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Le Roman des Rois

Le Roman des Rois

Titel: Le Roman des Rois
Autoren: Max Gallo
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l’échafaud.
    J’étais à une fenêtre, regardant cette mer houleuse, ces hommes juchés sur les toits ou qui se pressaient aux fenêtres.
    Les quatre coupables s’avancèrent enfin, hâves, et répétèrent devant les cardinaux et la foule leurs fautes sacrilèges.
    Ils reconnaissaient être les chevaliers de Satan et non du Christ. Ils avaient livré la Terre sainte aux Infidèles.
    Puis ils se turent et un cardinal commença à lire la sentence. Leurs aveux ne les avaient pas protégés. Ils étaient condamnés au « mur », la détention perpétuelle, une agonie éternelle plus cruelle que la mort par le feu.
    Je vis Jacques de Molay se redresser. Je l’entendis crier d’une voix forte, et Geoffroy de Charnay s’était joint à lui :
    « Nous ne sommes pas coupables des choses dont on nous accuse, mais nous sommes coupables d’avoir bassement trahi l’Ordre pour sauver nos vies ! Nous avons eu peur des tourments. Mais l’Ordre est pur, il est saint ! Les accusations sont folles, absurdes ! Les confessions, menteuses ! »
    La foule a murmuré. Je l’ai sentie tout à coup pleine de compassion.
    Un sergent a frappé sur la bouche de Jacques de Molay afin qu’il se taise, et on a entraîné les deux dignitaires qui s’étaient rétractés.
    Je savais que la mort était au bout de leur chemin.
    Le roi de France n’était pas homme à se laisser défier.

    Philippe le Bel était dans son jardin à l’autre extrémité de l’île de la Cité.
    On l’avertit de la rébellion et rétractation de Jacques de Molay et de Geoffroy de Charnay.
    Lui, si maître des apparences, laissa jaillir sa fureur, ordonna qu’on dressât aussitôt un bûcher dans l’île des Juifs, en face du quai des Augustins.

    J’avais rejoint Geoffroy de Paris, clerc et chroniqueur.
    Je vis ainsi Jacques de Molay et Geoffroy de Charnay marcher calmement vers le bûcher, se dépouiller eux-mêmes de leurs vêtements.
    Je vis le visage serein de Jacques de Molay. Il s’était tourné vers Notre-Dame et avait regardé le palais royal, et sans doute avait-il aperçu le roi, ses proches conseillers, les chevaliers de la Cour qui voulaient voir le spectacle de sa mort.
    Les bourreaux s’approchèrent et les flammes enveloppèrent les deux Templiers.
    Je reconnus la voix de Jacques de Molay qui criait :
    « Les corps sont au roi de France, mais les âmes sont à Dieu ! »

    Après, il n’y eut plus que fumées, braises et cendres.
    Et le souvenir de ces deux hommes, et la rumeur qui s’était aussitôt répandue, selon laquelle Jacques de Molay avait assigné le pape et le roi à comparaître devant Dieu dans le délai d’un an.

sixième partie
    (1314)
    « Roi, de l’autrui tant as déjà pris
    Que de Dieu ni d’hommes n’as pris
    …………………………………..
    Et pourquoi aurais-tu maison
    En ciel, qui donnes occasion
    À tes gens, qui n’est de coutume ?
    Toute la France d’ire allumes. »
    Chronique
de Geoffroy de Paris.
    87.
    Dieu a-t-Il écouté Jacques de Molay, qui, sur le bûcher, avait, affirmait-on, réclamé justice et vengeance ?
    Je l’ai pensé quand j’ai vu la colère de Dieu frapper la plupart de ceux qui s’étaient acharnés, avec cruauté et avidité, sur les chevaliers du Temple, oubliant que cette milice du Christ avait eu pour parrain saint Bernard, et que c’était le créateur de l’Ordre cistercien qui avait rédigé les règles de l’Ordre.
    En quelques mois, Guillaume de Nogaret, le pape Clément V, le roi de France, son conseiller Enguerrand de Marigny, et bien d’autres ont été, comme l’avait demandé Jacques de Molay, rappelés à Dieu.

    Mais, en ces derniers mois du règne de Philippe le Bel, l’Énigmatique, la mort m’a paru la peine la plus légère que Dieu eût infligée aux bourreaux des Templiers, aux destructeurs de leur ordre.
    J’ai cru, j’ai craint qu’il n’ait maudit la race capétienne. Car des trois fils de Philippe le Bel – Louis le Hutin, Philippe le Long, Charles le Bel –, aucun n’avait de descendance mâle. Et c’est la fille de Philippe le Bel, Isabelle, mariée au roi d’Angleterre, qui eut un fils.
    Et il m’a même semblé que Dieu voulait que ceux qui avaient accablé les Templiers, les accusant de tous les vices,
soient précipités dans la fange et que soient dévoilées leurs turpitudes aux yeux de tous leurs sujets.
    J’ai vécu ces temps maudits et je dois encore, pour finir, en écrire la chronique.

    Tout
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