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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia
Autoren: Mario Puzo
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déclara l’homme de l’art après l’avoir examiné. L’enfant était livide, fiévreux ; un peu de bile lui coulait des lèvres.
    — Un poison qui m’était destiné ! lança le cardinal, plein de fureur.
    Il se tourna vers Brandao :
    — Rassemble tout le monde dans la grande salle, verse du vin à chacun, puis amène-moi celui ou ceux qui auront refusé d’en boire.
    — Mon cousin, chuchota Adriana, je comprends ta douleur, mais tu vas perdre tes plus fidèles serviteurs, qui mourront empoisonnés…
    — Bien sûr que non ! Ce ne sera pas le vin qui vient de m’être servi. Mais le coupable ne pourra boire, car sa crainte l’étouffera.
    Duarte sortit aussitôt.
    Juan restait immobile, pâle comme un mort. Adriana, Julia et Lucrèce étaient à ses côtés, lui épongeant le front avec des linges mouillés.
    Le cardinal prit la petite main moite, la baisa, puis se rendit dans sa chapelle privée et s’y agenouilla devant une statue de la Vierge.
    — Sainte Mère, chuchota-t-il, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir, tout ce qui est humainement possible, pour amener à l’Église les âmes des hommes, pour veiller à ce qu’ils adorent votre fils, si seulement vous consentiez à épargner la vie du mien…
    César était resté à l’entrée et, se tournant vers lui, le cardinal vit qu’il avait les yeux pleins de larmes.
    — Viens prier pour ton frère, mon fils, dit-il.
    L’enfant s’approcha et s’agenouilla.
    Tout le monde attendit en silence le retour de Duarte.
    — Le coupable est découvert, annonça-t-il. C’est un simple marmiton, qui était auparavant au service de la maison de Rimini.
    Celle-ci régnait sur une petite province au nord-est de l’Italie, mais son chef, Gaspare Malatesta, était un redoutable ennemi de Rome et de la papauté. Un homme immense – on disait que son corps était assez vaste pour abriter deux âmes –, au visage buriné, à la chevelure rousse hirsute, qui lui avait valu d’être surnommé « le Lion ».
    Le cardinal s’approcha de Brandao et lui dit à voix basse :
    — Demande donc au cuisinier pourquoi il a tant de mépris pour Sa Sainteté, puis veille à ce qu’il boive le vin qui m’était destiné.
    Duarte acquiesça de la tête :
    — Et que ferai-je de lui, une fois que le vin aura fait son effet ?
    Les yeux du cardinal étincelèrent :
    — Attache-le sur un âne que tu enverras au Lion de Rimini avec un message l’avertissant qu’il ferait mieux de prier pour obtenir le pardon de Dieu !
    Juan demeura inconscient pendant plusieurs semaines, et le cardinal tint à ce qu’il reste au Vatican, soigné par son médecin personnel. Adriana et plusieurs servantes prenaient soin de l’enfant, tandis que son père passait des heures dans sa chapelle privée à supplier la Madone.
    Ses prières furent exaucées : Juan revint à la vie. Le cardinal n’en fut que plus décidé à défendre les intérêts de l’Église.
    Mais il savait aussi que le ciel ne suffirait plus à défendre sa propre famille. Il devait donc prendre d’autres mesures.
    Il lui faudrait écrire en Espagne et faire venir à Rome Miguel Corello, qu’on appelait Don Michelotto.
    C’était un neveu par la main gauche du cardinal. Dès l’enfance, à Valence, il avait senti l’appel du destin. C’était un garçon paisible, mais qui se voyait souvent contraint de défendre ceux que leur grandeur d’âme exposait aux tourments des autres – on prend souvent la bonté pour de la faiblesse. Dès cette époque, Miguel accepta donc sa destinée : protéger ceux qui portaient la torche de la sainte Église.
    Mais c’était un jeune homme d’une grande force physique, dont la fidélité était aussi farouche que les actes. On racontait que, dans son village, il avait affronté un redoutable bandit pour protéger la maison de sa mère, sœur du cardinal.
    Il n’avait que seize ans. Le brigand et plusieurs de ses complices, pénétrant dans la demeure, avaient voulu s’emparer du coffre de bois dans lequel sa mère avait dissimulé des reliques et le linge de maison. Miguel maudit les assaillants et refusa de bouger ; leur chef le frappa au visage d’un coup de stylet, lui entaillant profondément la joue. Mais le jeune homme tint bon, bien qu’il fût inondé de sang. Et les voisins commençant à s’attrouper dans la rue, les bandits battirent en retraite et disparurent dans les collines.
    Quelques jours plus tard, ils voulurent de nouveau pénétrer dans le
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