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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia
Autoren: Mario Puzo
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PROLOGUE
    Quand la peste noire dévasta l’Europe, fauchant près de la moitié de sa population, bien des désespérés se détournèrent du ciel pour contempler la terre. Les plus philosophes d’entre eux pour dominer le monde physique, s’efforcer de découvrir les secrets de l’existence, les grands mystères de la vie ; les pauvres se contentant d’espérer surmonter leurs souffrances.
    C’est ainsi que Dieu redescendit sur terre pour y devenir l’Homme, et que la religion médiévale, perdant son pouvoir, dut céder la place à l’étude des grandes civilisations de l’Antiquité – romaine, grecque, égyptienne. L’esprit des Croisades disparut ; les héros de l’Olympe revinrent à la vie et se livrèrent de nouvelles batailles. L’Homme se dressa contre Dieu, la Raison triompha.
    La philosophie, les arts, la médecine et la musique firent beaucoup de progrès à cette époque ; la culture s’épanouit dans toute sa splendeur. Il y eut toutefois un prix à payer. Les vieilles lois furent violées avant que les nouvelles soient rédigées. Passer de la stricte adhésion à la parole de Dieu et de la croyance en la damnation éternelle à l’adoration de l’Homme, aux bienfaits du monde matériel, à l’humanisme, fut en réalité une difficile transition.
    À cette époque, Rome n’était pas une ville sainte, mais un lieu sans foi ni loi. Les gens se faisaient dépouiller en pleine rue, les maisons étaient pillées, la prostitution florissait, les assassinats se comptaient chaque semaine par centaines.
    De surcroît, l’Italie telle que nous la connaissons aujourd’hui n’existait pas encore. Des cités-États indépendantes y étaient gouvernées par de vieilles familles aristocratiques menées par un souverain, un duc ou un archevêque. Chacun combattait son voisin, les vainqueurs restaient toujours sur leurs gardes – car chaque nouvelle conquête semblait à portée de main.
    Les grandes puissances étrangères, soucieuses d’accroître leur empire, envahirent ensuite le pays, que la France et l’Espagne se disputèrent, tandis que les « barbares » turcs, musulmans, menaçaient l’Occident et la papauté.
    L’Église et l’État se livraient une lutte acharnée. La première avait connu la pantalonnade du Grand Schisme, où l’on avait vu deux papes, installés dans deux villes différentes, défendre chacun un pouvoir et des revenus bien réduits. Désormais, il n’y avait plus qu’un seul souverain pontife, installé à Rome, et les princes de l’Église se remirent à espérer. Plus forts que jamais, il leur suffirait de lutter contre le pouvoir temporel des rois et des aristocrates. Mais l’Église catholique était en plein tumulte, car elle connaissait les mêmes comportements effrénés qu’ailleurs.
    Les cardinaux n’hésitaient pas à envoyer leurs serviteurs, armés d’arbalètes et de pierres, combattre la jeunesse romaine dans les rues ; ils fréquentaient les courtisanes, avaient de nombreuses maîtresses, offraient et acceptaient des pots-de-vin. Le haut clergé était tout prêt, contre espèces sonnantes, à délivrer des indulgences, à promulguer des bulles papales absolvant les plus terribles crimes.
    Plus d’un citoyen blasé disait volontiers qu’à Rome tout était à vendre : l’argent pouvait acheter les églises, les prêtres, et même le pardon de Dieu.
    À de rares exceptions près, ceux qui devenaient prêtres étaient des fils cadets – donc destinés au sacerdoce dès leur naissance. Ils n’avaient pas de véritable vocation religieuse, mais l’Église avait encore le pouvoir de sacrer les rois, d’accorder bien des bienfaits matériels. Chaque grande famille d’Italie distribuait donc cadeaux et pots-de-vin pour voir ses fils entrer dans le collège des cardinaux.
    Telle fut la Renaissance – tels furent le cardinal Rodrigo Borgia et sa famille.

1
    Le soleil d’été tiédissait les pavés des rues de Rome tandis que le cardinal Rodrigo Borgia se dirigeait, d’un pas vif, vers une demeure de la piazza Merlo. Il allait y retrouver ses deux fils, César et Juan, et sa fille Lucrèce – chair de sa chair, sang de son sang. En cet heureux jour, le vice-chancelier du pape, l’homme le plus puissant de l’Église après le souverain pontife, se sentait tout particulièrement heureux.
    Quand il arriva chez leur mère, Vanozza Catanei, il fredonnait gaiement. Le mariage lui était certes interdit ; mais, homme de Dieu, il
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