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L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan
Autoren: Arnaud Delalande
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continuait.
    Nous sommes des anges déchus.
    —  Aimery, murmura
Héloïse, les yeux perdus dans les flammes.
    Elle crut l’entendre crier une dernière fois, rassemblant
ses forces :
    —  Héloïse !
    Les hérétiques virent leurs pieds réduits
en cendres. Leurs muscles craquaient ; leur peau se consumait comme du
cuir ; leur moelle et leur sang sifflaient, leurs membres devenaient des
bâtons desséchés et noircis, les os de leurs jambes pendaient au milieu des
flammes montantes. Ces volutes infernales atteignaient leurs cheveux, les
couronnaient un instant d’une aura incandescente, transformant leur tête en
boules de chair en fusion, leurs yeux fondant dans leurs orbites. S’ils
ouvraient encore la bouche, c’était pour avaler du feu ; s’ils la
fermaient, c’était pour sentir ce feu à l’intérieur d’eux-mêmes. Ils n’étaient
plus que des torches vivantes. Ils brûlaient, ils brûlaient ! Et l’on
chantait.
    Aguilah avait fait placer Héloïse non
loin de lui. Oui, il n’était qu’à quelques mètres.
    La jeune femme tourna lentement les yeux vers
l’évêque.
    Elle pencha légèrement la tête. Elle semblait
maintenant avoir perdu toute raison.
    Elle chercha la bible à ses côtés.
    Et, sous les doigts de sa main gauche, au
creux de sa paume moite, elle sentit le manche de la dague qu’elle avait
apportée avec elle. Elle avait pensé écourter ainsi leur souffrance, lorsqu’ils
seraient à l’intérieur de la palissade. Elle n’en avait pas même parlé à Aimery.
    Elle entendit un cri et leva la tête.
    Là-haut, par-dessus les flammes, le faucon
pèlerin d’Aimery tournoyait dans le ciel. Il n’osait s’approcher des flammes. Il
se contentait de décrire des cercles dans l’espace…
    Amor… Les âmes brûlées, murmura-t-elle pour elle-même.
    Son capuchon noir, les pans de sa robe
tremblaient dans le vent.
    Puis ses yeux revinrent se poser sur Aguilah.
    La dague était chaude au creux de sa main. Comme
ce contact, soudain, était doux.
    Escartille ferma les yeux pour chasser l’horreur
de son esprit.
    Un moment, il fut saisi de vertige, lorsqu’il
laissa cette terrible pensée effleurer son esprit – ça y est, c’est fini, nous
sommes seuls, ils les ont tués et je les ai laissés mourir. Il eut envie, un
bref instant, de lâcher prise.
    On avait jeté une seconde corde, quelques
centaines de mètres restaient encore à parcourir.
    Il regarda le vide, comme absorbé par cette
perspective vacillante. Sa tête lui tourna, ses yeux chavirèrent. Il sentit ses
forces l’abandonner.
    Il glissa.
    Non ! Non !
    Son pied se balança dans le néant. Des
cailloux roulèrent et furent avalés par le gouffre. Escartille faillit perdre l’équilibre.
Il s’agrippa soudain à la corde comme un damné, après avoir glissé de presque
un mètre. Il gémit, le front contre la paroi grise, cette pierre froide et
tranchante. Le menton baissé vers le berceau de Pierre contre son ventre, il
tenta de reprendre sa respiration.
    Le feras-tu ?
Le feras-tu, Héloïse ?
    Elle contemplait le bûcher.
    Une main oscillait sur le pommeau de sa dague,
l’autre sur sa bible.
    Pique l’aiguille.
    Attirés encore comme par un aimant, ses yeux
allaient du bûcher à Aguilah, qui ne se lassait pas du spectacle des flammes
montant vers le ciel.
    L’amour ou la mort, Héloïse ?
    L’amour, la mort… Ou la seule
réconciliation possible…
    Les deux ?
    Et une voix s’éleva par-dessus les
cantiques.
    Une voix de femme, pure, limpide, cristalline,
qui semblait jaillir de nulle part.
    Elle lisait un texte de saint Paul.
    L’œil de l’évêque Aguilah s’alluma comme celui
d’un aigle. Il était revêtu d’une chasuble de lin, une tiare rutilante vissée
sur le crâne. Sa main était serrée sur le sceptre qui témoignait de son pouvoir.
Autour du cou, son étole dansait, malgré les paravents pourpres disposés de
part et d’autre de son fauteuil tendu de velours. Aguilah détourna la tête, ce
visage anguleux et taillé à la serpe, moucheté d’imperceptibles scories. Il
était soudain inondé d’une haine sans bornes.
    … Et je vais encore vous
montrer une voie qui les dépasse toutes. Quand je parlerais les langues des
hommes et des anges, si je n’ai pas l’amour, je ne suis plus qu’airain qui
sonne ou cymbale qui retentit. Quand j’aurais le don de prophétie et que je
connaîtrais tous les mystères et toute la science, quand j’aurais la plénitude
de la foi,
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