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L'Église de Satan

L'Église de Satan

Titel: L'Église de Satan
Autoren: Arnaud Delalande
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Était-ce pour cela que son pays avait été mis à feu et
à sang durant près de quarante ans ? Était-ce pour cela que Louve, Aimery,
Héloïse, tant d’autres encore, avaient été tués ? Escartille, tremblant, prit
le crâne au milieu d’un morceau de fémur et d’une clavicule. Il s’assit, une
main sur les genoux, le crâne devant lui.
    Ses yeux plongèrent dans ses orbites vides.
    Trous noirs ouverts sur le néant de ses
interrogations.
    Il le caressa.
    Cette plaque : I-N-R-I.
    Et ces dents, ce sourire, ce rictus.
    —  Suis-je le Christ, Escartille ?
    Sa main s’ouvrit et le crâne tomba contre
la pierre.
    Un éclat d’os jaillit, au niveau de la tempe.
    Le crâne roula quelques instants, puis s’arrêta.
    Escartille avait sursauté ; tout cela lui
était devenu intolérable ; il se releva et poussa un grand cri, en portant
une main à sa tête. Son cri résonna sous les voûtes, en écho, jusqu’à se perdre
dans les profondeurs de la grotte. Il lui semblait voir encore danser sur les
parois de pierre les flammes de toutes ses illusions. Mais à présent, il
voulait la Lumière !
    — Dieu ! Parle-moi, je t’en prie !
    Escartille, sanglotant, ramassa le crâne.
    Il songea à ces hommes, ces milliers d’hommes,
par-delà les siècles, qu’une foi inextinguible n’avait cessé d’animer. Il les
vit par nuées, debout, agenouillés, en prière, les yeux voilés de larmes, voilés
de flammes. Catholiques et cathares, baignant dans le sang de leurs erreurs, de
leurs chagrins et de leurs renoncements. Auréolés de l’espérance que malgré
tout, leur vie aurait un sens, et qu’un jour, finalement… ils trouveraient le
bonheur.
    Le morceau orbital avait laissé dans le crâne
une sorte d’excavation. Comme un nouveau tombeau.
    Escartille se pencha pour se saisir de l’éclat
qui venait de s’échouer sur le sol. Il était recouvert d’une moisissure
poussiéreuse, due sans doute au voyage qu’il avait fait depuis Jérusalem, et à
l’endroit humide où il avait été conservé toutes ces années. Escartille y passa
la manche vigoureusement, au milieu de ses larmes.
    Et il s’arrêta net.
    Il venait de distinguer quelque chose.
    Mû par une impulsion subite, il joignit l’éclat
au crâne lui-même et, à l’aide d’une pierre tranchante, acheva d’ôter la
moisissure qui les couvrait.
    Il vit alors, sur le front, une marque. Ou
plutôt, un dessin, que l’on avait porté au fer.
    Le dessin d’un chien. Un chien !
    Il y passa la main, le sang refluant de son
visage Cette marque, ni Bertrand Marty, ni personne n’avaient pu la voir. La
foi même en ces reliques avait dû effacer cette trace de toutes les mémoires. Ce
stigmate… Jamais le Christ n’avait été frappé d’un tel sceau d’infamie ! Jamais
la Bible n’en avait fait mention ! Le symbole qu’il avait sous les yeux
était à lui seul un blasphème. Ce n’était pas un symbole chrétien, ni juif… Il
devait être… romain  ! Un symbole apposé par un légionnaire, du
temps de Ponce Pilate ! Escartille, les yeux exorbités, tremblant de tous
ses membres, mit une main sur sa bouche, tandis que ses pensées s’accéléraient
sous l’effet de cette subite découverte. Le chien psychopompe, gardien des
Enfers, associé aux mondes souterrains, peuplés de divinités païennes, chtoniennes
ou séléniques ; le guide de l’homme dans l’Au-delà. Mais-seul un brigand
avait pu être ainsi marqué au fer rouge, après sa mort ! Il n’avait
plus aucun doute. La trace qu’il avait sous les yeux lui faisait soudain l’effet
d’une flamme ardente, non pas celle de l’Esprit, mais bien celle d’une autre
forme de révélation.
    Un brigand !
Le signe d’un prisonnier, d’un voleur !
    Enterré… comme un chien !
    Quelqu’un , autrefois,
avait signé cette mort. Il s’agissait d’un autre prisonnier, d’un autre
crucifié. Torturé et marqué au fer. Un inconnu, un brigand du temps du Golgotha !
    Le Golgotha…
    Et l’évidence, lumineuse, lui sauta aux yeux.
    C’était à
Jérusalem, il y a de cela bien longtemps.
    Le légionnaire romain touchait de sa lance
le cadavre qui se trouvait à terre, comme pour vérifier qu’il était bien mort. Il
rajusta son casque luisant sous la pluie battante ; au pied du rocher, le
sol sablonneux n’était plus que tourbe. Le vent hurlait aux oreilles du soldat.
Il releva la tête un instant ; les éclairs et le tonnerre avaient cessé, mais
les nuages
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