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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort
Autoren: Paul C. Doherty
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pour les enterrer.
    Il poussa un profond soupir.
    — Mais oui, une fois les Frères du Libre Esprit massacrés, je n’avais d’autre choix que de faire régner la terreur.
    — Même en vous en prenant à ces innocents, la fille de l’aubergiste et le benêt de la place ? releva Ranulf.
    — Bien entendu.
    Maître Benedict se leva.
    — J’ai tenu parole ; respectez la vôtre. Messire Ranulf, vous voulez ma mort.
    — Que nenni, corrigea ce dernier. C’est Dieu qui le veut ! Je vais vous donner une chance : vous n’en avez pas laissé autant à vos victimes. J’ai ouï votre histoire, Messire le chapelain, mais je suis toujours persuadé que vous avez pris plaisir à tuer. J’en suis convaincu.
    Corbett recula en se demandant quelles étaient les intentions de son compagnon.
    — Comme je l’ai dit, déclara Benedict qui désigna Ranulf, vous voulez ma mort.
    Il eut un geste d’impuissance.
    — À quoi bon plaider le privilège de clergie, subir l’exil dans un monastère ? Je connais les hommes de votre trempe, Ranulf-atte-Newgate : vous m’attendrez à la sortie, si par hasard vous me prêtez vie jusque-là.
    — Vous avez évoqué les horribles choses dont vous fûtes témoin, rétorqua Ranulf avec calme. Moi aussi j’ai assisté à des horreurs, Maître Benedict. J’ai vu des hommes et des femmes poignardés dans des tavernes, des amis pendus pour avoir volé une miche de pain alors qu’ils avaient faim, et, en vous écoutant, j’ai pensé à un jeu auquel nous nous livrions. On l’appelait le « piqué du faucon ». Nous posions une massue et un marteau sur le sol entre nous. Le premier qui s’emparait d’une arme pouvait frapper l’autre. Nous allons y jouer à présent. Chanson, cria-t-il, apporte l’arbalète.
    Le clerc des écuries obtempéra. Ranulf la mit entre ses pieds, un trait meurtrier posé à côté. Puis il prit le grand arc et l’une des flèches du carquois. Il permit à son adversaire de les examiner avant de les déposer entre les pieds de son ennemi. Corbett, épouvanté, ne quittait pas la scène des yeux.
    — Personne n’interviendra, prévint Ranulf. Messire le prêtre, vous êtes un maître archer, prompt et terrible. Si vous me touchez avant que je vous atteigne, alors vous serez libre. Sir Hugh ?
    — Ranulf, ceci est...
    Le magistrat, lisant la détermination dans les yeux de Ranulf, accepta d’un hochement de tête. Il glissa néanmoins la main vers la garde de sa propre dague. Maître Benedict était des plus adroits. Il pouvait encocher un trait plus vite que Ranulf pouvait amorcer l’arbalète.
    Le chapelain scruta Ranulf avec soin et fit un signe de tête. Il se leva, le corps détendu, les bras ballants, et remua ses poignets pour les assouplir.
    — Quand j’aurai récité le Gloria , annonça Ranulf avec un sourire. Cela convient pour un prêtre assassin qui va rencontrer son Dieu.
    — Dites-le et finissons-en.
    — Gloria Patri, entonna le clerc d’une voix rauque, et Filii et Spiritus Sancti...
    Benedict se baissa soudain, saisit l’arc et la flèche, les leva et fit un pas en arrière. Ranulf, pourtant, ne prit pas l’arbalète ; il tira le poignard de son ceinturon et le lança de toutes ses forces contre le chapelain qu’il atteignit en pleine poitrine. Ce dernier recula en titubant et lâcha ses armes. Ranulf dégaina son épée, la pointa d’un mouvement ondulant vers le ventre de son adversaire, puis, se rapprochant, l’enfonça jusqu’à la garde. Maître Benedict battit des mains. Sa tête retomba en arrière et il s’étouffa dans son sang.
    — J’ai annoncé, déclara Ranulf en appuyant sans pitié sur son épée, que je vous frapperais avant que vous me frappiez : et c’est ce que j’ai fait !
    Il dégagea son arme.
    Les yeux du chapelain papillotèrent ; il poussa un grand soupir, s’effondra sur les genoux puis sur le flanc.
    — Fourberie, chuchota Corbett.
    — Justice ! gronda son compagnon.
    Il s’accroupit devant le mort et arracha son poignard.
    — C’était un tueur, un meurtrier, Sir Hugh. Vouliez-vous qu’il s’en aille en caracolant loin des crimes odieux qu’il a commis ? Vouliez-vous qu’un tel homme se faufile parmi les ombres qui hantent vos cauchemars ? Qu’il revienne peut-être un jour au manoir de Leighton, s’y introduise, furtif, une nuit, pour exercer sa vengeance sur vous et les vôtres ? Un animal blessé est dangereux. Maître Benedict Le Sanglier
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