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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà
Autoren: Robert Merle
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bailler de bons coups d’épée aux
caïmans que j’ai dits.
    Lecteur, peut-être trouveras-tu
étrange que, si soucieux d’obtenir des attestations de baptême catholique pour
mon Samson et moi, j’aie négligé d’en quérir une pour mon aîné François :
mais c’est qu’elle ne lui aurait été d’aucune usance, sa Diane ayant logis au
château de Fontenac, et le mariage ne pouvant qu’il ne se fît dans la paroisse
de Marcuays, j’entends sous l’œil de notre évêque, lequel était fort peu enclin
à modérer l’avantage que la Saint-Barthélemy avait donné à son Église sur les
nôtres. Car il faut bien le dire enfin : le massacre qui s’était en Paris
et dans les bonnes villes du royaume perpétré, avait tant frappé les survivants
de terreur qu’un assez grand nombre d’entre eux – hors ceux qui allaient
combattre si vaillamment à La Rochelle les armées du Roi – ou bien
cherchaient quelque accommodement ou bien même se convertissaient tout à trac
au papisme, comme avait fait en Paris le ministre du Rosier, le bon pasteur
aimant mieux vivre catholique que périr huguenot. La frérèche elle-même qui,
n’ayant jamais pris les armes contre le Roi, avait assez peu à craindre de lui,
composait depuis lors avec le clergé, allant jusqu’à lui bailler gratis pro
Deo une terre que nous possédions à Sarlat et à laquelle un couvent de
capucins avait appétit afin que de s’agrandir.
    Dans le même temps, mon Quéribus,
dont on savait qu’il se trouvait fort haut dans la faveur du Duc d’Anjou,
répandait dans le Sarladais le bruit que son maître m’avait en ses bonnes
grâces, ce qui n’était point tout à plein faux, le Duc m’ayant baillé deux
cents écus sur sa cassette – mais aussi qu’il m’avait sauvé des massacres
du vingt-quatre août : menterie joyeuse que moi-même accréditais partout,
rien ne protégeant mieux qu’une princière protection, même si elle n’est que
supposée.
    Cependant, si ces prudents
déportements – j’entends le mien comme celui de la frérèche – avaient
si bien ménagé les choses dans le Sarladais que nous nous y sentions assurés de
notre sûreté, il était hors du probable que notre évêque consentît à marier
Diane à un hérétique, sans que celui-ci abjurât : ce que François eût
fait, sans doute, et ce que mon père eût permis peut-être, si Sauveterre
n’avait haussé au-dessus de nos têtes son inébranlable rigueur.
    Non que tous les évêques du royaume
fussent, même après la Saint-Barthélemy, aussi imployables que le nôtre.
D’aucuns, pour qui les familles et les alliances venaient davantage à compte,
opinaient même qu’il y avait profit pour l’Église de permettre au huguenot de
marier une garce papiste, à la seule condition que les enfants fussent élevés
par leur mère en la foi catholique, la foi du mari huguenot mourant alors avec
lui sans espoir de se perpétuer. C’était là, plaidaient-ils, une extirpation de
l’hérésie qui se faisait sans heurt ni dol, mais à la longue, et par le doux
moyen des femmes.
    Car tous les prêtres n’étaient pas
en France tant fiers et farouches que notre évêque de Sarlat, tant s’en
fallait : sans cela Gertrude n’eût point eu fiance en la pliable humeur de
son curé normand pour la marier à Samson sans quérir davantage que le billet
latin sué par Pincettes, lequel, montant à la course en sa tiède et claire
chambre, je tendis à la belle et qu’elle glissa dans le mitan de ses tétins, où
il fut assurément plus douillettement logé que dans mon pourpoint glacé par le
vent et couvert de flocons de neige qui jà à son feu fondaient.
    — Ha mon bon frère ! Que
bon, brave et bénin vous êtes ! cria Gertrude qui ne savait guère ce
qu’elle disait, étant au comble de la félicité. Et pour le coup, me jetant ses
beaux bras autour du col et m’épousant de toute la longueur de son corps, elle
me poutouna à la fureur.
    — Miroul, dis-je par-dessus son
épaule à mon gentil valet, lequel nous espinchait, son œil marron tout égayé
(mais son œil bleu restant froid), va dire à mon père qu’il neige et quiers de
lui permission d’allumer le feu en les deux cheminées de la grand’salle
(lesquelles se faisaient face), le temps se mettant à pierre fendre.
    — J’y cours, Moussu ! dit
Miroul fort aise de sa mission, la grand’salle jouxtant la cuisine où
Florine – la blondette huguenote qu’il avait arrachée
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