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Le Monstespan

Le Monstespan

Titel: Le Monstespan
Autoren: Jean Teulé
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carrosse, là-bas. Allez-y !
    Le marquis en
robe de bure sort, traverse un chemin, pénètre dans la cour du château
abandonné pour l’après-midi, se dirige vers la chapelle. Adossée contre un mur,
une tour du XV e siècle en
marque l’entrée. Louis-Henri baisse la tête pour passer la petite porte. En
face, un renfoncement sombre où il se cache. Un couloir, à sa droite, mène au
lieu de culte de cette demeure féodale appartenant à un parent de Mlle des
Œillets, la demoiselle d’honneur d’Athénaïs.
    Des bruits de
roues ferrées résonnent sur les pavés de la cour. Bientôt un premier personnage
en chasuble blanche ornée de pommes de pin noires entre. Il est effectivement
d’une grande laideur  – teint et traits de gargouille aux longues oreilles
pointues  –, il paraît être l’incarnation du mal. Un abbé à surplis et
étole le suit ainsi qu’un autre homme portant un panier. Les moines en file
indienne arrivent derrière. Quand le quatrième se baisse pour passer la porte,
Montespan sort de sa cachette, lui donne sa bourse dont les pièces
s’entrechoquent et ils échangent leurs places. Le troisième moine, ayant perçu
le cliquetis, se retourne mais il est rassuré de se voir toujours suivi par un
grand ecclésiastique aux paumes jointes et front baissé sous la capuche.
    Le
parallélépipède d’un tombeau en pierre trône au centre de la petite chapelle.
L’abbé Guibourg, crucifix et canif aux mains, regarde Lesage couvrir le
mausolée d’un drap. L’abbé Mariette fait des aspersions d’eau bénite en
marmonnant l’Évangile des Rois. Les moines, tous tournés dans le même sens, se
placent aux quatre angles de la salle gothique. Le Gascon, entré le dernier, se
retrouve près de la porte et dos au tombeau sur lequel aura lieu la cérémonie.
De longs vitraux étroits éclairent les dalles de lueurs célestes. Montespan
observe les frises murales, reconnaît le style de Sabatel. Sa vaste capuche
brune profondément enfoncée lui dissimule presque toute la tête qu’il baisse
encore un peu plus vers le sol lorsqu’il entend les cahots d’un carrosse qui
arrive.
    Quand on dit
de quelqu’un que son visage est passé par toutes les couleurs !... C’est
vrai pour le visage de Louis-Henri sous la capuche. Il passe par toutes les
couleurs.
    Rose ! Le
cocu est rose d’émotion quand il reconnaît le rythme du claquement des talons
fins de sa femme qui vient. Athénaïs pénètre dans la chapelle. Son mari, sans
redresser la tête, pivote ses pupilles vers elle en robe de point d’Angleterre
plissée et agrafe de pierreries sous un manteau de gaze. Elle a grossi et puis
vieilli comme lui (ils ont tous deux quarante-neuf ans), passe en le frôlant.
Jamais il ne s’est trouvé si près d’elle depuis tant d’années.
    Rouge !
Le marquis devient tout rouge quandil entend son épouse se dénuder
entièrement derrière lui. Le feulement de l’ensemble des habits glissant le
long de sa peau et s’abattant au sol !... Il perçoit qu’elle s’allonge à
plat dos sur le tombeau et que c’est le ventre du corps nu d’Athénaïs qui
servira d’autel.
    «  Astaroth,
Asmodée, princes de l’Amitié et de l ’Amour... » — Louis-Henri reconnaît la belle voix
de Françoise - « ... je vous conjure d’accepter le sacrifice que
je vous présente pour les choses que je demande. » Quel sacrifice et
pourquoi a-t-elle commencé par invoquer le nom de deux démons ? Quelle est
cette messe à rebours ? « Je veux que le roi continue à me
témoigner son amour, que les princes et princesses de la cour m’honorent, et
que rien de ce que je sollicite auprès de Sa Majesté ne me soit refusé. » Montespan
entend ensuite sortir, des grincements d’osier d’un panier, les pleurs d’un
nourrisson réveillé puis les sons d’une lame qui tranche... Il n’y a plus de
pleurs mais les bruits d’un liquide qui coule dans un calice. Sonorités de
gorge de quelqu’un qui boit. Ô ce bruit de déglutition. Louis-Henri est
vert !
    Blanc... Le
Gascon blêmit pendant que sa femme se rhabille, à croire que c’est lui qu’on
vient de vider de son sang. Ses jambes de capitaine peinent à le soutenir, sont
prêtes à se dérober sous lui. De nouveau le choc retrouvé des talons fins sur
les dalles qui ralentit à hauteur du cocu, s’immobilise. Françoise renifle
autour un parfum, semble se demander si..., regarde la capuche du moine près
d’elle puis s’en va.
    Quant au
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