lui eussiez
jetée, lui réclamer sans doute quelque faveur nouvelle. Me suis-je
trompé ?
    – Eh bien, non ! Vous ne vous trompez pas, s’écria
Gennaro, l’ambition m’a poussé en effet. »
    Un rapide et insaisissable éclair de joie passa dans les yeux de
Roland. Mais le chef de police ne s’en aperçut pas.
    « Donc, reprit Roland, vous m’avez attaqué. Vous êtes
vaincu. Vous m’auriez livré au tribunal de la république. Je vais
vous livrer au tribunal de la montagne qui vous jugera selon des
lois plus justes que celles que vous m’auriez appliquées.
    – Le tribunal de la montagne ? » murmura Guido
Gennaro.
    Il ne connaissait que trop cette redoutable institution qui
fonctionnait dans les montagnes de la Piave.
    « Dites-moi tout de suite que vous voulez me faire
tuer !
    – Le tribunal jugera », répondit Roland.
    À ce moment, on gratta au volet d’une façon spéciale.
    « Entre ! » fit Roland.
    L’homme que nous avons entrevu sous le cèdre du jardin se montra
dans l’entrebâillement de la porte et dit :
    « Monseigneur, il est temps.
    – C’est bien, partons », répondit Roland qui, d’un
coup d’œil, désigna le chef de police à Scalabrino.
    Roland se mit en marche sans plus s’occuper de son
prisonnier.
    Scalabrino, d’une main, avait empoigné Gennaro par le bras, et
de l’autre avait tiré sa dague, en disant :
    « Un cri, un geste, et vous n’aurez pas la peine d’être
jugé.
    – C’est bon, fit Gennaro, je me tairai. »
    Au moment où Roland passa près de l’église, onze heures
sonnèrent.
    La petite troupe, Roland en avant, Gennaro entre ses deux
gardes, atteignit le canal. Parmi les gondoles amarrées à quai, une
seule avait encore son fanal allumé – un petit fanal rouge placé au
bout recourbé de la proue.
    Roland marcha jusqu’à cette gondole et fit entendre
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